Invités à débattre du budget 2025 sur Parlement hebdo, le rapporteur LR de la commission des finances du Sénat, Jean-François Husson, et le député PS Arthur Delaporte, s’opposent sur le sujet. « Il faudra bien faire des efforts », défend le sénateur LR, quand le socialiste dénonce « un effort incommensurable ».
Que contient le projet de loi réforme de la justice ?
Par Public Sénat avec l'AFP
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« Construire une justice plus simple, plus efficace, plus accessible au bénéfice des justiciables ». Telle est l’ambition du projet de loi de programmation et de réforme de la justice présenté en Conseil des ministres, ce vendredi, par Nicole Belloubet.
« L'état de nos juridictions et de nos prisons ne répond pas aux attentes des citoyens », constate la garde des Sceaux dans l'exposé des motifs du texte qui comporte une soixantaine d’articles. Il faut donc « rétablir la confiance de nos concitoyens dans notre justice », « rendre plus effectives les décisions des magistrats ».
8,3 milliards en 2022 pour le budget de la justice
Le budget de la justice devrait considérablement augmenter, pour passer de 6,7 milliards d'euros en 2017 à 8,3 milliards en 2022, dont une grande partie sera destinée aux prisons. Au total 6.500 d'emplois devront être créés en cinq ans. Mais selon l'Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire), ce chiffre inclut la création de « seulement » 400 postes de magistrats et environ 180 fonctionnaires de greffe.
La justice est « embolisée » pour Philippe Bas
La semaine dernière, avocats, magistrats, greffiers manifestaient pour dénoncer la fin de la justice de proximité. (voir notre article). Le président LR de la commission des lois du Sénat, Philippe Bas, avait lui qualifié la justice « d’embolisée ». « Le problème de la justice, c’est d’abord un problème de moyens. Il y a 900 postes de greffiers vacants, 500 postes de magistrats vacants. Pour le sénateur, la réorganisation de la justice doit se faire « à la condition que les emplois vacants soient tous pourvus préalablement ».
Ce vendredi, dans un communiqué commun, l'USM et le SM (syndicat de la magistrature), l'Unsa Services judiciaires, la CGT Chancellerie dénoncent un « démantèlement de la justice au bénéfice d'économies de bouts de chandelle ».
« En dessous d’un mois, les peines d’emprisonnement sont interdites »
Comme l’avait annoncé Emmanuel Macron, en mars, une profonde réforme du système des peines est prévue pour tenter de répondre à une surpopulation carcérale chronique. Le nombre de détenus a atteint au 1er avril un nouveau record (70.367 personnes incarcérées). « En dessous d’un mois, les peines d’emprisonnement sont interdites » et « entre un et six mois, la peine s’exécute en milieu ouvert » précise le dossier de presse.
L'objectif n'est plus de 15.000 nouvelles places de prison comme promis pendant la campagne électorale, mais de 7.000 places d'ici 2022.
Création d’un tribunal criminel départemental
Autre grande annonce très contestée par les professionnels du droit : l'expérimentation d'un tribunal criminel départemental. À mi-chemin entre cour d'assises et tribunal correctionnel, il jugera des crimes allant jusqu'à 20 ans de réclusion. Il sera composé de magistrats uniquement et non de jurés populaires. Environ 57% des affaires actuellement jugées aux assises (sur un total de 2.000) seront concernées.
Parquet national antiterroriste : le gouvernement « prolonge » sa « réflexion »
À noter que la création d’un parquet national antiterroriste ne figure plus dans le projet de réforme de la justice, le gouvernement a décidé de « prolonger » sa « réflexion », a annoncé vendredi la garde des Sceaux Nicole Belloubet.
Lors de l'examen du projet de loi, le Conseil d'État « a fait valoir un certain nombre d'observations » et mis en avant « une certaine rigidité » d'un parquet exclusivement dédié à l'antiterrorisme, a déclaré la ministre lors d'un point de presse après la présentation de son projet de réforme de la justice en Conseil des ministres.
Fusion des tribunaux d'instance (TI) et de grande instance (TGI)
La réforme la plus contestée reste la fusion des tribunaux d'instance (TI) et de grande instance (TGI). Les TI sont des lieux de justice de proximité, où sont jugées les affaires civiles (surendettement, loyers impayés, tutelles, etc.) pour lesquelles la demande porte sur des sommes inférieures à 10.000 euros.
La ministre a affirmé vendredi que cette fusion « ne changera rien » pour le justiciable et a répété qu'aucun tribunal ne serait fermé. Des arguments qui n'ont pas convaincu les opposants au projet de loi. À l’image de Céline Parisot, membre de l'USM. « On écarte les justiciables des tribunaux. Un des gros points noirs de la réforme est l'accès au juge » a-t-elle expliqué à l’AFP.
Pour les divorces par exemple, la phase de conciliation obligatoire (« qui ne conciliait pas grand-chose » a estimé Nicole Belloubet) est supprimée. Quant à la révision des pensions alimentaires, elle sera réalisée par les directeurs des CAF et non par un juge.
Dépôt de plainte en ligne
Au civil encore: une procédure entièrement dématérialisée sans audience pourra se tenir pour certains litiges.
Au pénal, comme évoqué, il y a quelques semaines (voir notre article) l'usage de stupéfiants pourra être puni d'une amende forfaitaire de 300 euros.
Les victimes pourront également déposer plainte en ligne ou se constituer partie civile. « On sait que des victimes de viols n’osent pas toujours se rendre à la gendarmerie ou au commissariat. La plainte sera déposée en ligne et un rendez-vous leur sera donné pour que la plainte prospère » a détaillé la ministre.