Présidentielle : les temps forts du grand oral des candidats face aux élus locaux

Présidentielle : les temps forts du grand oral des candidats face aux élus locaux

Public Sénat vous a fait vivre en direct ce mardi le grand oral des candidats à la présidentielle devant une centaine d’élus locaux à Montrouge. Décentralisation, démocratie locale, écologie… 10 prétendants à l’Elysée ont décliné leurs propositions devant « Territoires unis ».
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10 candidats – Emmanuel Macron et Éric Zemmour n’y participent pas- se sont succédé dès 9 heures à Montrouge devant de nombreux élus locaux, afin de préciser leur programme sur le thème des libertés locales, de la décentralisation et des relations Etat- collectivités. Un évènement organisé par Territoires unis qui regroupent, l’Association des maires de France, l’Assemblée des départements de France et Régions de France. Une émission que vous avez pu suivre en direct à partir de 9h sur les chaînes parlementaires Public Sénat et LCP AN.

  • Fabien Roussel : « Je rendrai en 15 ans les 15 milliards d’euros aux collectivités pris sous le mandat Hollande »

S’il est élu, le candidat communiste ne souhaite pas abroger les lois Maptam et Notre, « ce ne serait pas responsable », souligne-t-il. Le député envisage une grande consultation des élus locaux pour définir le rôle de chaque collectivité locale, et place la commune comme « la cheville ouvrière de la démocratie ». Il se fixe trois objectifs majeurs : « Mettre fin à la concurrence entre les territoires, garantir l’égalité des citoyens dans chaque coin de la République et redonner les moyens d’agir aux collectivités. » Le député souhaite mettre en place une « grande loi de décentralisation. » Fabien Roussel s’engage s’il est élu la mise en place un plan pluriannuel « pour réinstaller des services publics dans chaque commune » et promet le retour des guichets bancaires et des distributeurs automatiques de billets dans les communes rurales, « après les nationalisations de la BNP et la Société Générale. »

Fabien Roussel promet de « rendre en 15 ans les 15 milliards d’euros aux collectivités pris sous le mandat Hollande » et souhaite instaurer une fiscalité « plus juste » permettant aux collectivités de prélever l’impôt. « Démétropoliser la France », c’est une autre promesse du candidat communiste, « redonner des moyens aux petites communes pour que cela profite à tout le monde. »

  • Jean Lassalle « envisage fortement de se retirer » de la course à la présidentielle

« Je ne sais pas si je serai encore candidat ce soir. » Cette phrase, lâchée au détour d’une réponse sur la gestion de l’eau par les collectivités territoriales, sonne comme un aveu. Probablement parce que c’en est un. Jean Lassalle s’est « posé fortement la question » des suites de sa candidature, ce matin lors de son grand oral devant les élus locaux : « Oui j’envisage fortement de me retirer à l’heure qu’il est. Je participe à une campagne où personne ne me demande rien. Il y a un moment où l’on ne peut plus faire semblant. Je me pose la question ce matin, j’aurai répondu ce soir. » « Surtout devant vous », ajoute le député des Pyrénées-Atlantiques et ancien maire de Lourdios-Ichère pendant 42 ans, qui s’enflamme curieusement au moment où il évoque un potentiel renoncement : « Je suis heureux que le calendrier m’ait donné cette chance inouïe de me poser la question le matin où j’avais rendez-vous avec vous. J’ai toujours eu la baraka dans ma vie. Vive les élus de France, vive la République, vive la France ! »

Au-delà de son cas personnel, c’est une sorte de résignation générale qui semble motiver les doutes de Jean Lassalle : « Cette élection n’a plus aucun sens. C’est l’élection suprême de l’un des plus grands pays du monde et regardez ce qu’il reste : deux malheureux débats auxquels je ne serai pas invité. J’ai eu le bonheur d’assister à l’ascension de M. Zemmour, la joie de participer aux primaires des écolos, et aux primaires des Républicains, que j’avais connu à un autre niveau. » Mais Jean Lassalle ne semble pas abattu pour autant et adresse un dernier hommage aux élus locaux présents, sur fond d’autocritique : « Si je peux me permettre le conseil du vieux, n’abdiquez pas. Je continuerai le combat, je formerai des jeunes, je leur apprendrai à être plus courageux que nous. Nous n’avons été que des lâches au cours de ces 30 dernières années. Pas vous ! Vous, vous avez subi, mais à l’échelon que je représente, nous avons été lâches. »

