Régionales : le Sénat vote pour l’organisation du scrutin les 20 et 27 juin
Le Sénat s’est prononcé en faveur du maintien des élections départementales et régionales en juin, lors d’un débat au nom de l’article 50-1 de la Constitution. Le premier ministre Jean Castex a présenté le protocole renforcé, qui permettra d’organiser ce scrutin. La fin d’une polémique qui dure depuis des mois.
C’est un « oui » du Sénat. Après les députés hier, les sénateurs ont voté par 319 voix contre 8, et 15 abstentions, en faveur du maintien des élections régionales et départementales en juin prochain, après un débat, suivi d’un vote consultatif, au nom de l’article 50-1 de la Constitution. Des élections finalement repoussées d’une semaine. Le premier et le second tour se tiendront les 20 et 27 juin prochains. « Une semaine de plus, cela représente entre deux et trois millions d’électeurs vaccinés supplémentaires » a souligné le premier ministre, Jean Castex (voir notre article sur son intervention).
Un premier ministre venu « solliciter l’approbation de la Haute assemblée sur la stratégie » mise en place pour les élections et « son mode opératoire, et aussi vous proposer de vous associer au plus près à sa mise en œuvre ». Un comité de suivi, qui rassemblera les partis et associations d’élus, sera à cet effet mis en place. Pour l’exécutif, l’enjeu est aussi d’éviter le psychodrame de l’organisation des municipales en 2020, où la droite et le gouvernement s’étaient renvoyés la balle quant à la responsabilité du maintien, malgré le covid-19.
La petite musique d’un éventuel report
Si les élections, déjà repoussées de mars à juin, sont bien maintenues en juin, reste que la petite musique d’un éventuel report s’est fait entendre plusieurs fois, depuis des mois, comme en janvier dernier, après « les révélations » de Jean-Louis Debré, a rappelé François-Noël Buffet, président LR de la commission des lois. L’ancien président du Conseil constitutionnel affirmait que l’exécutif « avait un souhait, reporter les régionales après l’élection présidentielle ». Avec Xavier Bertrand, candidat aux régionales et à la présidentielle, certains ont prêté à l’exécutif l’intention de vouloir entraver sa course élyséenne. La consultation surprise des maires par le gouvernement, vendredi dernier, a relancé ces suspicions de report, une dernière fois. Mais 56 % des élus ont répondu qu’ils étaient pour le maintien, 40 % pour le report.
Les élections sont finalement bien maintenues en juin, mais avec un maximum de garanties sanitaires : double procuration, campagne numérique, spots télé sur France 3 région – mesure proposée à l’origine par le Sénat – vaccination pour les membres des bureaux de vote ou, à défaut, des tests, ou encore possibilité de voter à l’extérieur. Il n’y a plus qu’à espérer qu’il fasse beau, et, surtout, de meilleurs jours sur le front de l’épidémie.
« La quasi-totalité de ce que nous avons proposée (pour l’organisation du scrutin) a été reprise » salue François-Noël Buffet
Si les sénateurs ont très largement approuvé le maintien du scrutin en juin, ils n’ont pas caché leurs critiques. François-Noël Buffet a rappelé « les doutes » qui ont émaillé la vie démocratique depuis un an, face au covid-19. Il salue cependant le fait qu’aujourd’hui, « la quasi-totalité de ce que nous avons proposée (pour l’organisation du scrutin) a été reprise » (voir vidéo ci-dessous).
Régionales: l'intervention de François Noël Buffet lors du débat au Sénat
12:02
Si les sénateurs LR ont voté pour, « pour nous, ce ne s’est pas forcément un vote d’approbation, car nous avons déjà voté pour la loi du 22 février » sur le report de mars à juin.
« Cette consultation des maires était pour contourner l’avis des corps intermédiaires, favorables au maintien » dénonce Olivier Henno
Les sénateurs se sont surtout relayés pour s’étonner de la consultation des maires du week-end dernier. « Pourquoi cette consultation ? Y a-t-il les germes d’un nouveau report à beaucoup plus loin ? » s’est interrogé le président de la commission des lois, « et bien non ». « Qu’attendiez-vous de la réponse des maires ? Qu’elle vous offre un prétexte pour repousser les élections ? » demande à son tour Guillaume Gontard, président du groupe écologiste, dont le « caractère quelque peu expéditif de cette consultation laisse perplexe. On a le sentiment qu’elle est sortie de votre chapeau quelques heures avant son lancement ». Il salue cependant « une légère amélioration » sur le plan de la consultation du Parlement, « ce quatrième débat 50-1 en six mois étant de loin le moins inutile de tous, moins que la mascarade d’il y a quinze jours » sur les mesures sanitaires (voir vidéo ci-dessous).
