Illégalité contre légitimité : 500 euros d'amende ont été requis vendredi soir à Bordeaux contre huit militants écologistes qui avaient décroché des portraits d'Emmanuel Macron dans des mairies en réponse à "l'inaction" du gouvernement face à la crise climatique.
Le tribunal correctionnel rendra son jugement le 20 décembre.
Dans une salle acquise à leur cause, 8 prévenus, 4 hommes et 4 femmes, âgés de 21 ans à 62 ans d'horizons divers- médecin, étudiants, retraité, menuisier enseignant - étaient poursuivis pour "vol en réunion" ou complicité de ce délit punissable de 5 ans de prison et 75.000 euros d'amende.
Quatre d'entre eux étaient aussi jugés pour avoir refusé un prélèvement ADN lors de leur garde à vue.
La justice leur reproche d'avoir participé le 28 mai à une opération de décrochage de portraits présidentiels dans 4 mairies du bassin d'Arcachon (Audenge, Le Teich, Gujan-Mestras, Biganos).
Cette action s'inscrivait dans la campagne nationale de "désobéissance non-violente" lancée en février par le collectif écologiste Action non-violente ANV-Cop21, avec un bilan de 134 portraits officiels "réquisitionnés" en France.
"Notre action est comme un coup de klaxon (...) on a décidé d'interpeller le gouvernement par les moyens que nous avons de simples citoyens", a défendu Laurent Freyss, menuisier de 49 ans, devant un tribunal manifestement détendu et parfois plaisantin.
Mais derrière ce vol "noble et altruiste", il y a bien une infraction "caractérisée", a estimé la procureure Amélie Pison, en soulignant d'une part l'existence de l'élément intentionnel - l'appropriation - et en écartant d'autre part l'état de nécessité, une cause d'exonération pénale en cas de danger imminent.
Elle a par ailleurs requis 150 euros d'amende pour les refus de prélèvements ADN.
Face à un préjudice de "8 euros par tableau" - le prix de la reproduction - la défense a dénoncé "une débauche de moyens d'investigations" et un "mauvais signe pour l'état de droit".
Ophelie Berrier, l'avocate des prévenus avec Nathalie Noël, a appelé le tribunal à rendre une décision "courageuse" en "effaçant l'illégalité d'une action au profit de sa légitimité".
A l'extérieur du tribunal, les soutiens des militants avaient déployé dans la journée des banderoles pour annoncer un "procès de l'inaction climatique de l'Etat".
Les actions "symboliques" de décrochage, selon le collectif, ont jusqu'ici donné lieu depuis juin à des jugements disparates : d'un côté, amendes fermes ou avec sursis à Paris et dans l'Ain, de l'autre relaxes pour défaut "d'élément intentionnel" à Strasbourg et "état de nécessité" et action "légitime" à Lyon.
Selon le collectif, dix procès de militants sont prévus dans les prochaines semaines et en 2020.