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Projet de loi immigration : les grévistes de l’Ofpra devant le Sénat 

Alors que le Sénat vient d'adopter le projet de loi immigration, les agents de l’Ofpra entament leur deuxième journée de grève, après celle du 26 octobre. Aux revendications de réorganisation interne et de baisse des objectifs chiffrés auxquels sont tenus les agents, s’ajoutent des demandes liées au projet de loi, comme la suppression des pôles France Asile.
Mathilde Nutarelli

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Alors que, dans l’hémicycle du Sénat, les sénateurs adoptent le projet de loi « pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration », les agents de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) tiennent leur deuxième journée de grève et manifestent en face de l’entrée du Palais du Luxembourg.

Un deuxième jour de grève à l’Ofpra

Deux syndicats, sur les trois que compte l’office, ont appelé à la grève : la CGT-Ofpra et l’ASYL (Action syndicale Libre/Ofpra). Si à 15 heures, début de la manifestation devant le Sénat, les chiffres ne sont pas définitifs, il semblerait que la grève soit aussi suivie que la précédente, le 26 octobre dernier. « Nous n’avons pas encore les chiffres exacts, mais au piquet de grève devant l’Ofpra ce matin, on comptait jusqu’à 150 agents, soit un chiffre similaire à celui du 26 octobre, ce qui représente un quart des personnels de l’Office », explique à Public Sénat Anouk Lerais, co-secrétaire générale de la CGT-Ofpra.

« Vu que la loi nous paraît dangereuse pour l’asile, il fallait qu’on se positionne dessus »

Si, au départ, les revendications des grévistes de l’Ofpra ne concernaient pas le projet de loi immigration, il s’y est naturellement invité, et ce d’autant plus après son passage au Sénat. Pour rappel, ce texte qui se veut « gentil avec les gentils et méchant avec les méchants », selon l’expression du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, a été durci par la majorité de droite et du centre du Sénat, avec des ajouts comme la suppression de l’AME ou la suppression de l’article visant à régulariser les travailleurs sans-papiers des métiers en tension, au profit d’une régularisation au cas par cas à la main du préfet. « Au départ, le projet de loi n’était pas contenu dans les revendications, mais vu le timing et vu que la loi nous paraît dangereuse pour l’asile, il fallait qu’on se positionne dessus », explique Henry de Bonnaventure, un des responsables de l’ASYL.

« On ne peut pas imaginer que ça devienne encore pire »

Parmi les dispositions adoptées par le Sénat dans le projet de loi immigration, plusieurs sont donc dénoncées par les salariés mobilisés de l’Ofpra, comme la création de pôles France Asile réunissant les services du préfet et de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii), qui organise l’accueil des demandeurs d’asile et des réfugiés en France, à ceux de l’Ofpra. D’après les grévistes, cette mesure serait susceptible de réduire l’indépendance de l’Office, pourtant inscrite dans la loi, et de le soumettre à une pression plus forte pour accélérer l’instruction des demandes.

Ils s’opposent aussi à la généralisation des audiences à un juge unique au sein de la Cour nationale du droit d’asile (CNDA), adoptée par les sénateurs au prétexte de l’accélération des procédures. Anouk Lerais explique également que les salariés mobilisés se montrent « inquiets » de la suppression de l’AME, qui risquerait de « précariser un public qui vit déjà dans une situation précaire ». « On ne peut pas imaginer que ça devienne encore pire », se désole-t-elle.

La faiblesse du volet « intégration » du projet de loi est également pointée du doigt. L’Ofpra, qui remplit le rôle de « mairie des réfugiés » en leur permettant d’obtenir des actes administratifs, doit composer avec de trop faibles effectifs et des délais d’obtention des documents trop longs, selon les grévistes. Une illustration de « l’hypocrisie du projet de loi », pour la co-secrétaire générale de la CGT-Ofpra.

Quelques victoires

Depuis leur première journée de mobilisation, les grévistes ont néanmoins obtenu la satisfaction de certaines de leurs revendications par leur direction, notamment des mesures de réorganisation interne. « C’est dommage qu’il ait fallu faire la grève pour obtenir ces mouvements-là », regrette Henry de Bonnaventure.

Ils continuent cependant à se mobiliser pour obtenir plusieurs changements structurels, dont la baisse des objectifs chiffrés de traitement des demandes pour tous les agents et davantage de recrutements dans les services administratifs et à la protection.

 

 

Par Ella Couet et Mathilde Nutarelli

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