L'homme d'affaires Ziad Takieddine a affirmé lundi au tribunal correctionnel de Paris qu'il n'avait "pas financé la campagne Balladur", revenant sur des déclarations faites au juge d'instruction en charge du volet financier de l'affaire Karachi.
"Moi, je n'ai pas financé la campagne Balladur", a asséné M. Takieddine à la barre.
Personnage clé de ce dossier, le Franco-libanais est jugé aux côtés de cinq hommes, dont trois hommes politiques, pour des soupçons de commissions occultes en marge de la campagne présidentielle malheureuse d’Édouard Balladur en 1995.
L'accusation affirme que les pots-de-vin, alors légaux, versés à des intermédiaires sur des contrats d'armement avec l'Arabie (Sawari II) et le Pakistan (Agosta) ont donné lieu à des rétrocommissions illégales qui ont alimenté les comptes de campagne de l'ancien Premier ministre.
Ce second réseau d'intermédiaire, dit "réseau K", dont faisait partie Ziad Takieddine, s'est vu promettre le versement de plus de 300 millions d'euros sur divers contrats, en a touché plus de 85, jusqu'à l'arrêt du versement des commissions, décidé par Jacques Chirac après son élection à la présidence.
A l'audience, la présidente a rappelé à Ziad Takieddine ses déclarations de juin 2013 au juge d'instruction: il avait affirmé avoir remis 6 millions de francs (moins d'un million d'euros) à son ami Thierry Gaubert, engagé dans la campagne Balladur, sur demande de Nicolas Bazire, alors directeur de la campagne Balladur, ce que les intéressés réfutent.
"Thierry Gaubert est mon ami, c'est un frère. Quand on se voit, que je lui demande +c'est vrai que vous avez un trou dans les comptes de campagne?+, cela ne veut pas dire que je vais financer la campagne", assure-t-il.
"Alors, un, je n'ai pas payé pour la campagne de M. Balladur; deux, je n'ai pas payé sur la suggestion de M. Bazire; trois, j'ai simplement donné de l'argent à M. Gaubert, ultérieurement, par amitié", dit-il.
Il rappelle à la présidente "le contexte" de ses déclarations de juin 2013 alors qu'il avait été incarcéré et était "sous pression du juge" Renaud Van Ruymbeke.
"Vous dites que la retranscription du procès-verbal est fausse?", interroge la présidente. "En tout cas, l'interprétation est totalement fausse", répond-il.
Les rétrocommissions? "Je ne sais même pas ce que ça veut dire", dira-t-il un peu plus tard. "Balourds (paiement anticipé de commissions, ndlr), rétrocommissions, ce sont des mots chouchous de M. Van Ruymbeke".