Les doutes de Jean Lassalle sont venus assombrir un moment que celui-ci voyait probablement comme un moment de communion avec les élus locaux : « Je sais ce que vous représentez et la place que vous occupez dans le cœur de nos compatriotes, vous les 35 000 sentinelles de France. Vous êtes obligés d’entendre l’indicible et de trouver des solutions parce que vous n’avez plus personne à vos côtés. Tout est si loin. » Précisément, c’est probablement le volet le plus complet du projet défendu par Jean Lassalle dans cette élection présidentielle : « reconstruire » l’action territoriale de l’Etat et son articulation avec les collectivités. « Si par un miracle républicain, apostolique, le peuple français me portait à la présidence, je vous promets que les lois Notre et Matpam… à dégager ! Ensuite, le maire et le conseil municipal s’organisent comme ils l’entendent. S’ils veulent travailler avec d’autres communes, selon le principe de subsidiarité, qu’ils le fassent. Mais je veux reconstruire un Etat adapté à notre temps, qui redevienne un symbole et que les maires prennent la suite. »

Pour ce faire, Jean Lassalle propose d’affecter 3 milliards par an à une « grande cause nationale », « campagne de France », en les prélevant sur la dotation à l’Union Européenne. « Le but c’est que vous puissiez retrouver la plénitude de votre capacité à agir, je ne pense pas que l’on puisse agir sous la contrainte des préfets, il faut que chacun sente sa commune », explique le candidat à la présidentielle. D’après lui, les difficultés actuelles rencontrées par les collectivités, sur l’eau notamment, se posent « parce que nous prenons les décisions à des centaines de km. » Ainsi « les départements fonctionnent bien », mais « la région telle qu’elle est aujourd’hui est inutile » : « Si le brave conseiller régional a la chance de pouvoir poser son cul sur un fauteuil pendant 15 minutes dans la journée, c’est qu’il est très fort. Le soir quand il rentre il n’a rien à raconter à sa femme parce qu’il n’a fait que de la route. »

Jean Lassalle porte ainsi une proposition pour le moins originale inspirée des « provinces » d’Ancien Régime : « Ce qui a manqué à toutes les Républiques, c’est ce qui a permis à la France de se constituer dans un Etat des Provinces, porteuses de couleurs et de langues. Elles avaient le sel et la saveur d’une France qui s’aime. » Difficile d’avoir plus de détails par contre : « Je ne vais pas faire comme les autres et y réfléchir sur un coin de table comme M. Hollande. »

  • Marine Le Pen : « Les élus locaux sont clairement la cinquième roue du carrosse »

Avant d’entrer dans le vif du sujet, la candidate du Rassemblement national a apporté son soutien à Jean Lassalle qui, quelques minutes plus tôt, faisait part de sa résignation à poursuivre sa campagne électorale. « Je trouve absolument inadmissible qu’à l’issue de l’obtention des parrainages, il y ait des candidats qui continuent à ne pas être traités comme les autres sans qu’on comprenne bien les critères qui peuvent être choisis. J’espère bien que Jean Lassalle restera dans la course à cette présidentielle et que les différents médias changeront de comportement à son égard et ainsi qu’à l’égard d’autres candidats qui ont été également écartés ».

 

« Dans la société mondialiste que nos dirigeants cherchent à nous imposer, les élus locaux sont clairement la cinquième roue du carrosse […] Je suis, pour ma part, profondément attachée au modèle localiste », a commencé Marine Le Pen. Son gouvernement « d’union nationale » se traduira par un lien « tout particulier » avec les élus locaux. « Je m’engage donc à organiser des rendez-vous réguliers avec vous », une référence à la pratique du pouvoir du président sortant dont les rapports avec les élus locaux ont parfois été houleux durant le quinquennat.

Son programme ne comporte pas de réforme « complète » de l’organisation territoriale. « En revanche, elle souhaite mener « une politique de rééquilibrage des territoires » […] et une « démétropolisation ». « L’aménagement du territoire a été laissé ces dernières années à la main invisible du marché. Elle concentre dans les grandes métropoles et ailleurs c’est le désert », a-t-elle fustigé.

