Pour 2025, Jordan Bardella souhaite une nouvelle dissolution
Le président du RN appelle à un retour aux urnes, dès que possible, pour sortir de l’instabilité. Le parti s’y « prépare » activement. Il a déjà commencé à investir des candidats. Quant au vote de la censure, ce « n’est pas une fin », assure Jordan Bardella. Mais les responsables RN ne l’excluent pas si le compte n’y est pas sur le budget…
Fin 2024, le RN avait appuyé sur le bouton de la censure. Depuis, le parti d’extrême droite ne semble plus au cœur des enjeux. La nomination à Matignon de François Bayrou est passée par là. Plutôt que rester sous l’épée de Damoclès du Rassemblement national, le premier ministre a préféré dealer un accord de non-censure avec le Parti socialiste.
Pour ses vœux à la presse, le président du RN, Jordan Bardella, a tenté de dresser quelques perspectives pour son parti pour l’année qui vient, malgré l’incertitude politique du moment. Et très vite, la question de la censure, alors que le budget 2025 passe en commission mixte paritaire jeudi, va se reposer.
« La politique de François Bayrou n’est pas celle du changement, elle est celle d’Emmanuel Macron »
Le leader du RN ne cache pas donner quelques bons points, après les premiers pas du gouvernement François Bayrou. « Si la déclaration de politique générale était bien pauvre sur le fond, au moins a-t-il évoqué l’institution de la banque de la démocratie et l’instauration de la proportionnelle », salue Jordan Bardella, sous les yeux de Marine Le Pen, assise au premier rang. Mais pour Jordan Bardella, « la politique de François Bayrou n’est pas celle du changement, elle est celle d’Emmanuel Macron ». Outre le souhait maintenu « d’un grand référendum sur l’immigration », « à quelques jours de la discussion budgétaire, le RN va continuer à faire valoir ses propositions ».
Il rappelle ses demandes sur la baisse de la contribution française au budget de l’Union européenne, la lutte contre la « suréglementation » et les agences de l’Etat, ou « le coût de la décentralisation, à laquelle personne n’ose s’attaquer ». Sur la question des retraites, s’il maintient son refus de la désindexation des pensions, le RN est « prêt » à « discuter de l’abattement » fiscal de 10 % dont bénéficient les retraités. Il demande aussi « à supprimer l’aide médicale d’Etat ». Il tacle au passage l’accord avec le PS, sans le citer :
Derrière la façade du consensus mou et le compromis qui ne satisfait personne, François Bayrou incarne une inertie préoccupante.
Jordan Bardella, président du RN.
Interrogé sur la possibilité de censurer le gouvernement, à nouveau, sur le budget, il semble au premier abord en écarter l’idée. « La censure, pour nous, ce n’est pas un jouet. Et pour nous, la censure n’est pas une fin », lance-t-il, préférant retourner « la question à Bruno Retailleau et aux députés LR », pour savoir s’ils « souhaitent rester dans un gouvernement qui donne des gages à la gauche et à des gens élus avec le soutien du Nouveau front populaire ». Au passage, s’il pense le ministre de l’Intérieur « sincère » sur son discours de fermeté sur l’immigration, il ajoute que « les effets de communication qui ont vocation à endormir l’électorat du RN, de la part de Bruno Retailleau, ne duperont personne ».
Censure : « Les mêmes causes entraîneront les mêmes conséquences et les mêmes effets… »
S’il écarte pour l’heure la censure – le retour de bâton, notamment des agriculteurs, c’est aussi fait sentir au RN – reste que la question divise en interne et n’est, en réalité, pas exclue. « Une des lignes rouges, c’est que le déficit soit tenu à 5 %. C’est légitime de censurer sur le déficit », soutient l’un des responsables du parti, en marge de la conférence de presse, alors que le gouvernement s’est fixé un objet de 5,4 % de déficit, et qu’il ne compte pas aller au-delà… Le même élu remarque que dans sa circonscription, « c’est dur de défendre la non-censure ». Ce responsable se dit à peu près certain « que le PS ne votera pas la censure, à cause des municipales ».
Si le parti se décidait, ce serait une censure à peu de frais pour le RN, si les socialistes ne la votaient pas. Car dans ces conditions, il serait en effet facile pour le parti de censurer, car leur vote n’aurait pas de conséquence, faute de majorité pour adopter la censure et faire tomber le gouvernement. A charge d’ici là, à « Marine et Jordan », de voir « si les conditions sont réunies » pour voter la censure. Mais dans l’entourage du patron du RN même, on agite aussi la menace : « Les mêmes causes entraîneront les mêmes conséquences et les mêmes effets… » Autrement dit, pas sûr que tout cela « tienne très longtemps ».
« Il me paraît inévitable de convoquer des législatives quand elles seront constitutionnellement possibles », lance Jordan Bardella
Censure ou pas, l’instabilité est de mise, tant que l’assemblée gardera ses équilibres actuels. C’est pourquoi le RN appelle de ses vœux une nouvelle dissolution d’Emmanuel Macron, possible un an après la dernière. « Il me paraît inévitable de convoquer des législatives quand elles seront constitutionnellement possibles. Seul le retour au peuple permettra de donner une majorité stable au pays », demande le président du parti d’extrême droite, espérant « que le peuple achève ce qu’il a commencé l’été dernier ». Le RN peut faire ce calcul : voyant le NFP exploser en vol, il pourrait miser sur la division de la gauche – LFI d’un côté, reste de la gauche de l’autre – pour avoir davantage de candidats au second tour. Il pourrait aussi compter sur un front républicain plus incertain, et ainsi remporter plus de députés.
