L’affaire avait fait grand bruit au Parlement, la ministre avait même dû s’expliquer devant la commission des Lois du Sénat fin octobre, sur l’e-mail (révélé par le Canard enchaîné) envoyé par un conseiller de son cabinet à Matignon. Le document mettait côte à côte résultats électoraux de la République en marche et la liste des juridictions menacées de perdre un juge d’instruction dans la réorganisation prévue par la réforme de la justice. Une petite bombe à quelques mois des municipales.
Ce 25 novembre, le sénateur LR Jérôme Bascher a remis le sujet sur la table. « Il y a un moment les Français ne comprennent plus, Madame la ministre, que, parce qu’on est un cabinet ministériel, vous ne soyez pas sanctionnée », a déclaré le sénateur de l’Oise, sur le plateau d’Audition publique. « Dans n’importe quelle démocratie occidentale, le ministre de la Justice, garde des Sceaux, aurait sauté dans les 24 heures […] Quelle a été la sanction pour ce conseiller ? »
Nicole Belloubet, à l’époque, avait reconnu une « maladresse » et même une « erreur » sur ce courrier électronique. La garde des Sceaux a répété, une fois encore, qu’il n’était pas question de procéder à la réorganisation des juridictions et à la spécialisation de tribunaux autrement que sur la base de critères « clairs et transparents », « après avis des conseils de juridiction ». « Il n’est absolument pas question – je l’ai dit devant la commission d’enquête – et donc vous le savez parfaitement, qu’une décision publique, a fortiori une décision concernant l’organisation judiciaire, soit prise sur la base de critères partisans. Ça n’est pas possible, ça n’est pas envisageable, ça n’est pas acceptable, et ce n’est d’ailleurs pas ce qui se fait ! »
Nicole Belloubet réaffirme sa « confiance » à son cabinet
La réponse n’a pas convaincu le sénateur. « Ça ne se fait pas mais ça a été envisagé », a enchaîné Jérôme Bascher, pour qui ce dossier « rappelle furieusement l’affaire Benalla », car une fuite a placé le ministère au pied du mur. « Vous cherchez à tout mélanger. Moi je dis clairement : j’ai confiance dans mon cabinet », a répliqué Nicole Belloubet, précisant que le conseiller n’avait « pas été sanctionné ». Pour la garde des Sceaux, cet e-mail n’a « été suivi d’aucun effet ».
Le député de la France insoumise, Ugo Bernalicis, présent lui aussi dans l’émission pour débattre avec la ministre, a tenté d’enfoncer le clou, en considérant que cette défense se faisait au « mépris des faits ». « Je m’aperçois que vous n’avez aucun fait précis à me citer », a rétorqué la garde des Sceaux.