Marine Le Pen souhaite voir une évolution « dans le couple département-région ». « Pourquoi ne pas prévoir que les départements soient gérés par les conseillers de la région, élus dans le cadre de la section départementale ? »

La candidate RN considère que « la loi 3DS pose problème. Les mesures qu’elle contient en matière de différenciation territoriale et de compétences à la carte présentent un risque de violation du principe d’égalité ».

Elle a également indiqué qu’elle souhaitait la suppression des Agences régionales de santé. « On est arrivé au bout de cette logique-là. Ces structures n’ont pas démontré leur efficacité, elles ont même démontré, dans certains cas, qu’elles étaient un obstacle à des solutions trouvées sur le terrain »

  • Philippe Poutou : « On est dans un monde très peu démocratique, malheureusement les structures locales le sont peu aussi. »

Le candidat du Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA), Philippe Poutou regrette le manque de démocratie à l’échelon des collectivités territoriales. « On est dans un monde très peu démocratique, malheureusement les structures locales le sont peu aussi. » Philippe Poutou se désole d’une inégalité croissante, « d’une fracture réelle » entre « les métropoles et les grandes villes concentrant les richesses et le pouvoir, et les petites communes avec peu de moyens et dont les avis ne comptent pas. » Le candidat à l’élection présidentielle souhaite transformer la gouvernance des collectivités territoriales en instaurant des « structures de démocratie directe » pour les habitants d’un quartier ou d’une ville, un cadre participatif permettant aux citoyens « de discuter et échanger avec les équipes municipales » mais également « de décider. » L’ancien ouvrier de l’usine Ford de Blanquefort en Gironde fustige « les politiques de gestion » des collectivités territoriales.

Interrogé sur la relation entre l’éducation et les municipalités, Philipe Poutou se désole « d’un manque de moyens pour les écoles » dans les grandes villes et propose de « recruter massivement » et d’établir une « liaison entre les quartiers et les mairies. » « Le problème de fond est d’avoir les moyens pour répondre aux urgences sociales », souligne le candidat du NPA et généralise cet exemple à l’ensemble des services publics impactés par une rigueur budgétaire « et une logique de marchandisation ». Le conseiller municipal à la mairie de Bordeaux propose le recrutement d’un million de postes statutaires pour les services publics et plaide pour l’instauration d’un service public bancaire unifié « répondant aux besoins de la population ». Interrogé sur l’aspect centralisateur de certaines de ses mesures, Philippe Poutou reconnaît qu’il faut « concilier centralisation et planification, ce n’est incompatible avec des formes d’autogestion au niveau local », précise-t-il.

Le candidat à la présidentielle s’est également exprimé sur les manifestations qui secouent la Corse depuis l’agression d’Yvan Colonna. « La révolte de la jeunesse corse est totalement légitime », selon Philippe Poutou. Cette révolte est liée selon lui à un refus des aspirations démocratiques des insulaires. « Ça pète en Corse parce qu’il y a eu un déni de démocratie. Et heureusement que ça pète à des moments, parce que c’est comme ça que ça peut faire bouger les choses», explique-t-il.

 

  • Anne Hidalgo : « Mon projet pour la France s’appuie sur la vision d’une République réellement décentralisée »

Anne Hidalgo, la candidate socialiste, a consacré les dix premières minutes de son intervention devant les élus à épingler le bilan d’Emmanuel Macron en matière de décentralisation. « Nous avons vécu cinq années pendant lesquelles nous avons été écartés, dénigrés, nous avons été mis de côté. Nous étions ces corps intermédiaires qui, selon le président sortant, ne servaient pas à grand-chose », a dénoncé la maire de Paris. Elle a déploré un « réflexe jacobin » centralisateur qui a, selon elle, largement entravé la créativité des territoires. « Un homme seul dans son bureau, avec une conception de monarchie républicaine, ne peut pas y arriver. Il n’y a pas un seul pays moderne au monde qui fonctionne sur cette vision centralisée, qui ne laisse rien respirer, qui ne fait jamais la place à d’autres acteurs », a-t-elle encore déploré.

