Réforme du Parlement : une « course à l’échalote » entre le Sénat et l’Assemblée ?

Réforme du Parlement : une « course à l’échalote » entre le Sénat et l’Assemblée ?

Alors que le premier volet d’un plan d’économies est à l’étude à l’Assemblée nationale, le Sénat se prépare lui aussi à se réformer. Philippe Dallier, sénateur de la Seine-Saint-Denis et vice-président de la Haute assemblée, confie à publicsenat.fr qu’une réflexion est en cours et qu’une décision devrait être prise en décembre, pour une entrée en vigueur au 1er janvier 2018.
Public Sénat

Par Alice Bardo (sujet vidéo : Stéphane Hamalian)

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Hier, le Journal du dimanche présentait la série de mesures envisagées par Florian Bachelier, premier questeur de l’Assemblée nationale, dans le cadre du plan d’économies qui se prépare au sein de la chambre basse. « Pour la première fois, nous allons donner un cap de réduction du budget de l’Assemblée », se réjouit le député LREM. Une position qui tranche avec celle de son président, François de Rugy, pour qui « le Parlement français n’est pas surdoté ».

« À un moment, il va falloir s’arrêter »

« Je ne suis pas certain que le premier questeur et de Rugy soient sur la même longueur d’onde », remarque également Philippe Dallier, qui rejoint plutôt la position du président du Palais Bourbon sur ce point. Le vice-président du Sénat souligne notamment que « cela fait cinq ans que le budget du Parlement est figé ». Alors quand Florian Bachelier recommande la fin de la gratuité du train pour les anciens députés, l’alignement du statut des députés sur le droit commun s’agissant des retraites et des allocations-chômage, ou encore la suppression des privilèges des anciens présidents de l’Assemblée, le vice-président du Sénat il considère qu’ « à un moment, il va falloir s’arrêter ». Car même s’il assure qu’ « il n’y a pas de raison pour que les parlementaires soient dispensés de faire des économies » quand tous les Français participent à l’effort budgétaire, il y voit là une « course à l’échalote entre les deux chambres ».

Il faut en effet rappeler que le Sénat a changé son règlement intérieur en 2015, pour y intégrer des mesures destinées à encadrer l’utilisation de l’indemnité représentative de frais de mandat (IRFM), à introduire la possibilité de sanctionner financièrement l’absentéisme des sénateurs, ou encore la réduction du temps de parole en séance ainsi que l’expérimentation de la possibilité de légiférer directement en commission pour certains textes. Cette dernière mesure a d’ailleurs inspiré François de Rugy, qui propose désormais la même chose pour l’Assemblée.

« Le Sénat a déjà fait des progrès »

Philippe Dallier souligne également que certaines des pistes de réforme émanant du Palais Bourbon sont déjà d’actualité au Sénat. Ainsi lorsque Florian Bachelier préconise l’utilisation de tablettes numériques pour remplacer le support papier des textes de loi, le sénateur souligne que « le Sénat a déjà fait des progrès en termes de réduction du volume de papier » : « Beaucoup de parlementaires utilisent des tablettes en séance. Il y a même une application très bien faite pour suivre en direct l’adoption des amendements.  »

Privilégier « l’efficacité du travail parlementaire »

Parmi les autres propositions de François de Rugy : la réduction du temps législatif au sein de l’Assemblée à trois mois et la limitation de la navette parlementaire à une lecture par chambre. Des propositions qui font penser Philippe Dallier à « la démocratie à mi-temps » que fustigeait Philippe Seguin. L’ancien président de l’Assemblée avait en effet élargi le temps de questionnement au sein de la chambre basse. « Faire et défaire c’est toujours travailler dirons certains » ironise Philippe Dallier. D’après le sénateur, « légiférer dans l’urgence n’est pas la meilleure des solutions » et « l’efficacité du travail parlementaire » doit rester une priorité. Alors au « faire vite et travailler mieux » du président de l’Assemblée nationale, Philippe Dallier préfère « conserver un temps d’examen raisonnable ». « C’est plus le nombre de textes présentés que la durée d’examen de ceux-ci qui pose problème », poursuit-il. Et d’ajouter : « Cela concerne d’abord le gouvernement. » L’essentiel est donc de « se donner le temps de la réflexion », d’où la nécessité de maintenir la navette parlementaire à deux lectures par chambre.

Les deux chambres devront donc trancher entre « course à l’échalote » et nécessité pour les deux chambres de se coordonner. « Ce type de mesure ne peut pas concerner une chambre sans concerner l’autre », rappelle Philippe Dallier, qui tient toutefois à rassurer : « Ce que j’ai lu sur la mécanique les choses me semble aller dans le même sens. »

 

 

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