Premier ministre sans parti, le choix risqué d’Edouard Philippe

Premier ministre sans parti, le choix risqué d’Edouard Philippe

Edouard Philippe prévoit de rester sans parti après sa probable exclusion des Républicains, un choix inédit pour un Premier...
Public Sénat

Par Marc PRÉEL

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Edouard Philippe prévoit de rester sans parti après sa probable exclusion des Républicains, un choix inédit pour un Premier ministre depuis près de 40 ans et qui n'est pas sans risque pour un chef de la majorité.

"J'aurai un engagement politique, et l'engagement politique à mon avis vaut largement l'étiquette partisane", s'est justifié le chef du gouvernement lundi sur Europe 1.

"Tout le monde sait où je suis, de ce point de vue-là, j'ai pris mes responsabilités, je l’ai fait dès avant les élections législatives" en prenant la tête du premier gouvernement d'Emmanuel Macron, a souligné l'ancien maire du Havre.

Mercredi s'achève l'ultimatum de huit jours fixé par LR à Edouard Philippe, aux ministres Gérard Darmanin et Sébastien Lecornu, et aux députés "Constructifs" Thierry Solère et Franck Riester pour "s'expliquer" afin d'éviter une probable exclusion.

Une procédure de sanction qui en ce qui concerne M. Philippe "lui en touche une sans faire bouger l'autre, comme disait Chirac", s'amuse un proche du Premier ministre.

Ce même mercredi, le locataire de Matignon reçoit en début de soirée à Matignon ses amis "constructifs", ces élus de droite qui ont choisi de soutenir l'aventure macroniste.

Officiellement, la question de l'avenir partisan du petit contingent (35 députés et 11 sénateurs constructifs ou apparentés) n'est pas à l'ordre du jour de la rencontre, prévue avant le coup de semonce de LR.

- le précédent Barre -

Mais la question agite les rangs de ce pôle hétéroclite, actuellement aux frontières de la majorité: faut-il créer un nouveau parti, en rassemblant des anciens LR, UDI ou radicaux? Ou rejoindre La République en marche du président Macron, en forte demande de cadres expérimentés, comme l'a déjà fait en juin le ministre de l'Economie Bruno Le Maire?

Quel qu'il soit, Edouard Philippe ne devrait pas suivre le mouvement.

Pour la première fois depuis Raymond Barre (1976-1981), le Premier ministre, chef de la majorité, n'appartiendrait ainsi à aucun parti. Même Dominique de Villepin, jamais élu, avait sa carte à l'UMP.

"La carte du parti du Premier ministre n'est pas une question importante pour les Français", minimise-t-on à Matignon. Premier ministre sans parti, "en pratique, c'est déjà le cas depuis cinq mois", note ce proche.

Premier ministre sans troupes d'une majorité très largement LREM et renforcée d'un bras MoDem, Edouard Philippe "n'est pas en fait aujourd'hui le patron d'une majorité parlementaire", juge le président du Sénat, le LR Gérard Larcher.

"Sa tâche n'est pas facile (...) c'est quelque part une nouvelle composition, en quelque sorte, des relations avec le Parlement", poursuit le même.

S'assumant "homme de droite" lors de son arrivée à Matignon, Edouard Philippe protège en restant sans étiquette l'identité politique qui lui avait valu d'être choisi par Emmanuel Macron pour occuper Matignon, soulignent des analystes.

S'il rejoignait le parti présidentiel, "il pourrait craindre d'être dilué et surtout prisonnier d'un parti qui reste, à défaut d'une culture commune qui reste à construire, entièrement dédié à Emmanuel Macron", observe la politologue Chloé Morin (Fondation Jean-Jaurès).

Quant à l'adhésion à un nouveau parti de centre-droit, elle pourrait être lue comme une démarcation malvenue avec le chef de l'Etat, quand les relations président-Premier ministre sont surveillées comme le lait sur le feu, souligne la même.

Pour d'autres, le Premier ministre sera forcément rattrapé par la question de son appartenance partisane.

"Edouard Philippe est devant un choix politique majeur. Mais je ne crois pas qu'il puisse rester en dehors (de LREM)", estime un poids lourd de la majorité. "Rester en dehors de tout parti politique, c'est Raymond Barre et c'est compliqué", poursuit le même.

A une différence près: Raymond Barre, professeur d'économie venue de ce qu'on appellera plus tard "la société civile", avait souffert de son inexpérience de la chose politicienne. Ex-député-maire d'une grande ville et lieutenant d'un chef de parti, Edouard Philippe a déjà roulé sa bosse dans les arcanes du pouvoir.

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