Pour cet élu local : certains Français ont le sentiment de ne plus être en démocratie
Violent et dangereux pour les uns, “mouvement populaire et démocratique” pour les autres. En quelques semaines les gilets jaunes ont bouleversé le jeu politique traditionnel...et remis en cause notre système de représentativité. Quelles pistes pour un nouveau modèle ? Rencontre avec monsieur démocratie du conseil régional du Centre-Val-de-Loire, Charles Fournier.

Pour cet élu local : certains Français ont le sentiment de ne plus être en démocratie

Violent et dangereux pour les uns, “mouvement populaire et démocratique” pour les autres. En quelques semaines les gilets jaunes ont bouleversé le jeu politique traditionnel...et remis en cause notre système de représentativité. Quelles pistes pour un nouveau modèle ? Rencontre avec monsieur démocratie du conseil régional du Centre-Val-de-Loire, Charles Fournier.
Public Sénat

Par Julie Hulin et Juliette Beck

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Élu, syndicats, associations, représentent-ils encore correctement le pays ? Sont-ils des relais fidèles de la diversité des opinions et des situations ? Charles Fournier, Vice-président Région Centre Val de Loire et Vice-président délégué à la démocratie, et aux initiatives citoyennes, réagit à cette crise que traverse notre pays.

Vous êtes élu à la démocratie, en région Centre... Le mouvement des "gilets jaunes" a été une surprise pour vous ?
« Non finalement, il venait confirmer l’intuition qu’on avait eu dans cette région, l’état de défiance entre les citoyens et leurs représentants prenaient une ampleur extrêmement importante et qu’il fallait travailler à la transformation de la démocratie. Donc je n’ai pas été très surpris. La forme est surprenante, les manières de faire porter de nouvelles pratiques, mais l’irruption du m
ouvement pour moi est assez logique finalement vu l’état global de notre société et de notre démocratie ».

On l’a vu le "ras-le-bol" n’est pas éteint. On aurait tort de penser que ce mouvement est derrière nous ?« Oui, ma perception, c’est qu’il n’est pas derrière nous, c'est qu’il y va se prolonger, qu’il va inventer de nouvelles formes. Quand on aura du recul sur tout cela, on constatera que finalement, c’était aussi un laboratoire de la démocratie. Moi par exemple quand j’ai reçu des "gilets jaunes", ils m’expliquaient qu’ils étaient des messagers, ils ne voulaient pas être des représentants, ils se voulaient porteurs de message. Et je trouve que c’est assez intéressant, il faut en faire quelque chose. Je crois qu’on aura toujours besoin de représentant, mais que dans le moment, la défiance, les a conduits à dire, on veut quelqu’un qui porte un message, notre message ».

"Les réseaux sociaux ça serait le lieu du débat public, ça ce n’est pas vrai, c’est le lieu de l’affrontement, c’est le lieu du débat partiel mais ce n’est pas le lieu du débat organisé qui permet de faire vivre la démocratie"

 

Charles Fournier ce dit « favorable à l'expression, à la libre expression ».
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Pour se faire entendre et s’organiser les "gilets jaunes" se sont organisés grâce aux réseaux sociaux. Cette parole libérée c’est une bonne nouvelle pour la démocratie ?
« Je crois qu’un moment ou la liberté d’expression est interrogé et on le sent, les réseaux sociaux sont utiles et oui je suis favorable à l’expression, à la liberté d’expression. Maintenant c’est la confusion entre expression et débat public qui pose problème. C’est-à-dire laisser entendre que les réseaux sociaux ça serait le lieu du débat public, ça ce n’est pas vrai, c’est le lieu de l’affrontement, c’est le lieu du débat partiel mais ce n’est pas le lieu du débat organisé qui permet de faire vivre la démocratie. Donc l’expression est une composante de la vie démocratie, on a besoin de cette expression mais on voit bien que les réseaux sociaux peuvent être aussi l’objet de toutes les manipulations et d’une parole peu organisée, d’une parole fuyante, d’une parole qu’on peut effacer d’ailleurs quand on a dit une connerie et tout ça évidemment ce n’est pas ça la démocratie, c’est une contribution possible mais il faut l’organiser, il faut l’interroger dans une vision plus globale de comment penser le débat public ».

Vous défendez l’idée d’une démocratie permanente qui doit s'appuyer sur tous :  associations, entreprises, collectivités ?
« Permanente, parce que je crois qu’elle doit vivre tout le temps et partout. Permanente dans l’espace et permanente dans le temps. On est dans un moment ou finalement, on peut avoir le sentiment que tout se décide sous forme d’oligarchie qui écarte la majeure partie de nos citoyens, mais aussi les territoires. Il y a des territoires qui sont hors de la vie démocratique, des quartiers, des communes rurales, des territoires, des pans entiers qui se pensent oubliés. Vrai ou pas, c’est en attendant ce qui s’exprime et on ne peut pas faire comme si cela n’existait pas.

« Parce que c’est ça, les gens aujourd’hui quand on les interroge, ils peuvent dire qu’on n’est pas en démocratie ».

Du coup permanente, se veut dire qu’elle doit réinvestir tous les lieux, elle doit réinvestir les petites communes, des places publiques, c’est ça permanent. Et puis permanent, c’est tout ce temps entre deux élections, c'est ce qui fait vivre ce sentiment collectif qu’on est en démocratie. Parce que c’est ça, les gens aujourd’hui quand on les interroge, ils peuvent dire qu’on n’est pas en démocratie, alors on n’est pas dans une dictature pour autant en France, mais pour autant il y a ce sentiment que ça se dégrade, que la parole n’est plus écoutée, qu’il n’y a plus de reconnaissance donc je crois qu’il faut redonner cette envie collective de se sentir finalement dans un même collectif, dans un même destin ».

Le référendum d’initiative citoyenne une bonne idée ?
« Ce qui me plaît dans le RIC c’est l’initiative citoyenne c’est un peu moins le référendum. L’initiative citoyenne, je l’appelle de tous mes vœux sous toutes ses formes, l’appel à la délibération citoyenne qui permet de construire du point de vue. Le référendum attention, en ce moment, je crois que s’il y avait un référendum, je crains que ce soit le cri du cœur qui s’impose dans les urnes, alors que c’est la construction collective qui doit s’imposer à un moment donné dans la décision et ça on voit bien ça prend du temps ».

 

« Le moment dans lequel on est peut être l'acte 1 pour réinventer une nouvelle république » estime Charles Fournier #MVCO
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Comment on peut faire évoluer la démocratie ?
« Moi, je crois que le moment dans lequel on est peut-être l’acte 1 d’une constituante pour réinventer une nouvelle république, une VIe République qui colle aux réalités dans lesquelles nous sommes avec plus d’horizontalité, plus de collégialité, moins d’hommes ou de femmes providentiels, plus de collectif. Je donnais l’exemple du juré citoyen, on a un juré des assises on pourrait avoir un juré pour la participation à la vie démocratique, quand il y a de grandes décisions à prendre dans notre pays, ça c’est un instrument qui pourrait tout à fait exister ».

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