Objectif de neutralité carbone en 2050, état d'"urgence écologique et climatique", trajectoire de baisse de la part du nucléaire: l'Assemblée se penche en début de semaine sur le projet de loi énergie et climat, vu comme un test des ambitions écologiques du gouvernement.
Alors que l'acte II du quinquennat se veut plus vert, le ministre de la Transition écologique François de Rugy a reconnu que le texte arrivait - a priori mardi soir dans l'hémicycle -, "dans un contexte particulier", notamment après la crise des "gilets jaunes" et des élections européennes marquées par une percée des écologistes.
Depuis, le Premier ministre Edouard Philippe a "mis l'urgence écologique au premier rang de ses priorités" lors de sa deuxième déclaration de politique générale mi-juin.
Selon François de Rugy, le projet de loi "redonne clairement le cap d'une ambition forte" sur le climat.
En matière de neutralité carbone -ne pas émettre plus de gaz à effet de serre que le pays ne peut en absorber, notamment via les sols et forêts-, le ministre a vanté un rehaussement "drastique" des ambitions françaises, quelques jours avant que l'UE ne bute sur un accord pour inscrire la date de 2050 en raison des réticences de l'Est.
"Au lieu de diviser par quatre nos émissions de CO2 par rapport à l'année de référence de 1990", il s'agit "de les diviser au moins par six", souligne-t-il.
C'est écrit "noir sur blanc dans le texte", comme "le passage de -30% à -40%" de consommation d'énergies fossiles d'ici 2030, quelque chose "là aussi d'extrêmement fort", insiste le ministre.
Mais le projet, qui doit aussi permettre de fermer les dernières centrales à charbon en 2022, a laissé les associations environnementales sur leur faim.
Elles ont notamment critiqué le décalage de 10 ans, de 2025 à 2035, de la réduction à 50% de la part du nucléaire dans la production électrique et insisté sur la réhabilitation énergétique des millions de bâtiments "passoires énergétiques" que compte la France.
- "Trahison énergétique" -
Leurs inquiétudes ont été relayées en commission par certains élus d'opposition.
Marie Noëlle Battistel (PS) a souligné ainsi sa "déception" au vu d'un texte creux". François Ruffin (LFI) a aussi critiqué un gouvernement qui s'en remet pour la transition écologique au "miracle" du "marché", tandis que l'écologiste François-Michel Lambert (Libertés et Territoires) a évoqué une "petite loi", "a minima".
Réservé, le LR Julien Aubert s'est posé en défenseur de "la préservation de l'excellence nucléaire française", ajoutant: "la transition énergétique, oui, la trahison énergétique, non", Laure de la Raudière (UDI et indépendants) vantant aussi "les atouts" de la filière.
Les députés ont étoffé le projet de loi en commission. D'emblée, ils ont inscrit "l'urgence écologique et climatique" à l'article 1er, le ministre saluant cette "déclaration politique".
Ils ont aussi prévu, à l'initiative notamment du rapporteur Anthony Cellier (LREM), une expérimentation à partir de 2021 lors de la vente d'un logement "passoire": la consignation d'une part du montant de la vente pour financer des travaux de rénovation énergétique.
Mais certains élus plaidaient, à l'instar des ONG, pour interdire purement et simplement la location de ces logements mal isolés.
L'ex-"marcheur" Matthieu Orphelin a rappelé que l'interdiction à compter de 2025 était "un engagement porté par Emmanuel Macron dans la campagne présidentielle".
Ce proche de Nicolas Hulot a déploré globalement des avancées "insuffisantes" en commission, notant que l'"urgence" décrétée n'avait pas produit assez d’effets.
Guère plus d'enthousiasme du côté des associations, malgré les retouches. Pour le Réseau action climat, "le compte n’y est pas" et il faudra "corriger le tir" en séance lors de cet examen en première lecture.