La commission d’enquête du Sénat sur les pollutions industrielles et minières des sols a rendu son rapport. Les sénateurs demandent une loi sur la pollution des sols et la création d’un fonds de 75 millions d’euros pour la dépollution des sites, alors que certaines communes ne peuvent faire face.
Pollution : un rapport du Sénat préconise une loi sur la protection des sols
La commission d’enquête du Sénat sur les pollutions industrielles et minières des sols a rendu son rapport. Les sénateurs demandent une loi sur la pollution des sols et la création d’un fonds de 75 millions d’euros pour la dépollution des sites, alors que certaines communes ne peuvent faire face.
Tout part d’une vallée. Celle de l'Orbiel, dans l’Aude. Pendant des années, on y a exploité le sol. Une mine d'or, à Salsigne, à 15 kilomètres de Carcassonne (voir photo ci-dessus). En 2004, la mine ferme. Mais les ennuis vont commencer. Le sol est fortement pollué à l’arsenic. Si le métal est présent naturellement dans le sol, l’exploitation est directement à l’origine des forts taux constatés.
« Des enfants contaminés à l’arsenic »
En 2018, des inondations marquent le territoire. Les eaux envahissent les jardins, des terrains de foot ou de rugby. « Ces inondations ont fait apparaître la pollution liée au passé minier dans cette vallée » raconte la sénatrice PS Gisèle Jourda. Sur place, faute d’étude épidémiologique menée par les pouvoirs publics – le préfet en a d’abord soutenu l’idée, avant que son successeur stoppe tout – des parents ont lancé eux-mêmes des tests. Résultats : « Des enfants contaminés à l’arsenic à de forts dosages. Et quand vous avez un nourrisson d’un ou deux mois, qui ne marche pas encore à quatre pattes, qui a des taux extrêmement importants d’arsenic dans ses urines, cela m’a alarmé » raconte la sénatrice de l’Aude. Ce métal lourd est néfaste pour l’environnement. Il est aussi cancérogène…
Ancienne mine d'or de Salsigne (capture d'écran Google Map)
« Aujourd’hui, vous avez des riverains qui ne peuvent plus utiliser leur jardin » souligne la sénatrice PS, et « quand on vous dit après « circulez, il n’y a rien à voir »… » La situation inspire à Gisèle Jourda la création d’une commission d’enquête du Sénat sur les pollutions industrielles et minières des sols, qui vient de présenter ses conclusions, ce jeudi. Un rapport que les sénateurs comptent bien transmettre à la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, et au ministre de la Santé, Olivier Véran.
La situation dans la vallée de l’Orbiel « cumule tristement la plupart des problèmes associés à une pollution historique » dit le rapport : « L’impuissance de l’Etat à faire assumer pleinement par les anciens exploitants leurs responsabilités en matière de mise en sécurité et de dépollution dans le domaine minier, le manque de transparence dans l’information sur les sources effectives de pollution et les risques associés, et une communication erratique des pouvoirs publics sur la gestion des enjeux sanitaires et écologiques ». Du cas de l’Aude, la sénatrice PS découvre que le sujet est d’ampleur nationale. Pourtant, il n’existe pas de vision globale sur le sujet, ni de cadre législatif.
« Le moment est venu de mettre à plat tout ça »
Pour l’élue socialiste, « le moment est venu de mettre à plat tout ça ». La rapporteure de la commission d’enquête préconise ainsi « une cartographie des sites pollués précise », qui n’existe pas aujourd’hui, et, surtout, une loi sur la pollution des sols.
« Il existe une loi sur la pollution de l’air, de l’eau, mais à ce jour, pratiquement rien n’est imposé en matière de pollution des sols. Tout l’objet, c’est d’avancer du point de vue législatif, c’est de créer un droit opposable en matière de qualité des sols, ce qui n’existe pas aujourd’hui » explique Laurent Lafon, président UDI (groupe Union centriste) de la commission d’enquête (voir vidéo ci-dessous). Le sénateur du Val-de-Marne ajoute :
Il y a un vrai trou dans la raquette. Il y a une absence de raquette, même, car il n’y a quasiment rien qui existe.
