Présidentielle: les discours des candidats au crible des chercheurs

Présidentielle: les discours des candidats au crible des chercheurs

Les principaux candidats à la présidentielle en France ont un discours de campagne "pauvre du point de vue du vocabulaire et du style" mais...
Public Sénat

Par Charlotte HILL

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Les principaux candidats à la présidentielle en France ont un discours de campagne "pauvre du point de vue du vocabulaire et du style" mais tentent de se distinguer par des dominantes propres, selon des chercheurs.

"Le discours politique de campagne est particulièrement pauvre du point de vue du vocabulaire et du style", observe Cécile Alduy, professeur de littérature à l'université de Stanford et spécialiste du discours politique.

Extrêmement codifié, le discours de campagne se fonde sur des slogans et mots simples, faisant appel à des grands principes abstraits.

Et "le coaching en communication tend à lisser encore davantage le discours: il faut qu'il marque, mais sans fâcher personne", souligne Cécile Alduy.

Ce qui n'empêche pas les principaux prétendants de mettre en avant leurs spécificités: la dirigeante d'extrême droite Marine Le Pen réalise ainsi une "OPA" sur le mot "peuple", le centriste Emmanuel Macron étant "plus dans la dynamique que la thématique", tandis que le candidat de droite François Fillon, empêtré dans les affaires judiciaires, est "réfugié" sur "des marqueurs lexicaux très à droite", selon des chercheurs.

- Marine Le Pen -

La candidate du Front national a une "dialectique très martelée statistiquement: celle de la +proximité+ contre la +mondialisation+", observe Damon Mayaffre, chercheur au CNRS, copilote d'une plateforme numérique qui permet notamment de repérer les mots favoris des discours des candidats, via des algorithmes.

"Elle aime aussi tous les mots en +isme+, un peu anxiogènes dans le débat politique: islamisme, mondialisme, socialisme, libéralisme, terrorisme. Et elle a fait une "OPA lexicale sur le mot +peuple+", poursuit-il.

Pour la sémiologue Mariette Darrigrand, Mme Le Pen est dans une posture "mythologique". Elle "brode" autour du concept de patriotisme "des épisodes, comme dans une série: Marine va chez Poutine, Marine ferme les vannes de l'immigration…".

- Emmanuel Macron -

L'ancien banquier d'affaires "reprend une tradition du discours politique" et "théorise des passions heureuses", selon Mariette Darrigrand, pour qui "cette campagne 2017 ne se joue pas au niveau des idées" mais plus "dans la dramaturgie". "Il est très énergétique".

Les onze candidats à la présidentielle
Les onze candidats à la présidentielle
AFP

Il utilise "des mots sans beaucoup de contenu, où la référence politique est effacée", avec peu de termes comme nation, peuple, patrie. "Il est plus dans la dynamique que dans la thématique" avec des mots comme innovation, transformation, selon Damon Mayaffre.

Julien Longhi, professeur en sciences du langage, qui étudie particulièrement les tweets des candidats, pointe aussi "des marqueurs forts comme l'association positive entre la France et l'Europe".

- François Fillon -

Le candidat de la droite était "sur la posture noble de l'épopée, mais le +Penelopegate+ a tout mis par terre. Il reste dans la posture épique, mais l'enjeu n'est plus la France mais lui-même", juge Mariette Darrigrand.

"Privé de sa thématique sur l'exemplarité, il se réfugie sur des marqueurs lexicaux très à droite: ordre, famille, France", observe Damon Mayaffre, relevant un autre mot très caractéristique: la "dette" que les autres "utilisent peu".

Côté phrasé, il a comme Marine Le Pen "une voix forte, qui porte, ne tremble pas, sait se faire agressive ou dédaigneuse des positions adverses", remarque Cécile Alduy.

- Jean-Luc Mélenchon -

Le tribun de la gauche radicale "a une très forte identité discursive", relève Damon Mayaffre. Il cherche à "renouer avec l'humanisme et surutilise des mots très marqués, peu utilisés par les autres: humanité, humain, humaine…", ou "vertu", note le chercheur du CNRS.

Et "il sait faire alterner fausses questions oratoires et longs développements lyriques", remarque Cécile Alduy.

Dans la même thématique

Présidentielle: les discours des candidats au crible des chercheurs
2min

Politique

Recherche d’un Premier ministre : « Le président continue à écouter et à tendre la main », assure Maud Bregeon 

La porte-parole du gouvernement Maud Bregeon a assuré ce mercredi à la sortie du Conseil des ministres qu’Emmanuel Macron a acté qu’il n’y avait pour le moment pas « de socle plus large que celui qui est en place aujourd’hui » pour gouverner. Mais, après les consultations des responsables de partis mardi, « le président continue à écouter et à tendre la main ».

Le

Marine Le Pen, présidente du groupe Rassemblement national à l’Assemblée, pendant le vote de la motion de censure contre Michel Barnier.
3min

Politique

Sondage : après la motion de censure, Marine Le Pen toujours en tête des intentions de vote pour l’élection présidentielle

Une semaine après la censure du gouvernement Barnier par la gauche et le Rassemblement national, un sondage Ifop pour Le Figaro Magazine et Sud Radio révèle que Marine Le Pen améliorerait son score au premier tour de l’élection présidentielle. En fonction des candidats face à elle à gauche et chez les macronistes, elle recueille entre 36 et 38 % des intentions de vote.

Le

Présidentielle: les discours des candidats au crible des chercheurs
3min

Politique

La consultation des partis à l’Élysée marque « le retour de l’UMPS », estime Thomas Ménagé (RN)

Emmanuel Macron a réuni mardi les responsables de plusieurs partis politiques à l’Élysée pour les consulter avant la nomination d’un nouveau Premier ministre pour remplacer Michel Barnier. Pour le député RN Thomas Ménagé, invité de la matinale de Public Sénat ce mercredi, cet échange marque « le retour de l’UMPS » sous la forme d’un « parti unique qui va du PS jusqu’à Laurent Wauquiez ».

Le