« Mon projet pour la France s’appuie sur la vision d’une République réellement décentralisée », assure Anne Hidalgo. « Dans le projet qui est le mien, la place des élus locaux est déterminante, car je sais que notre pays n’aurait pas tenu dans les crises que nous avons vécues ces dernières années, qu’elles soient liées au climat, au social ou à l’épidémie, s’il n’y avait pas eu ce réseau de fantassins de la République », a-t-elle salué. La candidate a fait valoir sa volonté de rendre aux collectivités une autonomie financière mise à mal par la suppression de la taxe d’habitation. Elle souhaite ainsi en finir avec un système de dotation qui soumet les élus locaux aux desiderata de l’Etat. « Un système dans lequel l’Etat donne. Si on est gentil, on a plus, si on rouspète, un peu on a moins », pointe-t-elle. « Cette façon-là de concevoir la récompense est quelque chose avec lequel il faut rompre. »

Si elle n’en a pas dit plus sur le modèle de financement qu’elle souhaite mettre en place, Anne Hidalgo a néanmoins détaillé plusieurs de ses propositions sur la mobilité, la santé et la jeunesse. La socialiste souhaite mettre en place un plan pour accompagner l’achat d’un véhicule électrique, « ce qui suppose un plan massif de bornes électriques dans le pays » afin de désenclaver certains territoires. Concernant les déserts médiaux, elle propose une réforme de la quatrième année d’internat pour qu’elle devienne « une année de professionnalisation », au cours de laquelle les jeunes médecins seraient envoyés dans les déserts médicaux. Elle est également revenue sur sa proposition de minimum jeunesse, une allocation de 564 euros par mois, présentée comme un levier pour aider les jeunes de milieux défavorisés ou de territoires ruraux à faire des études supérieures.

En fin d’intervention, l’édile parisienne a déploré le refus d’Emmanuel Macron de débattre avec les autres candidats avant le premier tour, accusant le chef d’Etat de vouloir passer sous silence le bilan de son quinquennat. « On ne peut pas enjamber cette élection présidentielle en effaçant, comme avec une ardoise magique, un bilan catastrophique qui a jeté notre pays dans la rue. La pandémie a chassé la crise des Gilets Jaunes, et l’on va recommencer ? », a-t-elle voulu alerter

  • Nathalie Arthaud : « Ce ne sont pas les grands mots qui vous donnent plus de moyens »

Au lendemain de l’émission de TF1, où seuls 8 candidats sur 12 étaient invités, Nathalie Arthaud a tenu à remercier les associations d’élus d’avoir été plus inclusives. « C’est quelque chose de rare dans cette campagne et en plus nous avons le même temps de parole », a relevé la candidate de Lutte Ouvrière.

Nathalie Arthaud s’est d’ailleurs félicitée d’être la seule candidate ayant été parrainée en intégralité par des maires. Seul un conseiller départemental de Guadeloupe fait exception.

Et pourtant, Nathalie Arthaud ne fait pas de « promesses électorales ». « Parce que pour tenir ses promesses, il faut des moyens financiers et il ne faut pas de mauvaises surprises. Or, ce monde capitaliste fou nous réserve beaucoup de mauvaises surprises ».

A l’instar des soignants, les élus locaux sont qualifiés de « premiers de corvées ». « Vous aussi vous avez eu votre lot de grands mots, de remerciements et d’hommages (….)  Mais ce ne sont pas les grands mots qui vous donnent plus de moyens ».

A ce sujet, Nathalie Arthaud a listé les baisses successives des dotations aux collectivités lors des trois quinquennats qui ont précédé l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron, « qui a contribué d’une autre manière à faire baisser vos ressources », a-t-elle fait valoir en citant la suppression de la taxe d’habitation.

La candidate considère que c’est aux travailleurs de s’organiser pour se faire respecter. En ce sens, elle préconise d’instaurer un « contrôle des travailleurs » pour « vérifier » à quoi servent les financements publics.

