« Chacun s’y attendait, non ? » Interrogée mercredi sur LCI à propos des nombreuses défections enregistrées par le Rassemblement national ces dernières semaines, notamment celle de l’eurodéputé Nicolas Bay, en faveur d’Éric Zemmour, la candidate Marine Le Pen a feint l’indifférence. Et tant pis si les dernières enquêtes d’opinion laissent entrevoir un croisement des courbes. Un sondage Ifop pour Paris Match, LCI et Sud Radio publié vendredi donne le polémiste au second tour (16,5 %), face à Emmanuel Macron (25 %), d’un cheveu seulement devant la présidente du RN (16 %). Invité lundi matin de « Bonjour chez vous », la matinale de Public Sénat, Thierry Mariani, le porte-parole de Marine Le Pen, a tenu à rappeler que cette dernière restait la mieux placée pour battre le président sortant au second tour. « Éric Zemmour, c’est l’assurance survie d’Emmanuel Macron », a-t-il averti.
Et pourtant, comment expliquer les ralliements en série ? Puisqu’outre Nicolas Bay, il y a eu ces dernières semaines l’eurodéputé Gilbert Collard, le sénateur Stéphane Ravier, et plus récemment Lorrain de Saint Affrique, un fidèle de Jean-Marie Le Pen. Fin janvier, Marion Maréchal, la nièce de Marine Le Pen, avouait au Figaro « pencher » pour le polémiste, sans clairement annoncer un soutien. Faut-il y voir le contrecoup de la stratégie de dédiabolisation mise en place par Marine Le Pen depuis qu’elle a repris les rênes du parti ?
« Il y a des positions maladroites chez Éric Zemmour »
« Il n’y a pas de reniement au RN, mais une candidate qui fait un programme crédible », désamorce Thierry Mariani. « C’est la grande différence entre Marine Le Pen et son père, que je n’ai jamais soutenu, qui à mon avis n’était pas crédible. Éric Zemmour a un programme qui est plus lyrique que concret », ajoute-t-il, estimant que le succès du polémiste est largement dû à son « talent de la formule ». « Si je veux me faire plaisir j’écoute le discours d’Éric Zemmour, si je veux gagner je suis avec Marine Le Pen. En politique, le problème, c’est le possible. Pas de se faire plaisir », poursuit cet ancien ministre de Nicolas Sarkozy.
« Quand on veut rassembler 50 % des Français, ça veut dire que l’on n’en provoque pas une partie. Il y a des positions maladroites chez Éric Zemmour, son discours sur les prénoms est extrêmement maladroit. Je pense que Marine Le Pen ne fait aucun abandon, elle adoucit peut-être son discours », concède-t-il.
Thierry Mariani estime qu’après trois présidentielles, la députée du Pas-de-Calais a gagné en maturité : « Je suis frappé de voir toutes les émissions que fait Marine Le Pen, ce n’est plus la même qu’il y a cinq ans. C’est quelqu’un qui a préparé cette échéance, qui est précise désormais sur les chiffres, qui connaît ses dossiers et affronte la réalité », soutient-il.
Parrainages : « Il y a vraiment le feu à la maison »
Mais il reste encore une marche de taille à gravir pour Marine Le Pen avant de se positionner sur la ligne de départ de la course à l’Elysée : la collecte des 500 parrainages d’élus. Pour l’heure, le compteur de la candidate, régulièrement mis à jour par le Conseil constitutionnel, plafonne à 366 signatures. Un chiffre inquiétant, lorsque l’on sait que les postulants ont jusqu’au 4 mars pour réunir le nombre nécessaire de parrainages. « On lance une mobilisation générale aujourd’hui, tous les élus du RN sont appelés à prendre une liste de maires et à passer des coups de fil toute la journée », alerte Thierry Mariani, qui reconnaît que la candidate souffre en partie de la concurrence d’Éric Zemmour (291 signatures). « Il y a vraiment le feu à la maison, mais il n’y a pas de psychodrame. »
« Il y a une sorte de terrorisme des maires dans les intercommunalités », dénonce également notre invité. « J’ai vécu les régionales, j’étais reçu par un certain nombre de maires le soir, comme un résistant fuyant je-ne-sais-quoi », rapporte-t-il. « Pourquoi ? Les maires me disaient : je vous soutiens […] mais notre agglomération est tenue, par exemple, par Christian Estrosi. Si j’appelle à voter pour vous, je vais le payer dans les subventions ». Thierry Mariani salue l’idée de François Bayrou de mettre en place une « banque de parrainages » pour les candidats qui atteignent les 10 % dans les sondages. Une proposition qui toutefois arrive trop tardivement : « Je lance un appel à Monsieur Bayrou. Qu’il nous donne l’adresse ou le numéro de téléphone du guichet ! »