Le sénateur UDI Laurent Lafon veut « créer un droit opposable en matière de qualité des sols »
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Le sénateur appelle aussi à une meilleure information du public, autre point faible actuel, par la création d’un « véritable droit à l’information » sur la pollution des sites et des sols. « Dans l’Aude, nous avons été frappés par la façon dont les élus et la population ont été laissés dans une situation de méconnaissance et de crainte » note le sénateur UDI.
L’idée serait d’avoir la connaissance de pollutions passées, en cas d’installation de particuliers sur une commune par exemple. Une connaissance parfois perdue par les élus eux-mêmes et les collectivités. Laurent Lafon en sait quelque chose. Ancien maire de Vincennes, dans le Val-de-Marne, il n’avait pas eu connaissance du passé industriel du terrain où existe un collège. Une perte de mémoire collective, de la mémoire industrielle, qui coûte cher sur le plan sanitaire… et budgétaire.
La suite, c’est le sénateur PCF du département, Pascal Savoldelli, membre de la commission d’enquête, qui la raconte : « Le cas d’école du collège Saint-Exupéry est exemplaire. En 2017, le département veut rénover ce collège. Après un diagnostic, des solvants extrêmement dangereux sont découverts dans l’air des bâtiments. Une école primaire et une maternelle se trouvent aussi à côté. On se retrouve à fermer le collège. On en construit un provisoire, pour un coût de 12 millions d’euros. Entre la dépollution et la reconstruction, le coût final est de 61 millions d’euros. Soit trois fois le prix d’un collège ! »
« Création d’un fonds pour la dépollution des sites de 75 millions d’euros par an »
L’autre mesure phare de ce rapport, qui compte 319 pages et 50 propositions, c’est « la création d’un fonds pour la dépollution des sites, de 75 millions d’euros par an, pour les 15 à 20 ans à venir, pour pouvoir sortir du problème » avance Gisèle Jourda. Regardez :
La sénatrice PS Gisèle Jourda demande la « création d’un fonds pour la dépollution des sites de 75 millions d’euros par an »
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Pour ne rien arranger à la situation, les services des Dreal (Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement), chargés des contrôles, manquent de moyens. « On a tellement dégraissé ces dernières années dans les services publics, qu’on a de plus en plus de missions de contrôle à leur confier, mais il y a de moins en moins de moyens en personnel » dénonce Gisèle Jourda.
La question de la responsabilité est évidemment un sujet… compliqué. « La recherche des responsabilités, c’est la nébuleuse. Ce n’est pas moi, c’est lui, c’est l’autre » lance Laurent Lafon. Pour tenter d’y remédier, les sénateurs proposent d’inscrire dans la loi la possibilité pour l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie) de mettre en œuvre des dispositifs d’indemnisation des préjudices environnementaux causés aux tiers, liés à la pollution des sols. Les obligations assurantielles des exploitants de sites industriels ou miniers pourraient aussi inclure la réparation des dommages environnementaux dus à des pollutions.
Pour les sénateurs, ces sites pollués ne sont pas voués à rester des « no go zone ». A leurs yeux, il convient d’utiliser ces friches dans une démarche d’aménagement du territoire, notamment via des incitations fiscales à la réhabilitation des sites.
« L’air de rien, on est sur un projet de société »
Au-delà du constat et des préconisations, pour Pascal Savoldelli, « ce rapport touche à la conception qu’on a de la croissance. Dans l’histoire du pays, il y a eu une croissance avec beaucoup d’enfouissements. Mais malheureusement, il y a beaucoup de cas où ce n’était même pas répertorié » souligne le sénateur PCF. Il ajoute : « Le sol a toujours été vu comme un bien économique de droit privé. C’est le droit de propriété. Par la loi, on pourrait apporter le cadre d’un intérêt général commun. Mais pour vous rassurer, le sol ne va pas être collectivisé… » plaisante le communiste, « mais l’air de rien, on est sur un projet de société ».
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