Présidentielle : à droite, Bruno Retailleau et Michel Barnier bâtissent leurs « socles »

Présidentielle : à droite, Bruno Retailleau et Michel Barnier bâtissent leurs « socles »

Pour le moment, Xavier Bertrand fait figure de favori dans les sondages, mais le patron des sénateurs LR et l’ancien négociateur du Brexit entendent bien « peser » en 2022. Et commencent tous deux à formuler leurs propositions.
Public Sénat

Par Pierre Maurer

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Il reste 14 mois avant l’élection présidentielle. « Et presque autant de candidats à droite pour l’Elysée », pourraient railler leurs adversaires politiques. Xavier Bertrand, Valérie Pécresse, Michel Barnier, Bruno Retailleau, Laurent Wauquiez, Rachida Dati, David Lisnard… La liste de prétendants potentiels s’allonge au fil des semaines. Les candidatures champignonnent, mais certains avancent plus vite que d’autres leurs premiers pions en dévoilant des propositions en forme de programme présidentiel.

Des amorces de programmes

Proactif, le président des sénateurs LR Bruno Retailleau a envoyé ce lundi 8 mars un message à ses sympathisants à l’occasion du lancement de son opération « 50 idées pour la France ». En bref : le sénateur de la Vendée dévoilera tous les lundis jusqu’à la présidentielle « une proposition dans un domaine ». Tout cela « afin de contribuer à ce que les mois qui nous séparent de la désignation du candidat de la droite pour la présidentielle soit d’abord un débat d’idées et non une querelle d’egos et d’ambitions », écrit Bruno Retailleau. Fidèle à sa ligne politique, son idée numéro 1 aborde la thématique sécuritaire : « Créer des courtes peines de prison pour les mineurs hyperviolents et sanctionner les parents », propose-t-il en lettres majuscules. Sénatrice LR des Alpes-Maritimes, Dominique Estrosi Sassone s’en réjouit. « C’est une bonne initiative. Bruno Retailleau est une personnalité importante dans notre famille politique et c’est aussi normal que dans un débat d’idées, il puisse faire valoir les propositions qu’il souhaite voir porter par notre famille politique à l’occasion des prochaines échéances… », réagit-elle. Selon la sénatrice, avant de choisir un candidat, la droite doit débattre des « idées ».

« Un premier pas apprécié »

Ce qu’un autre candidat putatif a bien compris. Le même jour que Bruno Retailleau, Michel Barnier a choisi, lui, d’adresser un mail aux parlementaires et élus LR, comme l’a révélé LCI. Auréolé par la négociation du Brexit, Michel Barnier prépare son retour sur la scène politique française depuis plusieurs semaines, entre visites aux parlementaires et construction de son micro parti. Dans sa lettre, le septuagénaire explique son initiative – un manifeste - baptisée « Patriotes et Européens ». « C’est ce travail méthodique, objectif et ouvert que je suis prêt à mener avec toutes celles et tous ceux d’entre vous qui le souhaiteront. Ce travail sera mis à la disposition de toute notre famille politique d’ici l’été, en temps utile pour le grand débat présidentiel », détaille l’ancien négociateur du Brexit.

« Je suis ravi par cette lettre qui montre que Michel Barnier est là et qu’il a l’intention de s’engager aux côtés des Républicains. Il aborde d’autant plus un thème absolument essentiel : l’Europe, qui questionne parfois et sur laquelle il faut plancher », s’enthousiasme Martine Berthet, sénatrice LR de la Savoie et proche de Michel Barnier. Elle poursuit : « Je ne sais pas si c’est un début de programme. Mais il a annoncé sa contribution pour la prochaine présidentielle et je trouve cela très bien qu’il mette au service des Républicains les connaissances qu’il a acquises, plus particulièrement dans le cadre du Brexit. » Et, elle finit par reconnaître, sourire aux lèvres que « c’est un premier pas apprécié ». Michel Barnier organisera sa première réunion le 30 mars à l’Assemblée nationale et reviendra probablement à la même période devant les sénateurs LR. « Michel Barnier, c’est un talent supplémentaire. Nous avons la chance aujourd’hui d’avoir une multiplication de candidatures. Mais nous ne sommes pas en mesure de voir qui sera notre leader. Michel Barnier a une expérience sur la scène européenne et ça ne peut que renforcer notre famille politique », assure Dominique Estrosi Sassone.

Autant de candidats que de lignes

Ce bourgeonnement de candidatures devra bien finir par être départagé. Pour le moment, le parti attend qu’un candidat « naturel » s’impose à tous dans les sondages. Dans le cas contraire, un système de « départage » sera organisé conformément à la volonté du président du Sénat Gérard Larcher. Depuis 2016 et la guerre fratricide entre Sarkozy et Fillon, l’idée d’organiser des primaires reste un traumatisme à droite. Mais le recours à un leader naturel devient de plus en plus ténu. Exit Nicolas Sarkozy, condamné et potentiel futur allié d’Emmanuel Macron, abandonné le « moment » François Baroin, qui a décliné au grand dam de Christian Jacob, le président du parti. Dans les rangs LR, des fractures, elles, apparaissent : entre tenant d’une ligne sociale et ceux d’une ligne libérale, entre jeunes générations et vieille garde… « Je ne pense pas qu’il y ait des fractures, il y a des personnalités, des leaders politiques qui incarnent des valeurs qui rassemblent parce qu’elles ont les possibilités d’ouvrir un large spectre de ce que peut porter la famille des Républicains et c’est plutôt une chance, une force pour notre famille. J’ai l’intime conviction que le moment venu, il y aura une intelligence collective. Il faut que nous jouions collectif et que nous formions une équipe », martèle Dominique Estrosi Sassone.

« Il y a des idées qui émergent mais il faut rassembler cela. Que ce soit Bruno Retailleau ou Michel Barnier, c’est un travail indispensable qui va servir de socle pour la prochaine campagne. Ils sont sans doute complémentaires. Même s’ils abordent les sujets de façon différente », souligne Martine Berthet.

« Deal » et ballon d’essai

De loin, Xavier Iacovelli observe la course de petits chevaux d’un œil amusé. « Retailleau n’a rien à voir avec un Michel Barnier ! La droite est tiraillée entre une tendance libérale et une tendance plus proche des idées de Marine Le Pen. Cette multiplication de candidats putatifs prouve qu’il n’y a aucun leader à droite ! », cingle le sénateur RDPI-LREM.

« On a tous les jours des candidats qui émergent. C’est révélateur de l’impatience collective », résume un membre de l’état-major LR. David Lisnard, Michel Barnier… Le même n’y voient que des candidatures de témoignage.

Quant à Bruno Retailleau, sa ligne politique conservatrice est à des kilomètres de celles des cadres du parti version Christian Jacob. « Idéologiquement, on est très éloignés », confirme un gradé de la rue de Vaugirard. Au siège, on pense que l’ancien lieutenant de François Fillon – malgré sa pugnacité - « dealera » avec « le mieux placé » à droite. Droit dans ses bottes, Bruno Retailleau poursuit sa campagne avec une application au nom sans appel : « 2022 ». Michel Barnier, quant à lui, teste sa popularité. « Il attend un retour de ce manifeste pour voir l’accueil et peut être l’attente qu’il suscite », confie un parlementaire LR proche de l’ancien sénateur. En bref, c’est un ballon d’essai.

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