Projet de loi immigration : des mesures inspirées par le Sénat

Projet de loi immigration : des mesures inspirées par le Sénat

Gérald Darmanin et Olivier Dussopt ont dévoilé ce mercredi les grandes lignes de leur projet de loi immigration, qui suivent largement les recommandations du dernier rapport du Sénat sur l’immigration, présenté en mai dernier. 
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« Être méchants avec les méchants et gentils avec les gentils. » Voilà la philosophie du prochain projet de loi immigration qui doit être examiné début 2023 par le Parlement. Dans une interview au journal Le Monde, les ministres de l’Intérieur, Gérald Darmanin, et du Travail, Olivier Dussopt, ont présenté les grandes lignes de cette future loi censée durcir les mesures d’expulsion et améliorer l’insertion des travailleurs étrangers. Une partie des dispositions figurent déjà dans les recommandations du rapport « Services de l’État et immigration : retrouver sens et efficacité » de François-Noël Buffet, le président Les Républicains de la commission des lois du Sénat. Tour d’horizon.

Si ce dernier avait déclaré il y a une semaine ne pas connaître « la stratégie du gouvernement en matière de politique migratoire », il se dit aujourd’hui « prudent avec les formules et les punchlines » faisant référence à la formule des ministres. Il tient tout de même à souligner qu’il est important de faire en sorte que « ça se passe bien pour ceux qui respectent la loi, et non avec ceux qui ne la respectent pas ».

En effet, dans le viseur du gouvernement, les obligations de quitter le territoire français (OQTF) revenues dans le débat public avec le drame du meurtre de Lola, 12 ans. Sa meurtrière présumée est arrivée en France avec un titre de séjour étudiant qui n’était plus valable depuis trois ans, et sous le coup d’une OQTF. Cette situation est loin d’être une exception et avait déjà été pointée du doigt à de nombreuses reprises, notamment par le Sénat.

Rendre « la vie impossible » aux personnes sous OQTF

Sans surprise donc, Gérald Darmanin en a fait un axe fort de son projet de loi. Il propose ainsi aux préfets de faire un suivi des personnes sous OQTF et de « rendre leur vie impossible » : « Je demande donc aux préfectures de réaliser un suivi des personnes sous OQTF. Le préfet veillera à leur rendre la vie impossible, par exemple en s’assurant qu’elles ne bénéficient plus de prestations sociales ni de logement social. Nous changeons de braquet. »

Une demande qui étonne Jean-Pierre Sueur, sénateur PS : « [Gérald Darmanin] dit qu’il demande aux préfets de veiller à « rendre la vie des gens impossible. Mais les gens qui sont sous OQTF ne sont pas des délinquants. […] On demande à un préfet de traiter des questions, de régler des problèmes. Est-ce que vous trouvez normal que l’on demande à un préfet de rendre la vie impossible ? C’est étrange. »

Réduire les délais de recours

Par ailleurs, le texte du ministre de l’Intérieur propose de passer de douze à quatre catégories de recours afin d’exécuter plus rapidement les mesures. Dans le rapport de François-Noël Buffet, il était préconisé de les limiter à trois (une normale et deux d’urgence), “dont la mise en œuvre serait subordonnée au degré d’urgence que présente objectivement la situation de l’étranger”. 

En 2020, 125 000 OQTF avaient été prononcées pour seulement moins de 10% exécutées. Gérald Darmanin souhaite également qu’il soit rendu possible de généraliser l’organisation des audiences en vidéo et “s’il n’y a pas d’appel contre le rejet de la demande d’asile par l’Ofpra, celui-ci vaudra OQTF avec possibilité de recours sous quinze jours”. 

Création d’un titre de séjour “métier en tension”

Autre mesure : la création d’un titre de séjour “métier en tension” : “Nous souhaitons, tout particulièrement dans les métiers en tension comme ceux du bâtiment, que le travailleur immigré en situation irrégulière puisse solliciter la possibilité de rester sur le territoire sans passer par l’employeur, a expliqué Olivier Dussopt. Cela permettra d’inverser le rapport de force avec quelques employeurs qui peuvent trouver un intérêt à ce que leurs salariés soient dans une situation d’illégalité.” Une “mesure de communication” pour Jean-Pierre Sueur, rappelant que cette proposition existe déjà. Ce dernier salue cependant la mesure selon laquelle les demandeurs d’asile provenant de pays où la torture est pratiquée puissent plus facilement travailler. 

En revanche, dans les grandes lignes du texte, aucune mention des difficultés d’accès aux guichets des préfectures. En effet, depuis 2020, les files d’attente physique se sont transformées en files d’attente virtuelle avec son lot de difficultés. Ce sujet faisait partie des premières recommandations de la mission d’information en mai dernier. Interrogé, François-Noël Buffet a indiqué qu’il fallait attendre le texte final : “C’est un sujet de moyens humains aux guichets et d’outils informatiques adaptés”. 

 

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