Elle était née dans la douleur l’an dernier après l’absence d’un consensus entre partenaires sociaux, rendu difficile par un cadre de négociation très strict, imposé par le gouvernement. La réforme de l’assurance chômage est suspendue dans son application, depuis l’irruption de la crise sanitaire. Mais jusqu’à quand ? En janvier, le gouvernement, les organisations syndicales et les organisations patronales doivent se retrouver autour d’une même table pour un nouveau cycle de concertations. Critiquant la philosophie de la réforme, Laurent Berger, le secrétaire général de la CFDT, a demandé au gouvernement de « repartir d’une feuille blanche ». « L’intelligence, c’est de s’adapter à la réalité », a-t-il expliqué ce 14 décembre, dans l’émission Audition publique, sur Public Sénat et LCP-AN en partenariat avec Le Figaro Live.
Le leader syndical estime que le contexte a profondément changé depuis les premières discussions sur cette réforme, dont les dispositions prises par décret devaient entrer en application de manière progressive. « Cette réforme, lorsqu’elle est apparue en 2019, la CFDT avait été extrêmement claire. Elle disait que c’était une réforme injuste. Aujourd’hui, je dis que c’était une réforme injuste et inadaptée », a insisté Laurent Berger. Seuil de rechargement des droits, bonus-malus en fonction du recours au CDD, réforme du mode de calcul de l’indemnisation pénalisant les personnes alternant les contrats courts et périodes d’inactivité, dégressivité progressive des allocations pour les plus hauts salaires : la réforme prévoyait de nombreuses pistes d’économies pour améliorer les comptes de l’Unédic et inciter au retour à l’emploi.
La dégradation brutale du marché de l’emploi, avec la crise économique et l’arrêt forcé de pans entiers de l’économie auront raison de la réforme, selon lui, face à l’envolée attendue du taux de chômage. « On va être à 10 % – et je n’espère pas plus – dans les mois à venir », a redouté Laurent Berger. « Il est hors de question d’avoir une logique de réforme d’assurance chômage qui soit totalement punitive pour les demandeurs d’emploi, qui laisse croire qu’ils profiteraient du système », s’est-il indigné.
« Pas de voie de passage » pour relancer la réforme des retraites
A l’approche des rendez-vous de janvier, la CFDT veut notamment « empêcher le gouvernement de faire un certain nombre de projets sur la table », comme le retour de l’allongement de 4 à 6 mois de la période minimale d’emploi sur les deux dernières années pour prétendre à une allocation.
Quant à la réforme des retraites, engagée au Parlement avant le premier confinement, Laurent Berger n’envisage pas un seul instant son retour dans l’agenda social et politique. « Clairement, il n’y a pas de voie de passage pour le faire », a-t-il observé. Le temps manque, et surtout, la conjonction des crises – sanitaires, économiques et sociales – rendrait le débat totalement impossible. « Si on veut mettre le feu, on fait une réforme paramétrique des retraites », a-t-il mis en garde.