Olivier Faure : un style collectif « qui prend le risque de la modestie »
Pour le sémiologue Denis Bertrand, le nouveau Premier Secrétaire du PS se démarque de ses prédécesseurs par « un style qui prend le risque de la modestie ». Un risque qui pourrait lui porter préjudice, car il prend également le risque d’avoir du mal à se faire entendre et comme l’analyse Denis Bertrand « un leader modeste, c’est un paradoxe ».
« Avec un ton de voix descendant alors que ses formules devraient lever l’enthousiasme de la foule », pour le sémiologue, c’est comme si Olivier Faure « restait à l’extérieur de l’enthousiasme qu’il cherche à susciter ».
Une attitude de retrait que note également le communicant Philippe Lentschener qui donne une raison à cela :
Olivier Faure à la volonté « d’être un homme de synthèse, de faire travailler les gens ensemble et de faire émerger une voix collective ».
L’historien Alain Bergounioux voit, quant à lui, dans cette retenue le fait qu’ « on ne pas passer brusquement d’une période de déroute électorale à une période du rêve ». Ainsi, contrairement au Congrès d’Épinay de 1971, il ne s’agit pas ici d’un « simple problème stratégique, là, il s’agit de tout reconstruire, non seulement un projet, de penser une organisation ».
Il ajoute, « Olivier Faure a tout à fait conscience de ces défis et il a raison de les aborder de manière humble » sinon il ne serait pas pris au sérieux par les Français.
Olivier Faure ferait donc le choix de la modestie, entre prise de conscience et volonté d’effectuer une renaissance collective du parti… Deuxième étape, se redéfinir autour d’une identité socialiste…
« Re » comme Renaissance et retour aux origines
De plateau de télévision en studio de radio jusqu’à la tribune du Congrès d’Aubervilliers, Olivier Faure l’a répété : il prône la « renaissance » de son parti.
Réinventer le PS tout en le réformant en son sein, tel semble être le projet du nouveau Premier Secrétaire.
Pour le linguiste Dominique Maingueneau, « il ne faut pas se focaliser sur le mot « renaissance » mais sur le préfixe re » car « linguistiquement, le re c’est la modification, c’est-à-dire annuler les conséquences négatives d’un processus et revenir avec une modification ». Et il ajoute : « C’est comme quand vous reclassez des fiches, ce n’est pas le même classement ».
Un préfixe qui en dit long sur l’état du Parti Socialiste, dont la nécessité est de se renouveler tout en se raccrochant aux réussites passées.
C’est là tout l’enjeu pour le linguiste qui explique :
« De ce préfixe re résulte tout le problème du PS qui revient sur quelque chose d’antérieur avec la nécessité en même temps de le modifier »
Cette répétition du mot démontre qu’Olivier Faure « n’a aucune solution » pour le moment car « il ne dit pas comment il faut changer ».
Pour l’historien Alain Bergounioux, la renaissance après défaite est familière au parti car « c’est ce qui s’est passé dans tous les moments de crise grave du Parti Socialiste et tous les leaders ont utilisé le même procédé ».
Il poursuit avec l’exemple de deux figures incontournables du parti : d’une part « Léon Blum qui en 1945, au premier congrès du Parti Socialiste avait dit : il faut que nous montrions que nous changeons tout et que nous sommes les mêmes », d’autre part « François Mitterrand qui disait : il n’y a pas d’imagination sans mémoire ».
Avec Olivier Faure, « c’est la même chose, il faut imaginer du nouveau tout en restant fidèle à ce qu’on est ».
Reste à voir si la modestie et la collégialité du nouveau leader sauront redresser le Parti Socialiste dans la perspective des élections européennes…
Retrouvez l’intégralité de l’émission Déshabillons-Les, PS : la voie étroite, samedi 14 avril à 15h sur Public Sénat.