  • Valérie Pécresse propose son « expérience d’une présidente d’une grande région qui a fait ce qu’elle a dit qu’elle allait faire »

Nul doute que Valérie Pécresse a dû apprécier son grand oral devant les élus locaux, qui a été une sorte de parenthèse apaisée dans une campagne difficile et accrochée. Valérie Pécresse jouait en effet un peu à domicile : « Moi-même je suis une élue locale, simple conseillère municipale de Vélizy. Je connais votre engagement sur le terrain, toujours à portée d’engueulade. » La présidente de la région d’Île-de-France a aussi pu mettre en avant – comme lors des primaires LR – son expérience à la tête de la région francilienne, et notamment au niveau de la simplification administrative : « Qu’est-ce que j’ai à vous proposer ? L’expérience d’une présidente d’une grande région qui a fait ce qu’elle a dit qu’elle allait faire. Ce choc de simplification je l’ai fait dans ma région, il faut maintenant le faire pour la France. »

On se demande si ce sont les élus locaux ou Valérie Pécresse qui sont en câlinothérapie, en tout cas, il y en a pour tout le monde dans ce « grand oral » qui ressemble parfois à une discussion d’élaboration programmatique. Interrogée sur la liberté d’association des collectivités locales, et leurs prérogatives concernant la police municipale, Valérie Pécresse a détaillé ses propositions pour faire de la police municipale « la troisième force de sécurité du pays » en ajoutant : « Toutes mes propositions seront débattues lors d’une grande conférence de Territoires unis [qui regroupe les associations des maires, départements et régions de France] juste après l’élection pour ajuster le programme. Comme je crois à la différenciation et aux libertés locales, tout peut être négocié et coconstruit avec vous. »

Ce droit à la différenciation est la colonne vertébrale du projet présenté par Valérie Pécresse. « Le temps des libertés locales est venu, c’est le moyen de retrouver de la confiance dans la politique et ce sera une priorité de mon quinquennat » affirme la présidente de la région Île-de-France, avant de détailler : « Il faut que les règlements nationaux puissent être adaptés en fonction des réalités locales et inscrire le droit à la différenciation dans la Constitution. » Sur le logement par exemple, « les maires doivent retrouver le pouvoir de redessiner leur ville », ce qui est « au cœur de leur mandat municipal », en leur rendant notamment la main sur l’attribution des logements sociaux, avec un objectif de 150 000 logements sociaux par an.

Ainsi Valérie Pécresse veut remplacer la loi SRU par des « contrats de mixité sociale » conclus au niveau local entre les élus et le préfet, qui a vocation pour elle à devenir « l’interlocuteur unique » entre l’Etat et les collectivités : « Des contrats conclus entre les maires et les préfets doivent pouvoir permettre d’adapter l’action publique aux réalités locales. Le préfet doit devenir le vrai patron des services territoriaux. » Finalement, Valérie Pécresse défend « une vraie décentralisation », même sur les sujets économiques, où elle fait finalement des régions l’acteur le plus « efficace » et le plus « stratège », qui doit être « chef de file de l’attractivité économique » : « Ce sont les régions qui ont le lien avec les territoires et les tissus économiques, elles ont les cartes en tête et sont réductrices d’inégalités entre les territoires. Alors que quand l’Etat créée de l’emploi, peu importe pour lui que ce soit dans des territoires ruraux ou urbains. »

  • Yannick Jadot : « Je suis frappé par l’absence de projets collectifs autour des équilibres territoriaux »

« Les collectivités dans la Vème République sont toujours flattées, mais souvent flouées. On vient vous dire à quel point vous êtes exceptionnels. On vient vous dire que devez être au cœur de toutes les dynamiques et à la fin, on vous envoie un préfet ou un sous-préfet pour vous expliquer quoi faire », a relevé le candidat écologiste. L’eurodéputé se désole d’une décentralisation timide et envisage s’il est élu à la présidence de la République, une refonte du modèle national en offrant aux collectivités territoriales « de véritables compétences et une autonomie ». Yannick Jadot souhaite mettre fin au modèle de « la déconcentration sous contraintes ou sous surveillance. »

 

 

