Gérard Larcher renoue avec les vœux aux parlementaires. Pour la première fois depuis janvier 2020, le président du Sénat a convié l’ensemble des sénateurs, ainsi que son homologue de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet, mais aussi quelques représentants du gouvernement, dont Élisabeth Borne. L’occasion pour le troisième personnage de l’État de dresser quelques commentaires politiques sur l’année qui s’ouvre.
Après une année « difficile », marquée par des « bouleversements géopolitiques, politiques et économiques », « la France de janvier 2023 est une France qui s’interroge, qui doute parfois », sent le président du Sénat. La formule est moins négative qu’il y a trois ans, lorsque Gérard Larcher parlait d’une France « en souffrance ».
« Redonner de l’espérance »
Cette France « qui doute » va notamment avoir les yeux rivés sur les débats parlementaires le mois prochain. « Il y a les réformes qui se profilent, personnellement je les juge nécessaires, même si certaines susciteront des mobilisations sociales et des débats passionnés », anticipe le président du Sénat. L’ancien ministre du Travail, rompu au dialogue social, fait notamment référence à la réforme des retraites. Devant Élisabeth Borne, le premier des sénateurs a indiqué que le projet du gouvernement ne lui paraissait « pas très éloigné » de ce que proposait « avec constance » le Sénat depuis quatre ans.
À lire aussi » Retraite à 64 ans : comment le gouvernement a rejeté pendant plusieurs années l’amendement du Sénat
Gérard Larcher a formulé quelques recommandations, en amont de l’examen au Parlement. « Je souhaite un débat qui aille au fond de ce qui est un des piliers de notre modèle social. Il nous faudra échapper aux postures et aux blocages, pour répondre aux inquiétudes et aux questions – et elles sont nombreuses – de nos concitoyens », a-t-il formé le vœu.
Appelant à « redonner de l’espérance » et « reconstruire une relation de confiance avec les Français », le président du Sénat a également cité plusieurs réformes à engager « sans tarder » : sur le système de santé, l’école mais aussi la « maîtrise de notre dépense publique ». L’occasion de rappeler que le Sénat a « fait entendre sa voix » lors de l’examen des lois de finances, même s’il aurait pu être « mieux écouté », selon lui. La Haute assemblée a également « imprimé sa marque » sur le projet de loi de programmation des finances publiques, « au point qu’il est d’ailleurs toujours en examen », a exhumé le président du Sénat. Ce projet de loi, dont l’examen a débuté en septembre, est toujours bloqué en pleine navette parlementaire, après un rejet à l’Assemblée, une modification importante au Sénat, et un échec en commission mixte paritaire.
À lire aussi » Programmation budgétaire 2023-2027 : l’exécutif et la droite sénatoriale actent leur désaccord sur la réduction des déficits
« Le Parlement n’est pas une ZAD »
Dans une forme de service après-vente de la « nouvelle méthode » promise par Matignon, Gérard Larcher a appelé les différents groupes au dialogue. « La majorité doit être attentive, respectueuse des différences et l’opposition doit être – certes – sans complaisance, mais responsable. » Et de rappeler le pôle de « stabilité » que constitue le Sénat dans les institutions. « Non, je vous le dis à tous, mais vous en êtes tous persuadés, le Parlement n’est pas une ZAD ! […] Il peut parfois être un lieu de débats passionnés mais il doit aussi être le lieu du discernement et de la raison ! »
D’institutions, il en a également été question avec une piqûre de rappel sur la réforme constitutionnelle. Promesse de campagne d’Emmanuel Macron, celle-ci doit être précédée d’une commission « transpartisane » qui doit démarrer dans le courant du premier trimestre. « Nous y sommes prêts. Nous avons déjà travaillé, nous continuons à le faire », a rappelé Gérard Larcher, face à la perspective de la relance de ce chantier. Avec toutefois un avertissement maintes fois répété ces dernières années par l’ancien maire de Rambouillet : « Attention à la juste représentation des territoires et au respect de nos équilibres constitutionnels ».
Appel à une « grande loi de décentralisation »
Dans cette chambre des collectivités territoriales, Gérard Larcher ne pouvait pas non plus faire l’impasse sur l’avenir de la décentralisation. « Il est temps d’écrire cette grande loi de décentralisation et de libertés locales », a-t-il pressé. Cet automne, Emmanuel Macron a communiqué à plusieurs reprises sur sa volonté d’ouvrir un « nouveau chapitre de la décentralisation », afin de « redonner aux acteurs de terrain la liberté de décider ».
Un an après l’adoption d’un texte timide sur les collectivités locales (3DS pour différenciation, décentralisation, déconcentration et simplification de l’action publique), Gérard Larcher a appelé à plus d’audace. « C’est à une nouvelle architecture de la responsabilité et de la décision que j’appelle […] Il faut en quelque sorte se « refonder », il faut oser tout simplement ! » Un nouveau groupe de travail au Sénat, sur cette question des libertés locales, a d’ailleurs été installé le 5 octobre. Ses conclusions seront connues au printemps.