Privatisation de la FDJ : une vente en novembre, mais encore de nombreuses inconnues

Privatisation de la FDJ : une vente en novembre, mais encore de nombreuses inconnues

Le gouvernement a toujours pour objectif de vendre dès le mois de novembre près des trois quarts de sa participation au capital de la Française des jeux. Mais le contenu de l’ordonnance, qui détaille les modalités précises de l’opération, se fait encore attendre.
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Une privatisation peut en cacher une autre. Si la cession du capital d’Aéroport de Paris détenu par l’État est suspendue depuis juin à la collecte de signatures pour l’organisation d’un référendum d’initiative partagée sur le sujet, un autre désengagement de l’État reste, lui, toujours sur les rails : celui de la Française des Jeux (FDJ). La vente de la majorité des titres publics de l’opérateur historique des jeux de grattage et de loteries, pourrait intervenir rapidement. Six mois seulement après la promulgation de la loi Pacte (croissance des entreprises), qui avait donné le coup d’envoi à ce mouvement de privatisations.

« Notre volonté est que la FDJ puisse être privatisée d'ici à la fin de l'année, sans doute avant la fin du mois de novembre », a confirmé le 1er septembre Bruno Le Maire sur Europe 1 et Cnews. Le ministre de l’Économie reste sur le même calendrier qu’il avait annoncé au début de l’été, tout en ajoutant une précaution de taille. « Sauf chute des marchés d’ici là », a précisé le locataire de Bercy. Le mois d’août agité sur les places financières mondiales, alimenté notamment par les tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine, n’y est sans doute pas étranger.

« C’est un fusil à un coup », avertit le rapporteur du Sénat

Actuellement détenteur de 72% du capital de la FDJ, l’État n’en conservera plus que 20 % à l’issue de l’opération, suffisamment pour continuer de peser un minimum au sein du conseil d’administration d’une entreprise pas comme les autres. Le produit de la vente, qui se chiffrera vraisemblablement en milliards, alimentera un fonds pour l’innovation de 10 milliards d’euros. Dit autrement, il n’est pas envisageable d’organiser la brocante en pleine déroute boursière. Qu’en sera-t-il cet automne ? « Il n’y a jamais de certitude en économie […] J’attends de voir quel sera le bénéfice pour le pays, car c’est un fusil à un coup », commente avec inquiétude le sénateur LR Jean-François Husson, l’un des anciens rapporteurs de ce projet de loi au palais du Luxembourg. « Imaginez qu’au moment où il s’apprête à vendre, le gouvernement recule. On aura perdu 18 mois ! »

Au-delà des craintes d’une mauvaise opération, le sénateur de Meurthe-et-Moselle regrette encore amèrement que l’opposition du Sénat à cette vente, n’ait pas été prise en compte par la majorité de l’Assemblée nationale. « Tout cela n’a pas été bien appréhendé du point de vue de la méthode », se remémore Jean-François Husson. « Il y a eu une absence de convergence et presque une forme de provocation. »

Cet hiver, au moment de l’examen du texte, la plupart des groupes du Sénat, des communistes aux Républicains, s’étaient opposés d’un seul bloc à la cession de la FDJ, pour une multitude de raisons. Outre les craintes « fortes » sur la lutte contre l’addiction au jeu, ou les inquiétudes sur les revenus des buralistes – véritable maillage du territoire – les sénateurs déploraient surtout une « forme d’impréparation de l’opération », devant le « peu d’éléments fournis ».

Un nouveau cadre de régulation des jeux de hasard, condition préalable à la cession des parts de l’État

La version définitive n’est pas encore arrêtée. Les conditions de la privatisation sont toujours « en cours de définition », confiait hier Bruno Le Maire. Le décret ouvrant la voie à la vente des parts détenues par l’État doit être précédé par la publication d’une ordonnance, technique, mais indispensable. Ce texte réglementaire doit refondre l’ensemble de la régulation sur les jeux, donner naissance à un gendarme unique du secteur (l’Autorité nationale des jeux) ou encore définir le pourcentage des mises qui doit revenir aux joueurs.

Le projet d’ordonnance a été transmis à la fois au Conseil d’État (pour avis) et à la Commission européenne. Bruxelles ne devrait pas s'opposer à cette cession au privé sans mise en concurrence préalable, mais pourrait toutefois faire des observations sur les modalités. L’ordonnance sera sans doute connue d'ici la fin du mois de septembre ou le début du mois d'octobre, dès son retour du Conseil d'État, nous indique le cabinet du ministre de l'Économie.

Pour le moment, tant que cette ordonnance n’est pas publiée, la vente ne peut pas avoir lieu. « Il ne saurait y avoir privatisation avant que la régulation ne soit mise en place », expliquait la PDG de la FDJ Stéphane Pellez, auditionnée le 3 juillet au Sénat, en prélude au renouvellement de son mandat. Et le volet de l’ordonnance n’est pas le seul à prendre en compte, car l’État devra aussi parallèlement gérer toutes les obligations déclaratives auprès de l’Autorité des marchés financiers. Du point de vue logistique, l'Agence des participations de l'État vient de choisir les huit banques qui conduiront la vente des titres, selon la Lettre de l'Expansion.

Des actions gratuites pour les particuliers ?

Toujours sur les conditions exactes de la vente, il reste une inconnue de taille sur l’ampleur de l’association des particuliers à l’opération. « Nous réfléchissons à des possibilités de décote sur le prix de l'action. Je souhaite que les Français y participent le plus largement possible avec, par exemple, des actions gratuites en fonction de la durée de détention de ces titres », a expliqué Bruno Le Maire, lors de l’émission Le Grand Rendez-vous. Le montant de cette tranche offerte aux particuliers fait encore l'objet de réflexions, menées avec l'appui de banques-conseils.

Sur cette idée, le sénateur Jean-François Husson se montre partagé. « Tout ce qui aide à développer la culture du risque, la culture de l’investissement, je pense que c’est bien », réagit-il. Avec un bémol. « Je ne suis pas un adepte de la gratuité. Il n’y a jamais rien de gratuit. Ce qui est annoncé est payé autrement, par d’autres. » Le parlementaire ne ferme cependant pas la porte à une formule du type « une 11e action gratuite pour 10 actions souscrites ».

Dans les points qu’il reste à préciser, se posera aussi la question de l’actionnariat salarié : de quelle manière seront-ils encouragés ? Le plancher est en tout cas connu. « La loi est claire », expliquait la PDG de la Française des jeux. L’État devra offrir au moins 10 % des parts qu’il cède (soit 5 % des titres de l’entreprise).

De nombreux points restent donc encore en suspens avant une opération en Bourse dans le courant du mois de novembre.

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