Le candidat écologique souhaite entreprendre une grande politique d’aménagement du territoire, une nécessité selon lui pour faire face aux enjeux du changement climatique. « Je suis frappé par l’absence de projets collectifs autour des équilibres territoriaux », explique le député européen. Sur les transports, « les années d’inaction climatique ont amené à des mobilités contraintes. » Sans détailler les modalités de financement de ces futurs projets, le candidat projette « d’investir dans les trains et dans les alternatives à la voiture. » Yannick Jadot propose un projet « de commissaires de la République à la reconstruction, rattaché à un grand ministère des Territoires sous l’autorité du Premier ministre. » « Ce n’est pas au préfet ou au sous-préfet de dire quel projet économique ou d’infrastructure doit se développer, cela n’a plus aucun sens », complète-t-il. « Nous portons la fin de l’artificialisation des sols », explique le candidat et propose une concertation avec les habitants. Sur la question du logement, Yannick Jadot propose la conversion « des bureaux vides », des projets « qui permettent de repenser la densité » des zones urbaines. Le candidat défend également un modèle d’économie circulaire, la présence des services publics et les commerces de proximité, « un nouveau modèle d’urbanisme. »

 

Pour l’écologiste, le gouvernement actuel n’a pas fait assez en matière de rénovation énergétique. « Regardez les dernières statistiques sur la MaPrimeRenov’ : 2 500 rénovations globales, il faudrait faire cent fois plus », souligne-t-il. Yannick soutient la création, « d’un service public de la rénovation thermique ancré sur les territoires. » Le candidat à la présidentielle défend l’idée d’une refonte du modèle agricole, « un modèle insoutenable » autour d’une agriculture paysanne axée sur la biodiversité et neutre en carbone.

L’accès d’entreprises locales à la commande publique est une priorité pour Yannick Jadot, « ça fait des années que je me bats au Parlement européen pour qu’on puisse mettre du contenu local dans les marchés publics », explique-t-il. Le candidat souhaite donner la possibilité aux élus des collectivités territoriales, de « récompenser les entreprises vertueuses de mon territoire. » Concernant les déserts médicaux, le candidat Europe Ecologie Vert soutient le renforcement de services publics dans les territoires où l’accès à la médecine est limité en créant « de nouvelles maisons de santé et des maisons pluridisciplinaires. » Yannick Jadot préconise de conditionner les installations dans les zones déjà pourvues et « obliger l’installation de médecins dans les régions sous-dotées pour la dernière année d’étude et les premières années d’exercice. » « Ce n’est pas cool pour les médecins, mais c’est notre responsabilité », reconnait-il.

  • Nicolas Dupont-Aignan critique la décentralisation : « On veut des statuts particuliers, mais ce n’est pas ça la France »

Dans une journée baptisée « rencontre des collectivités locales », le message porté par Nicolas Dupont-Aignan revêt une tonalité discordante : « Tout le monde veut réduire la dépense publique, mais chacun veut faire grossir sa collectivité. Il y a un moment où il va falloir arrêter l’empilement des structures. Je vais me fâcher avec du monde ici, mais ce n’est pas grave, il faut dire la vérité : communes, intercommunalités, départements, métropoles, régions et un Etat impuissant, on continue combien de temps comme ça ? On veut des statuts particuliers, mais ce n’est pas ça la France. » C’est une critique rare de la décentralisation qu’a développé Nicolas Dupont-Aignan aujourd’hui : « La République c’est la simplicité, pour que l’électeur puisse juger. Je croyais qu’on avait décentralisé pour rapprocher, pour bien utiliser l’argent public et je n’assiste qu’à la multiplication des organismes, à un langage tel que les élus de terrain ne le comprennent même plus, et que 30 à 50 % des maires ne veulent plus se représenter. »

Ainsi, le candidat de Debout la France s’est montré très critique sur l’action des régions, en affirmant que la santé publique devait être une compétence exclusive de l’Etat et ne devait pas « appartenir aux régions. » Nicolas Dupont-Aignan préfère ainsi miser sur les communes « en train de mourir d’asphyxie à cause d’intercommunalités trop grandes, trop boulimiques, trop bureaucratiques. » Il poursuit : « Il faut redonner du pouvoir aux maires, renforcer leur statut, leur donner de la liberté, supprimer les normes, arrêter de les embêter au jour le jour sur tous les domaines. » Le département sortirait plutôt indemne de la réforme territoriale prônée par « NDA », en tant que « centre de l’action sociale et de santé. » Sur ce volet social, Nicolas Dupont-Aignan propose de conditionner l’accès au RSA à « insertion d’une journée d’activité » : « Ce n’est pas punir les allocataires du RSA que de leur fournir un petit travail qui les sort de chez eux. C’est un service qu’il donne, mais aussi qu’on leur rend. »

