Prisons : ce qu’il faut retenir de l’audition de Nicole Belloubet

Prisons : ce qu’il faut retenir de l’audition de Nicole Belloubet

Après deux semaines de crise, la ministre de la Justice Nicole Belloubet a exposé, devant les sénateurs de la commission des lois, les étapes du protocole d’accord avec les surveillants et les grandes lignes du plan prison que le chef d’État présentera à la fin du mois.
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« L'essentiel dans ce protocole d'accord repose sur la volonté de redonner aux surveillants des établissements pénitentiaires, l'autorité et la dignité de l'exercice de leur métier ». Voilà comment la ministre a qualifié l’accord signé en fin de semaine dernière avec le syndicat majoritaire du personnel pénitentiaire UFAP-UNSA. Auditionnée pendant deux heures devant la commission des lois du Sénat, la ministre s’est tout d’abord défendue de tout retard à l’allumage dans la gestion de l’agression de 4 surveillants par un détenu radicalisé à la prison de Vendin-le-Vieil (Nord-Pas-de-Calais) le 15 janvier dernier.

« Dès la survenance de ces évènements, j’ai bien entendu pris contact avec ces quatre surveillants (…) J’ai également déclenché une mission d’inspection puisqu’on m’avait alerté sur des difficultés  de fonctionnement dans l’établissement (…) nous avons demandé une mission d’inspection  (….) ce qui me permettra de me rendre dans l’établissement de Vendin-le-Vieil trois ou quatre jours après la survenance des évènements munie de cette analyse et de ces différents éléments ». La ministre annonce avoir présenté un plan en 10 points dont elle s’assurera de sa réalisation dans deux mois. « Le 12 mars prochain, je reviendrai à Vendin ».

Agression de surveillants à Vendin-le Vieil: les explications de Nicole Belloubet
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Puis la ministre à rappeler le contenu du protocole d’accord : « 1100 créations d’emplois sur 4 ans », « des mesures en termes de sécurité et en termes d’équipement », « des éléments liés à la gestion des détenus radicalisés et violents » et « des mesures indemnitaires » pour les surveillants.

500  détenus radicalisés et 1200 en voie de radicalisation

Sur ce point, Nicole Belloubet a chiffré le nombre de terroristes islamistes à 500 et 1200 détenus de droit commun en voie de radicalisation » qui seront suivis dans des quartiers étanches. (voir la vidéo de tête)

Pourquoi a-t-elle refusé le changement statutaire en catégorie B pour les surveillants ?

Alors que le front syndical est resté divisé tout le long de la crise, Nicole Belloubet a expliqué pourquoi elle avait refusé à FO Pénitentiaire le changement statutaire que le syndicat demandait : passer en catégorie B comme les policiers. « À supposer qu’il n’y ait pas eu d’incidences financières (…) Nous avons pu vérifier que 33% des personnes qui ont passé le concours de surveillant pénitentiaire n’avaient pas le baccalauréat. Et pour avoir la catégorie B, il faut avoir le baccalauréat, donc évidemment ça aurait peut-être tari le vivier de recrutement ».

Faut-il changer la loi qui concerne la fouille de détenus ?

La sénatrice socialiste de Paris, Marie-Pierre de la Gontrie, a évoqué l’épineuse question de l’article 57 de la loi pénitentiaire relatif aux fouilles des détenus qui fait l’objet d’une évaluation parlementaire de l’Assemblée nationale. « Cet article 57, certaines organisations syndicales en demandent purement et simplement l’abrogation » a-t-elle relevé. Et si les fouilles doivent, selon la loi, répondre au principe de nécessité, de proportion et de subsidiarité, « vous savez que la Cour européenne des droits de l’Homme a déjà eu l’occasion de condamner la France pour pratique dégradante pour les fouilles intégrales » lui a-t-elle rappelé avant de conclure : « le sort des détenus fait aussi que les conditions de travail pénitentiaire sont différentes (…) Je comprends en creux que vous n’excluez pas d’abroger cet article 57 ce qui serait au regard du respect des détenus très préoccupant pour la conception de la France a des droits de l’Homme »

Fouilles des détenus: "le gouvernement souhait que le dispositif soit renforcé" explique Nicole Belloubet
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« Le gouvernement souhaite que le dispositif de fouilles soit renforcé ». Il reviendra à la mission parlementaire « de faire le point sur la réglementation européenne et les législations étrangères ». « En tant que garde des Sceaux, je suis la garante de la constitutionnalité et de la conventionalité des dispositions que nous sommes amenés à prendre. Donc nous serons vigilants » a répondu Nicole Belloubet.

Le président de la commission des lois Philippe Bas a lui « annoncé » à la ministre que le Sénat avait de son côté lancé une mission d’information sur l’exécution des peines.

Philippe Bas annonce la mise en place d'une mission d'information du Sénat sur l'éxecution des peines"
00:35

Au moins 10000 places de prison à la fin du quinquennat

La commission des  Lois du Sénat, toujours par la voix de Philippe Bas, a réclamé une loi de programmation de moyens pour la pénitentiaire. C’est dans le cadre appelé « plan pénitentiaire global » qu’Emmanuel Macron présentera à la fin du mois, l’objectif de création de 15 000  places de prisons d’ici la fin du quinquennat. Un chiffre qui pourrait passer à 10 000. « Je ne voudrais pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. Le Président sera en mesure de l’annoncer dans quelques semaines » a-t-elle prudemment indiqué. Comme l’avait évoqué Emmanuel Macron il y a quelques semaines devant les magistrats de la Cour de Cassation, la ministre s’est également prononcée en faveur « de peines autres que de l’emprisonnement ». « Nous savons que les très courtes peines conduisent à de la récidive et sont inutiles ».

 

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