Plusieurs milliers de personnes à la marche controversée contre l’islamophobie à Paris

Plusieurs milliers de personnes à la marche controversée contre l’islamophobie à Paris

Plusieurs milliers de personnes ont défilé dimanche à Paris pour une marche controversée contre l'islamophobie, qui a déchiré la gauche et...
Public Sénat

Par Shahzad ABDUL et Jérémy MAROT

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Plusieurs milliers de personnes ont défilé dimanche à Paris pour une marche controversée contre l'islamophobie, qui a déchiré la gauche et provoqué une levée de boucliers du gouvernement et de l'extrême droite.

"Oui à la critique de la religion, non à la haine du croyant", "stop à l'islamophobie", "vivre ensemble, c'est urgent", pouvait-on lire sur des pancartes de manifestants au milieu de nombreux drapeaux français. "Solidarité avec les femmes voilées", ont scandé des participants.

Quelque 13.500 personnes ont marché dans la capitale, selon un comptage réalisé par le cabinet Occurence pour un collectif de médias, dont l'AFP, pour cette mobilisation, initiée par plusieurs personnalités et organisations comme le Collectif contre l'islamophobie en France. La préfecture de police de Paris a, elle, dénombré 10.500 participants.

L'appel à manifester a été lancé le 1er novembre dans le quotidien "Libération", quatre jours après l'attaque d'une mosquée à Bayonne et sur fond de débat ravivé sur le port du voile et la laïcité. Le message initial était de dire "STOP à l'islamophobie", à la "stigmatisation grandissante" des musulmans, victimes de "discriminations" et d'"agressions".

Manifestation contre l'islamophobie devant la gare du Nord à Paris, le 10 novembre 2019
Manifestation contre l'islamophobie devant la gare du Nord à Paris, le 10 novembre 2019
AFP

"J'en ai marre que dans la rue on me dise +Rentre dans ton pays+. Je suis française !", raconte Amina, informaticienne de 26 ans.

- "Prôner une société mixte" -

"On est venus avec un message de tolérance, pour prôner le vivre ensemble, mais contre les discriminations. Il est urgent qu'on arrête de monter les Français les uns contre les autres", ajoute la jeune femme.

"On veut se faire entendre, prôner une société mixte, ne pas être écartés de la société", renchérit Asmae Eumosid, une femme voilée de 29 ans venue d'Epinay-sur-Seine (Seine-Saint-Denis).

"On entend tout et n'importe quoi sur l'islam et sur les femmes voilées aujourd'hui. On essaie de stigmatiser les musulmans, de les mettre à l'écart de la société", assure cette ingénieure dans l'automobile.

A Toulouse, Mouss Amokrane, chanteur du groupe Zebda, s'est joint à la mobilisation d'environ 200 personnes. "C'est flagrant, la multiplication, l'explosion des actes antimusulmans", regrette-t-il.

Manifestation contre l'islamophobie à Paris, le 10 novembre 2019
Manifestation contre l'islamophobie à Paris, le 10 novembre 2019
AFP

"Avec ou sans foulard, on en a marre d'être les dernières de la classe", souligne Nadjet Fellah, infirmière, qui s'est battue en Algérie contre le port du voile. "J'ai choisi de ne pas le porter mais ça me fait mal que celles qui le portent soient prises à partie".

A Marseille, un autre rassemblement a eu lieu avec quelques centaines de personnes - familles musulmanes, mais aussi syndicalistes et militants de gauche. La foule a scandé "nous sommes tous des enfants de la République".

Depuis l'appel à manifester, la classe politique se déchire sur cette thématique. La notion-même d'"islamophobie" ainsi que l'identité de certains signataires de l'appel ont conduit une partie de la gauche à ne pas s'y associer, au PRG ou au PS (qui a annoncé travailler à l'organisation d'une prochaine manifestation contre le racisme).

Manifestation contre l'islamophobie, le 10 novembre 2019 à Paris
Manifestation contre l'islamophobie, le 10 novembre 2019 à Paris
AFP

Mais dans le cortège parisien, plusieurs élus de la France insoumise (Clémentine Autain, Danièle Obono, Eric Coquerel...) étaient bien présents au côté de leur chef de file Jean-Luc Mélenchon. Ce dernier a tweeté en fin de journée se félicitant de cette "magnifique journée". "Les diviseurs et les haineux de la République en Marche et du FN sont en échec. La France est notre bien commun", a-t-il ajouté.