Sur l’aménagement du territoire, le candidat propose de renforcer la « Dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) », de créer un « fonds de sauvegarde du patrimoine rural » pour les communes de moins de 1000 habitants, ainsi que – là encore une idée pas forcément à la mode – le rétablissement de la réserve parlementaire. En revanche, le dernier axe développé par « NDA » est un peu plus consensuel : « simplifier au maximum » les normes qui régissent l’action des collectivités locales. Le candidat de Debout la France compte « faire ce que Napoléon avait fait pour le code civil » en « reprenant l’ensemble des normes » dans un travail de « codification » Sous les huées, Nicolas Dupont-Aignan développe le corollaire de cette simplification, « cela veut dire enlever cet horrible drapeau [européen] que je vois derrière moi, car je n’ai qu’une seule patrie, c’est la France. » D’après lui, « les normes viennent de lobbies à Bruxelles et de l’administration française qui en rajoute. » En attendant un éventuel référendum sur la sortie de l’UE, le candidat propose déjà « d’enlever toutes les normes excessives et inutiles. »

Jean-Luc Mélenchon demande « une réflexion sur le statut de certains territoires, dont la Corse »

Dans son discours liminaire, le candidat de l’Union Populaire a exposé sa vision de la France et des collectivités territoriales, une pensée construite autour de l’histoire. « Je suis de tradition jacobine et je le reste », prévient Jean-Luc Mélenchon. « Je ne participe pas de la mentalité qui oppose les échelons de gestion », précise-t-il. « La commune est ‘la’réalité démocratique fondamentale de la nation française », souligne l’ancien sénateur. L’élu Insoumis rappelle à son auditoire que les grandes luttes sociales et les libertés fondamentales sont nées dans les centres urbains, qui sont « les sources des réalités démocratiques. »

Pour répondre aux enjeux « de la double question de l’émergence citoyenne complète et de la planification écologique » définis dans son programme, le député réaffirme le rôle de la commune « comme le lieu d’où remonte les préoccupations, l’identification des problèmes, leur soumission à des délibérations collectives et où s’opère la redistribution des 200 milliards d’investissement écologique que prévoit mon plan au cours du quinquennat. » Concernant le département, Jean-Luc Mélenchon affirme son attachement à cette unité administrative « qui pourrait être le grand organisateur des services publics. Le candidat Insoumis doute de la légitimité des régions, des créations artificielles, « je ne les trouve pas performantes. » Il se désole de la nouvelle organisation régionale héritée de la loi NOTre. « Les régions doivent avoir une base géographique et écologique ». Il fustige « le découpage de la France en Länder. »

Interrogé sur les déserts médicaux et le système de santé, l’Insoumis décrit les Agences Régionales de Santé comme « des organismes inefficaces qui ont introduit à l’hôpital des normes de gestion d’entreprise. » Jean-Luc Mélenchon demande la « démarchandisation » du système de santé à travers une refonte complète de son modèle de financement en mettant fin à « la T2A qui défigure l’exercice de la profession médicale et la bureaucratise. » Pour faire face aux déserts médicaux, le candidat admet que les solutions existent : « Il suffit de les généraliser. » L’Insoumis demande la construction de maisons de santé pluridisciplinaires et de « permettre aux médecins de participer au travail en étant salariés. »

Questionné sur le projet de la VIème République, le candidat demande « une réflexion sur le statut de plusieurs territoires. » Concernant la Corse, Jean-Luc Mélenchon admet avoir tenu « des propos assez sévères » sur l’île de beauté. « On ne va pas forcer les gens, je l’ai observé en Algérie et en Nouvelle Calédonie avec la troupe qui cantonnait. On ne fait jamais nation avec ce type de méthode. La Corse a voté massivement à trois reprises pour des élus autonomistes et je m’incline. » Jean-Luc Mélenchon considère que l’article 74 de la Constitution qui consacre le statut particulier de la Polynésie, est adapté au contexte corse et « ne rendrait pas ce territoire moins Français que la Polynésie. »

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