Alors que la surpopulation carcérale en France a atteint un nouveau record le 1er août dernier, avec 82 508 détenus pour 59 877 places (118 %), la commission des lois du Sénat examinait, mercredi, le rapport sur la nature des peines, leur efficacité et leur mise en œuvre, présenté par Jacques Bigot, sénateur socialiste du Bas-Rhin, et François-Noël Buffet, sénateur LR du Rhône. Une vingtaine de propositions ont été rédigées.
« Contrairement au gouvernement qui ne propose que des ajustements avec son plan de désengorgement des prisons, nous proposons une refonte du système, pas un ajustement » vante M. Buffet, qui plaide pour des peines « effectivement » et « rapidement » exécutées.
Semi-liberté et travaux d'intérêt général
Pour ce faire, le rapport sénatorial mise sur la semi-liberté et les travaux d’intérêts généraux (TIG) : « L’exécution de courtes peines de prison est contre-productive car la prise en charge des personnes n’est pas immédiate. « Les peines inférieures ou égales à deux ans sont exécutées dans un délai moyen de 18 mois à compter du prononcé définitif ! » s’indigne François-Noël Buffet.
Même son de cloche côté gouvernement puisque la garde des Sceaux prévoit, dans son plan prison, d’introduire la possibilité pour le juge de prononcer une peine de détention à domicile sous surveillance électronique, lorsque celle-ci est entre six mois et un an. En dessous de six mois, la peine s’exécutera, par principe, dehors (TIG ou semi-liberté).
« Il ne faut pas aller jusqu’à l’interdiction des peines »
Nicole Belloubet entend même aller plus loin en supprimant les peines de moins d’un mois. Une mesure qui n’est pas prévue dans le rapport des sénateurs. « Il ne faut pas aller jusqu’à l’interdiction des peines. Certaines courtes peines exécutées dans des établissements adaptés peuvent être utiles », assure François-Noël Buffet.
« Ce qui compte, c’est l’ensemble du dispositif »
Parmi les autres mesures prévues par l’exécutif : la création de « structures d’accompagnement vers la sortie » (SAS) pour accueillir les condamnés à des peines de moins d’un an ou en fin de peine. Le sénateur LR trouve la mesure « bonne, surtout pour les peines de longue durée ». Toutefois, « il y a une discussion sur la manière de faire » : « Ce qui compte ce n’est pas une unité, mais l‘ensemble du dispositif, qui doit être cohérent. Prononcer une peine X si derrière il y a un gravier dans le mécanisme ça ne fonctionnera pas. »
Des études de personnalité des prévenus « le plus vite possible »
Jacques Bigot et François-Noël Buffet préconisent ainsi des études de personnalités des prévenus « le plus vite possible pour que le juge correctionnel puisse rendre sa décision ». « Les tribunaux correctionnels, lorsqu’ils prennent une décision, n’ont pas toujours l’ensemble des éléments qui concernent la personnalité du prévenu donc, parfois, cela crée des difficultés quant à la nature même de la peine et son efficacité », explique le sénateur LR. Et d’ajouter : « Parfois pour obtenir la peine qu’ils souhaitent ils condamnent plus fort en se disant que le juge d’application des peines va réaménager tout cela. »
Mais le plus gros « gravier » reste, pour l’instant, le financement d’une telle réforme. Nicole Belloubet a dit que le budget de son ministère augmenterait « autour de 4 % ». Une augmentation qui paraît « insuffisante » aux yeux des sénateurs, qui souhaitent avant tout savoir à quoi elle va servir » : « Pour l’instant, je n’ai pas eu d’éléments concrets de ventilation des fonds », précise François-Noël Buffet.