C’est le grand jour pour l’exécutif. La France va présenter ce 28 avril à la Commission européenne son « plan national pour la reprise et la résilience », pour validation. Une présentation qui intervient près de neuf mois après l’accord historique entre les chefs d’Etat et de gouvernement sur un plan relance européen de 750 milliards d’euros. Le ministre de l’Economie et des Finances Bruno Le Maire et le ministre des Comptes publics Olivier Dussopt seront auditionnés ce mardi soir par les deux assemblées, sur ce dossier.
La part française du plan européen s’élève à près de 40 milliards d’euros, la somme va nourrir à hauteur de 40 % les 100 milliards d’euros du plan de relance lancé au niveau national fin 2020. 30 millions d’euros ont été « décaissés » à ce jour selon Bercy.
Adresser une liste de réformes et d’investissements à la Commission européenne
Pour toucher le chèque européen, un certain nombre de conditions doivent être respectées et les différents pays sont priés de préciser les réformes et investissements qu’ils comptent mettre en œuvre pour atténuer les effets de la crise économique, née de la pandémie. Le cadre est précis. Par exemple, 37 % des fonds devront être mobilisés pour servir des objectifs environnementaux européens, comme la neutralité carbone à horizon 2050. 20 % des fonds seront destinés à la digitalisation de l’économie.
Mais le plan européen, baptisé « Next Generation EU » fait aussi le lien avec le pacte budgétaire européen, car les 750 milliards d’euros de subventions et de prêts font l’objet d’un emprunt conjoint. Les Etats membres doivent fournir une « explication détaillée de la manière dont les recommandations par pays sont prises en compte dans le cadre des mesures proposées ». Pour Bruno Le Maire, interviewé ce lundi sur Europe 1, la réforme des retraites ne fait pas partie des exigences de la Commission européenne. « Ce n’est pas Bruxelles qui nous demande une réforme des retraites, c’est la France qui a besoin d’une réforme des retraites pour que son système des retraites par répartition soit financièrement viable », a-t-il insisté. En revanche, la France pourrait par exemple évoquer, sa réforme de l’assurance chômage. Repoussé à cause de la crise, un nouveau mode de calcul des allocations doit entrer en vigueur au 1er juillet.
Au total, une douzaine de pays comptent soumettre leur plan à Bruxelles ce 28 avril. La Chambre des députés en Italie, pays qui s’attend à recevoir la part la plus importante du plan européen (191,5 milliards d’euros de prêts et subventions), vient d’approuver ce mardi après-midi le plan présenté par le chef du gouvernement Mario Draghi. La Commission européenne va rendre son avis sur chacun des plans dans un délai de deux mois. Charge ensuite au Conseil de donner son accord sur chacun d’entre eux.
Paris demande à la Commission européenne de se prononcer rapidement
La France a tenu conjointement une conférence de presse avec l’Allemagne ce mardi, Paris et Berlin étant à l’origine du plan européen. Bruno Le Maire a appelé la Commission européenne à examiner rapidement les différents dossiers. « Nous avons perdu trop de temps. La croissance chinoise est repartie. Les Etats-Unis sont en plein essor. L’Union européenne doit rester dans la course », a-t-il plaidé.
Il faut dire que les espoirs d’un décaissement rapide ont été vite douchés. Bruno Le Maire a annoncé lundi que la France recevrait la première tranche du plan européen, d’un montant de cinq milliards d’euros, « début septembre », contrariant sa promesse d’une arrivée « au début de l’été, début juillet ». Auditionné au Sénat le 11 février, le secrétaire d’Etat aux affaires européennes anticipait même un versement « dès le mois de mai », un optimisme qui avait surpris le président de la commission sénatoriale, Jean-François Rapin (LR).
10 Etats sur 27 n’ont pas encore ratifié le mécanisme des nouvelles ressources de l’Union
Mais voilà, le processus de ratification, soumis à une quarantaine de chambres parlementaires sur le continent, prend plus de temps que prévu. A ce jour, 10 États membres sur 27 n’ont toujours pas ratifié le texte permettant à l’Union européenne de se doter de nouvelles ressources propres, fondées notamment sur des contributions sur les déchets d’emballages en plastique non recyclés. Sans ces nouvelles garanties, impossible de pouvoir emprunter sur les marchés les sommes nécessaires au plan de relance. Le Parlement français avait été le cinquième à donner son feu vert à ce mécanisme.
La Commission européenne presse les retardataires d’accélérer le mouvement. Parmi eux, on compte l’Irlande, la Roumanie, la Hongrie, l’Estonie, la Lituanie ou encore la Pologne, où par exemple le dossier menace l’unité de la coalition au pouvoir. Le processus de ratification n’est toujours pas parvenu à son terme dans plusieurs pays dits frugaux, extrêmement prudents sur le plan de relance européen : les Pays-Bas, l’Autriche ou encore la Finlande. La signature de la première économie de l’UE, l’Allemagne, manque également à l’appel. Le processus est resté à l’arrêt pendant trois semaines, le temps pour la puissante Cour constitutionnelle de Karlsruhe d’examiner un recours contre le plan de relance européen.