Jordan Bardella propose aux eurodéputés de droite du PPE de « mutualiser » leurs forces contre le Green deal
Le RN à Bruxelles est-il le même qu’à Paris ? Jordan Bardella, réélu député européen en juin, et qui préside le groupe Patriotes pour l’Europe, a tenu à souligner la signature, « il y a quelques jours, d’une résolution commune » sur le Venezuela avec notamment « le PPE (parti populaire européen, soit la droite conservatrice où siègent les LR) » et « ECR », l’un des groupes d’extrême droite ou siège le parti de Giorgia Meloni. Le leader du RN n’entend pas s’arrêter là. Il compte « écrire » notamment au PPE « pour mutualiser nos forces pour proposer ensemble la suspension du Green deal » et « revoir le calendrier d’interdiction de la vente des véhicules thermiques en 2035, et la révision des objectifs « de la ferme à la fourchette » », en agriculture. Et d’ajouter : « J’appelle mes collègues du PPE à avoir un peu de courage ». Si le RN est prêt à travailler avec le PPE, et donc avec les eurodéputés LR, il critique pourtant les LR pour leur participation au gouvernement Bayrou. A moins que cette main tendue en préfigure d’autres, un jour, en France ?
Le RN ne partira pas de zéro, en cas de nouvelle dissolution. « Nous nous préparons depuis l’été dernier à de potentielles législatives anticipées a minima », explique le président du RN. Concrètement, « la commission nationale d’investiture se réunit chaque semaine, chaque jour, ces derniers jours. Nous pré-investissons des candidats aux législatives, mais aussi aux municipales », l’autre objectif du RN. Jordan Bardella donne déjà rendez-vous pour « une grande convention sur les municipales, qui lancera officiellement la campagne, en septembre 2025 ».
Le RN prépare les municipales et vise les grandes villes comme « Marseille » ou « Toulon »
Le Rassemblement national entend présenter « des listes sur l’ensemble du territoire ». Pour Jordan Bardella, « l’implantation du RN au niveau local » est même « une priorité ». Et pour cause : elle est franchement mauvaise. Ce qui se retrouve aux sénatoriales. Le parti a tout juste réussi à faire élire trois sénateurs lors des dernières sénatoriales, en septembre 2023. Pour changer la donne, le RN mise notamment sur « la conquête des grandes villes », avec « des listes dans toutes les grandes villes de France ».
Parmi les grandes villes que vise le parti frontiste, il y a notamment « pourquoi pas » Marseille, avec le député Franck Allisio a priori. « Toulon », avec selon toute vraisemblance Laure Lavalette, députée de la ville et porte-parole du RN. A Paris, c’est l’eurodéputé Thierry Mariani qui devrait défendre les couleurs du RN.
C’est aussi la présence, justement, de nombreux députés qui favorise aujourd’hui cette recherche d’implantation. Ce facteur a ainsi joué favorablement, lors des sénatoriales dans le Nord ou le Pas-de-Calais. « Avoir un député, c’est le début de l’implantation », résume un responsable.
Investitures en cas de législatives : « On fait tout pour que le filet ne laisse rien passer et n’avoir que les bons poissons »
Encore faut-il avoir des candidats présentables, c’est-à-dire, au RN, qui n’ont pas tenus des propos racistes ou xénophobes dans un passé plus ou moins récent, comme on l’a vu lors des législatives de juin dernier. Officiellement, le parti fait tout pour l’éviter. « On passe trois jours par semaine à faire des investitures. On s’y prépare très activement. On voit des dizaines de candidats », explique un haut cadre du RN, « on regarde tous les réseaux sociaux. On fait tout pour que le filet ne laisse rien passer et n’avoir que les bons poissons. Après, il peut y avoir de l’entrisme », tente sérieusement de justifier, par avance, ce responsable… D’ici là, le RN a une autre étape, cruciale, en tête : Marine Le Pen sera fixée sur son sort, dans l’affaire des assistants parlementaires européens du Rassemblement national, le 31 mars prochain. Selon la décision des juges, elle jouera son avenir politique.
Après les annonces de François Bayrou, la gauche sénatoriale dénonce un budget « profondément inégalitaire », qui fait payer à tous les « largesses fiscales » du gouvernement à l’égard des grandes fortunes ces dernières années. Alors que le spectre de la censure plane sur le gouvernement Bayrou, les socialistes semblent miser sur la contribution de solidarité mais préviennent : si le dispositif n’est pas à la hauteur, « ça ne sera pas possible. »
Après le plan d’économies de près de 44 milliards d’euros annoncé par le premier ministre, le socle commun est à peu près satisfait au Sénat, d’autant que les propositions de la Haute assemblée ont été en partie reprises. Mais sur la question des collectivités, ça grince chez les LR.
C’est une signature « historique ». Un an après les violences insurrectionnelles en Nouvelle-Calédonie qui ont fait 14 morts, un accord a été trouvé entre les indépendantistes et les non-indépendantistes. Principale mesure : la création d’un Etat calédonien dans la Constitution française assortie d’une nationalité calédonienne. Le sénateur non-indépendantiste de Nouvelle-Calédonie, Georges Naturel pointe un texte qui va « améliorer la qualité de vie des citoyens ».
C'était un moment attendu. Le Premier ministre a présenté à partir de 16 heures ses grandes orientations budgétaires. Pour tenir la trajectoire de réduction de déficit, le gouvernement prévoit finalement 43,8 milliards d’euros d’effort budgétaire. Pour ce faire, le premier ministre propose notamment une année blanche, la suppression de 2 jours fériés. Retrouvez ici l'ensemble des annonces de François Bayrou.