Egalement dans la rue, Ian Brossat, porte-parole du PCF, estime qu'"il y a un climat de haine contre les musulmans". "On ne peut rester les bras ballants", ajoute-t-il fustigeant au passage les attaques de la présidente du Rassemblement national.

- "Ambiguïtés" -

Marine Le Pen, qui avait évoqué une manifestation "main dans la main avec les islamistes", a lancé dimanche soir dans un tweet: "avis aux manifestants : l'islamisme a tué beaucoup plus de musulmans en France (Merah, Nice...) que l'islamophobie (qui n'en a fait aucun) ! Ceci révèle l'étendue de votre arnaque!"

Plusieurs membres du gouvernement ont également déploré la tenue de ce rassemblement qualifié d'"insupportable" par le secrétaire d'Etat en charge de la Jeunesse, Gabriel Attal.

"La France Insoumise et des cadres d'EELV sont pris la main dans le pot de confiture clientéliste et communautariste", a-t-il dénoncé. Evoquant des "ambiguïtés", Elisabeth Borne, ministre de la Transition écologique et solidaire, a estimé que la marche dressait les gens "les uns contre les autres".

Dans la même thématique

Brussels Special European Council – Emmanuel Macron Press Conference
3min

Politique

Élections européennes : avant son discours de la Sorbonne, l’Élysée se défend de toute entrée en campagne d’Emmanuel Macron

Ce jeudi 25 avril, le président de la République prononcera un discours sur l’Europe à la Sorbonne, sept ans après une première prise de parole. Une façon de relancer la liste de Valérie Hayer, qui décroche dans les sondages ? L’Élysée dément, affirmant que ce discours n’aura « rien à voir avec un meeting politique ».

Le

Plusieurs milliers de personnes à la marche controversée contre l’islamophobie à Paris
8min

Politique

IA, simplification des formulaires, France Services : Gabriel Attal annonce sa feuille de route pour « débureaucratiser » les démarches administratives

En déplacement à Sceaux ce mardi dans une maison France Services, quelques minutes seulement après avoir présidé le 8e comité interministériel de la Transformation publique, le Premier ministre a annoncé le déploiement massif de l’intelligence artificielle dans les services publics, ainsi que la simplification des démarches. Objectif ? Que « l’Etat soit à la hauteur des attentes des Français ».

Le

Brussels Special European Council – Renew Europe
10min

Politique

Européennes 2024 : avec son discours de la Sorbonne 2, Emmanuel Macron « entre en campagne », à la rescousse de la liste Hayer

Emmanuel Macron tient jeudi à la Sorbonne un discours sur l’Europe. Si c’est le chef de l’Etat qui s’exprime officiellement pour « donner une vision », il s’agit aussi de pousser son camp, alors que la liste de la majorité patine dans les sondages. Mais il n’y a « pas un chevalier blanc qui va porter la campagne. Ce n’est pas Valérie Hayer toute seule et ce ne sera même pas Emmanuel Macron tout seul », prévient la porte-parole de la liste, Nathalie Loiseau, qui défend l’idée d’« un collectif ».

Le

Jordan Bardella visite Poste-Frontiere de Menton
5min

Politique

Elections européennes : la tentation des seniors pour le vote RN, symbole de « l’épanouissement du processus de normalisation » du parti, selon Pascal Perrineau

Alors que la liste menée par Jordan Bardella (31.5%) devance de plus de 14 points la liste Renaissance, menée par Valérie Hayer (17%), selon le dernier sondage IFOP-Fiducial pour LCI, le Figaro et Sud-Radio, le parti de Marine Le Pen, mise désormais sur l’électorat âgé, traditionnellement très mobilisé pour les élections intermédiaires. Désormais deuxième force politique chez les plus de 65 ans (le RN conquiert 24% de cet électorat, 7 points de moins que Renaissance), la stratégie semble porter ses fruits. Décryptage avec le politologue Pascal Perrineau, professeur émérite à Sciences Po Paris et récent auteur de l’ouvrage Le Goût de la politique : Un observateur passionné de la Ve République, aux éditions Odile Jacob.

Le