Invité de la matinale de Public Sénat, Mathieu Darnaud, président du groupe Les Républicains au Sénat, a répété ce jeudi que son parti ne participerait pas à « un gouvernement dont le Premier ministre serait de gauche et porterait le programme du Nouveau Front populaire ». Le responsable pointe « l’irresponsabilité » des forces politiques qui ont voté la censure.
Présidentielle : Valérie Pécresse, à l’offensive, tente de relancer sa campagne à Meaux
Par Romain David
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« Bienvenue Valérie, tu es chez toi ici ! », lâche Jean-François Copé lorsque la candidate LR arrive sur la scène du Colisée, la salle des fêtes de Meaux. Effectivement, ce mercredi soir, la présidente de l’Île-de-France semblait en territoire conquis devant les quelque 2 000 militants qui avaient fait le déplacement pour la soutenir. De quoi faire oublier que cette commune aux mains de la droite depuis 2002 a placé Jean-Luc Mélenchon en tête du premier tour en 2017. Pour la candidate : un bref moment de replat au milieu d’une pente de plus en plus raide.
Car la journée avait fort mal démarré pour Valérie Pécresse. Dans la matinée, elle a été aspergée de poudre rose en marge de son allocution devant la Confédération des petites et moyennes entreprises. Un incident qui n’a rien d’inédit dans une campagne présidentielle – Éric Zemmour a été visé par un jet d’œuf à Moissac samedi – mais qui vient s’additionner aux difficultés des dernières semaines. Il y a les défections qui se poursuivent, dernière en date, après Éric Woerth, Renaud Muselier, Guillaume Peltier, Jean-Pierre Raffarin et Martine Vassal, celle du sénateur Sébastien Meurant, qui a apporté lundi son soutien à Éric Zemmour. Il y a aussi les sondages qui ne décollent pas et la cantonnent à la cinquième place, dans un mouchoir de poche avec Éric Zemmour et Jean-Luc Mélenchon. Et puis en parallèle, cette petite musique qui monte : celle d’un éventuel soutien de Nicolas Sarkozy, figure tutélaire de la droite, à Emmanuel Macron.
« On va finir par entendre que de Gaulle soutient Macron ! »
« Ne regardez pas les sondages mes amis, battez-vous ! Une salle comme ça, il n’y a pas beaucoup de candidats qui peuvent la réunir. », martèle Jean-François Parigi, le président du Conseil départemental de Seine-et-Marne. « Tu es ici chez toi en Seine-et-Marne, à Montereau et même à Melun ! », abonde-t-il. Manière de tacler le maire Louis Vogel, ex-LR, lui aussi parti dans la majorité présidentielle. « Si je le dis, c’est parce que tu as obtenu 49 % des parrainages d’élus en Seine-et-Marne », souligne Jean-François Parigi, qui a choisi de rire des défections en série. « Avec ces désistements ici et là, et les appels à voter pour le monsieur d’en haut, je me dis que l’on va finir par entendre que de Gaulle soutient Macron ! », raille-t-il.
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« On l’aime quand elle est comme ça ! »
Après une brève table ronde entre militants et élus locaux, la candidate a pris la parole, pour un discours en partie centrée sur la politique de la ville, une thématique chère à son hôte, Jean-François Copé. « Nous allons détruire en dix ans les ghettos de France, nous allons reconstruire des quartiers où il fait bon vivre, où nous allons mettre du beau, du bon et du bien ! », promet la candidate. « Je donnerais plus de pouvoirs aux maires, et surtout je vais leur redonner le pouvoir de redessiner leurs villes », promet-elle. Avant d’embrayer sur un thème phare de la droite : la sécurité. « Je serai toujours aux côtés des forces de l’ordre. Je veux des polices municipales obligatoires dans les villes de plus de 5 000 habitants, et je veux que, dans les zones urbaines, elles puissent être armées », explique-t-elle. Dans la salle, des applaudissements et des « bravos » éclatent. L’occasion, également, d’épingler le bilan d’Emmanuel Macron en la matière : « Je tiens à dire au ministre de la Justice, Monsieur Dupond-Moretti, que l’insécurité, en France, ce n’est pas seulement un sentiment. Il y a un constat d’impunité ».
