Prix du gaz et de l’électricité : que prévoit le gouvernement pour les prochains mois ?
Face à la hausse brutale des tarifs réglementés du gaz, et de l’électricité par répercussion, le gouvernement prévoit un blocage des prix. Si le dispositif doit permettre à des millions de foyers de passer l’hiver sans inquiétude, la mesure est cependant loin d’être un cadeau.

Prix du gaz et de l’électricité : que prévoit le gouvernement pour les prochains mois ?

Face à la hausse brutale des tarifs réglementés du gaz, et de l’électricité par répercussion, le gouvernement prévoit un blocage des prix. Si le dispositif doit permettre à des millions de foyers de passer l’hiver sans inquiétude, la mesure est cependant loin d’être un cadeau.
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Le gouvernement surveille la hausse des prix de l’énergie comme le lait sur le feu. La France n’est pas encore entrée dans la saison hivernale et pourtant les tarifs réglementés du gaz montent de façon inquiétante depuis le début de l’année : 57 %. Socialement explosif. Ces derniers augmentent de 12,6 % ce 1er octobre, une progression mensuelle inédite depuis novembre 2005. Le gouvernement a déjà annoncé en septembre un bonus de 100 euros pour les quelque 6 millions de ménages éligibles au chèque énergie (d’un montant moyen de 150 euros).

La flambée pour la France, qui importe 99 % du gaz qu’elle consomme, n’est pas terminée. C’est la conséquence du redémarrage mondial de l’économie et du contexte géopolitique. « On nous prévoit d’ici à la fin de l’année, 30 % à nouveau d’augmentation du prix et peut-être au début de l’année 2022 », a exposé le Premier ministre Jean Castex, le 30 septembre au 20 heures de TF1. A quelques mois des élections, l’exécutif veut éviter d’affronter un nouveau mouvement semblable à celui des Gilets Jaunes fin 2018, né de la hausse de la taxe sur les carburants.

Un lissage des prix plus qu’un gel

En réaction à la hausse des cours de l’énergie, le gouvernement dégaine un « bouclier tarifaire ». Le Premier ministre annonce un blocage, par voie réglementaire, des prix du gaz pour les cinq millions de Français qui avaient souscrit à des contrats avec tarifs réglementés, lorsque cela était encore possible. De gel, il est plutôt question de différer la hausse puisque Jean Castex parie sur une « forte baisse » des cours du gaz au printemps, à l’issue de la saison de chauffe. « Le prix du gaz devrait dégringoler donc évidemment la chute sera plus lente, puisque nous répercuterons la hausse d’aujourd’hui sur la moindre chute d’après. »

En clair, le coup de pouce hivernal sera compensé par la suite lorsque les cours repartiront à la baisse, le gouvernement lisse les prix sur une plus longue période. « Le prix d’octobre est déjà élevé et il est très probable qu’à terme les tarifs reviennent à un niveau inférieur », nous explique-t-on à Matignon. Le député écologiste Matthieu Orphelin (élu en 2017 sous l’étiquette LREM) est un des premiers à être monté au créneau hier soir. « Le bouclier tarifaire sur le gaz annoncé par le Premier ministre n’en est pas vraiment un, car il y aura des rattrapages de factures après avril. C’est un simple lissage de la hausse. »

Jean Castex donne d’ores et déjà rendez-vous en mars ou avril 2022, si jamais les baisses anticipées n’avaient pas lieu. Il n’exclut pas, dans cette hypothèse, des « mesures complémentaires », qui pourraient être des « mesures de baisse de taxes ».

Le Premier ministre a d’ailleurs exclu d’actionner le levier de la baisse de la TVA sur l’énergie, pour contenir les hausses prévues cet hiver. « Si je la ramène de 20 à 5 %, cela permettra une hausse de 15 %, au lieu de 30 %, donc ça ne suffit pas. Je préfère recourir au blocage des prix », a-t-il justifié. Ce matin, la baisse de la TVA était réclamée par des associations de consommateurs ou encore par le secrétaire général de la CGT, invité de notre antenne.

Concrètement, l’écart entre le prix payé effectivement par les abonnés et le coût réel du gaz sera absorbé par les distributeurs. « Nous sommes en liaison avec eux, pour amortir ce choc. Nous allons évidemment les aider et les accompagner », a promis le Premier ministre.

Les précédents juridiques qui ont débouché sur des rattrapages

Avec son dispositif de prix lissés sur une longue période, le gouvernement cherche à éviter les contentieux. En 2014, le Conseil d’Etat avait invalidé la limitation des hausses des tarifs d’électricité décidée par le gouvernement Ayrault. Pour couvrir les coûts de production, un rattrapage tarifaire avait dû être mis en place. La majorité précédente, sous Nicolas Sarkozy (2007-2012) avait été confrontée au même problème, mais n’en avait pas eu à gérer les conséquences Le gel des tarifs du gaz de la fin de l’année 2011 avaient donné lieu à des factures rétroactives en 2013. Le Conseil d’Etat avait donné raison à GDF Suez et ses concurrents qui contestaient la limitation des tarifs. « Sur le gaz, l’objectif du gouvernement est de couvrir l’ensemble des coûts d’Engie », indique-t-on aujourd’hui dans l’entourage du Premier ministre.

Si Engie a « pris acte » du blocage annoncé par le gouvernement, indiquant vouloir en « minimiser l’impact sur sa performance financière », les fournisseurs alternatifs affichent déjà leur scepticisme. « Ce qui me contrarie, ce sont les modalités utilisées pour bloquer ces prix, on aurait pu aussi décider de baisser la fiscalité », a réagi sur BFM Business Naïma Idir, présidente de l’Association nationale des opérateurs détaillants en énergie (ANODE), association qui regroupe les opérateurs alternatifs à Engie et EDF. « On utilisera tous les moyens, y compris contentieux », a-t-elle annoncé.

Les critiques sont aussi vives du côté de l’opposition, notamment au sein de la droite sénatoriale. « Le gouvernement propose un bouclier tarifaire pour le gaz jusqu’en avril. C’est-à-dire jusqu’aux présidentielles. Les augmentations ça sera pour après ! » note ainsi Bruno Retailleau, le président du groupe LR.

L’électricité, qui devrait subir par ricochet les conséquences de la hausse des prix du gaz, n’est pas en reste. Jean Castex a annoncé qu’il ramènerait la hausse de 12 % prévue au 1er février à 4 %, en diminuant les taxes sur l’électricité. La hausse ne serait pas totalement effacée, pour couvrir les coûts de productions. Un amendement sera déposé en ce sens dans le projet de loi de finances pour 2022, débattu cet automne. La hausse des recettes de TVA sur l’énergie devrait en partie financer ce « bouclier tarifaire » électrique mais les débats sur la fiscalité énergétique promettent cet automne d’être particulièrement importants.

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