Politique sociale : le « en même temps » d’Emmanuel Macron a du plomb dans l’aile
Trois économistes proches d’Emmanuel Macron dénoncent dans une note confidentielle, un déséquilibre social dans la politique du gouvernement.

Politique sociale : le « en même temps » d’Emmanuel Macron a du plomb dans l’aile

Trois économistes proches d’Emmanuel Macron dénoncent dans une note confidentielle, un déséquilibre social dans la politique du gouvernement.
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Le 24 février 2017 au siège d’En Marche, entouré de Laurence Haïm, Gérard Collomb ou encore Benjamin Griveaux, Jean Pisani-Ferry présentait les grandes lignes du programme économique, « réalisable et sérieux » d’Emmanuel Macron. Plus d’un an plus tard, l’ancien commissaire général de France Stratégie, et deux autres économistes proches du chef de l’État, Philippe Aghion, Philippe Martin, s’alarmant de l’image d’un « pouvoir indifférent à la question sociale » après un an de quinquennat.

C’est dans une note intitulée, « renforcer la dimension émancipatrice de l'action gouvernementale » et dévoilée dans le journal Le Monde que les trois économistes ont émis leurs observations. Selon le quotidien, la note, datée du 4 juin, aurait été écrite à la demande d'Emmanuel Macron, « agacé » par leurs critiques. Jean Pisani-Ferry n’a pas démenti l’authenticité du texte mais ne souhaite pas le commenter car il n’était pas destiné à être publié. Contacté par Public Sénat, Philippe Aghion a également affirmé vouloir « rester en retrait ».

Que reprochent-ils au gouvernement ?

« L’ambition émancipatrice (…) du programme présidentiel échappe à un nombre grandissant de concitoyens, y compris parmi les plus fervents supporteurs de 2017 » (…) « Le thème de la lutte contre les inégalités d’accès, qui était constitutif de l’identité politique du candidat, est occulté » regrettent-ils avant de relever que « beaucoup des soutiens du candidat expriment la crainte d’un recentrage à droite motivé par la tentation d’occuper le terrain politique laissé en friche par un parti Les Républicains en crise ». Une crainte d’autant plus justifiée que les seuls ministres « politiques » (Bruno Le Maire, Gérald Darmanin ou Édouard Philippe) du gouvernement proviennent de LR » relèvent-ils.

Sur le plateau de Public Sénat, Frédéric Dabi, directeur général de l’IFOP note que « la cartographie des soutiens » d’Emmanuel Macron s’est déplacée vers la droite depuis la présidentielle. « L’attente de protection sociale est très importante chez les Français, elle a pris 12 points entre 2016 et 2018. On voit qu’il y a un manque (…) Il y a un sentiment de déséquilibre entre les deux offres programmatiques « libérer et protéger », d’Emmanuel Macron. De ce point de vue là, le compte n’y est pas. Il n’y sera qu’à travers le prisme du pouvoir d’achat ».

Frédéric Dabi: " L’attente de protection sociale est très importante chez les Français"
02:10

Mettre fin à cette image de Président des riches

Après avoir « libéré », il serait donc temps d’un peu plus « protéger » semblent dire les auteurs. Plusieurs pistes sont évoquées pour rééquilibrer la politique économique et sociale. « Il ne faut pas réduire la prime d’activité » car elle « permet à la fois de réduire la pauvreté des travailleurs modestes et d’inciter au retour au travail à un moment où les difficultés de recrutement apparaissent » plaident-ils, dans ce contexte de remise en question des aides sociales (voir notre article). Les économistes demandent également plus de représentants des salariés dans les conseils d’administration, une révision des aides aux entreprises, une taxation plus lourde des très grosses successions ou encore de différer la suppression de la taxe d’habitation pour les 20 % des ménages les plus aisés.

Beaucoup moins protecteurs en apparence, Jean Pisani-Ferry et ses confrères préconisent de « réduire la durée d’indemnisation lorsque le chômage baisse, éventuellement avec modulation par secteur/qualification/localisation ».

Sur ce sujet, le gouvernement devrait annoncer, à la fin du mois, des pistes pour refondre les aides sociales, tout en faisant en sorte « que l'accroissement de la dépense publique soit freiné, contenue » a prévenu Édouard Philippe.

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