Un débit plus fluide, peu de coups d’œil à ses notes. Sans doute parce que la salle est plus petite, le terrain politiquement favorable, Valérie Pécresse apparaît plus spontanée, plus détendue que lors de sa prestation ratée au Zénith, et qu’elle traîne comme un fardeau depuis des semaines. « On l’aime quand elle est comme ça ! », s’exclame un militant dans l’assistance. L’ampleur du dispositif déployé, malgré la taille du lieu, rappelle la force de frappe de LR : un chauffeur de salle, force drapeaux, une régie, deux écrans géants, et même un interprète en langue des signes. Au milieu du discours, un spectateur veut s’élancer sur la scène : « Je t’aime Valérie, y en a marre des assistés, tous au Kärcher ! » Le service d’ordre intervient pour sortir l’énergumène. « La culture et le spectacle vivant font partie de la tradition française. Je préférerais toujours un excès de liberté à un excès de censure », sourit la candidate.
Exister face à Emmanuel Macron
Il est plus difficile pour Valérie Pécresse, en revanche, de se différencier d’Emmanuel Macron lorsqu’elle évoque l’international. « On est dans un contexte particulier, la guerre est revenue sur le continent européen. C’est un moment douloureux, solennel, qui nous impose, dans le cadre de notre opposition, une vraie dignité », admet Valérie Pécresse. « J’ai appelé à des sanctions très fermes contre la Russie, car je pense qu’être gaulliste, c’est être dans le camp de la liberté. J’ai défendu les sanctions, et je soutiens le gouvernement qui les porte », assume-t-elle. « Ce qu’on entend c’est : Emmanuel Macron va gagner parce qu’il y a la crise ukrainienne. La France joue son rôle diplomatique, mais il n’en reste pas moins que Valérie fera ça aussi bien avec son sens des responsabilités », assure Jean-François Copé. « La situation internationale ne doit pas faire oublier tous les autres grands sujets sur lesquels il a été absent », ajoute-t-il. « Je ne peux pas imaginer une France dont les communes, les départements et les régions sont à droite, et qui ne vote pas pour une candidate du redressement de la France ! », estime la sénatrice de la Seine-et-Marne Anne Chain-Larché.
Chirac plutôt que Sarkozy
Son allocution terminée, Valérie Pécresse disparaît aussitôt. La candidate devait dédicacer son livre, Le Temps est venu. Mais ce moment d’échange avec les militants n’aura pas lieu : la séance a été annulée. Interrogés par Public Sénat, des membres de l’équipe indiquent qu’une « urgence personnelle » a obligé la présidente de l’Île-de-France à écourter sa soirée de campagne. Nous n’en saurons pas plus. Sur le parking, sa prestation fait oublier pour un moment les mauvais sondages. « Dans ma vie professionnelle, j’avais l’habitude de dire que le mois n’était pas joué tant qu’il n’était pas fini. Chaque jour, il peut y avoir une surprise », veut croire Annette, ancienne avocate fraîchement retraitée. « Un nouveau duel Macron-Le Pen, ce serait jouer avec le feu ! », avertit Manuel, chef d’entreprise. Quant au soutien éventuel de Nicolas Sarkozy à Emmanuel Macron, il n’ose y croire pour le moment : « Il prend du recul, je ne vois pas pourquoi on s’énerve avec ça », balaye-t-il. « Il y a, au sein du parti, des opportunistes qui voient le vent souffler à cause de la guerre en Ukraine et qui, sans vergogne, rejoignent Monsieur Macron », déplore Hassan. « Si Monsieur Sarkozy le soutient, c’est qu’il doit avoir de bonnes raisons, mais ce serait dommage pour sa famille politique. »
D’ailleurs, de Nicolas Sarkozy il ne fut pas vraiment question sur la scène du Colisée, ni dans la bouche de Valérie Pécresse, ni dans celle de ses soutiens. De Chirac, en revanche, plusieurs fois. « Il nous a appris que rien dans une élection n’est joué avant la dernière minute », a rappelé Valérie Pécresse, évoquant « un mentor ». Une filiation politique que l’ancienne conseillère technique du président aime cultiver, encore plus depuis son déplacement en Corrèze la semaine dernière. « Ses origines, ses mentors, que ce soit Jacques Chirac, mais aussi Nicolas Sarkozy, c’est grâce à eux qu’elle est devenue ce qu’elle est », estime toutefois la sénatrice Anne Chain-Larché. « Un ralliement de Nicolas Sarkozy à Emmanuel Macron serait incompréhensible », conclut-elle.