Report des élections régionales: intervention de Guillaume Gontard
08:31
Même doute de la part du centriste Olivier Henno. « J’ai la faiblesse de penser que cette consultation était pour contourner l’avis des corps intermédiaires, partis et associations d’élus, favorables au maintien. J’ai la faiblesse de penser que depuis le 13 juin 2020, on souhaite un report des élections locales après la présidentielle. Et avec cette consultation, caramba ! C’est encore raté » lance le sénateur. « Personne ne peut se défausser de sa responsabilité » ajoute de son côté la sénatrice PCF de l’Allier, Cécile Cukierman, elle-même candidate aux régionales. Elle appelle au passage le gouvernement à consulter les maires aussi lors « des évolutions des protocoles sanitaires dans les écoles ».
Le socialiste Eric Kerrouche dénonce un « inexplicable manque d’anticipation »
« Cette consultation tardive était orientée » pense le sénateur PS, Eric Kerrouche, qui file la métaphore. « Il y a eu la phase Y a-t-il un pilote dans l’avion ? sur les municipales », « puis La grande illusion avec le vote en février d’un report sec », et « dernier épisode, La vérité si je mens, avec le poker menteur sur le maintien des élections en juin », raille l’élu des Landes (voir vidéo ci-dessous). Eric Kerrouche ajoute :
Depuis un an, la question électorale en France relève d’un autre film : celle d’Une histoire sans fin.
Mais la situation ne le fait pas rire. Car « selon le classement de The Economist, notre pays a été classé dans la catégorie des « démocraties défaillantes ». Il était temps de maintenir ces élections ». Surtout, il dénonce un « inexplicable manque d’anticipation » du gouvernement sur ce scrutin, car « beaucoup de choses auraient pu et dû être préparées plus tôt pour concilier l’exigence démocratique et sanitaire ».
Report des régionales: Intervention d'Eric Kerrouche
12:01
Jean-Claude Requier, président du groupe RDSE, qui note que « le report d’une semaine du scrutin coïncidera avec le départ du Tour de France », soulève « la question de l’égal accès de nos concitoyens à Internet », alors que la campagne en ligne sera privilégiée. Il craint au final une « abstention massive de nos concitoyens » lors du scrutin.
« J’entends parler de manque de dialogue, pourtant, le Parlement n’a jamais été autant consulté » souligne François Patriat
« Le décalage d’une semaine nous paraît à la fois donner un peu plus de temps aux deux campagnes, vaccinale d’une part et électorale de l’autre, pour déployer leurs effets » salue Vanina Paoli-Gagin, sénatrice rattachée au groupe Les Indépendants (voir vidéo ci-dessous).
Report des régionales: Intervention de Vanina Paoli-Gagin
07:42
François Patriat, président du groupe RDPI (LREM), ne s’est pas fait prier pour relever la contradiction des oppositions, qui demandent à être écoutées depuis des mois. « J’entends parler de manque de concertation, de dialogue, de verticalité. Pourtant, le Parlement n’a jamais été autant consulté » souligne le sénateur LREM de la Côte-d’Or. Il défend évidemment la consultation. « Sans aucune intervention de ma part, mon département a voté majoritairement pour le report » relève François Patriat, qui s’était prononcé en octobre pour le report des régionales après 2022, « mais je sais en revanche qu’un grand nombre d’élus ont fait pression contre le report ». « J’entends bien tous les arguments pour le maintien » ajoute François Patriat, « la démocratie doit être respectée ».
« Consulter les maires serait une manipulation, une manœuvre. Pas du tout. Je revendique cette consultation » affirme Jean Castex
Jean Castex a tenté, tant bien que mal, de convaincre les sénateurs du bien-fondé du sondage grandeur nature des maires. « Cette initiative en a étonné certains. Je voudrais vous dire que je trouve étonnant, précisément, que l’on puisse s’étonner d’une telle consultation », a affirmé l’ancien maire de Prades, devant un hémicycle réagissant bruyamment.
« Consulter les maires serait une manipulation, une manœuvre. Pas du tout. Je revendique cette consultation, me prêter l’idée qu’elle conduisit à un résultat de report, c’est inexact », « il n’y avait pas d’arrière-pensées » a-t-il insisté. « Certes, c’est à l’Etat qu’il appartient de prendre in fine les décisions » a encore ajouté le premier ministre, « et ce n’est pas parce que nous débattons, que je consulte les maires ou les corps intermédiaires, que je fuis mes responsabilités ». Il faudra maintenant voir si les électeurs se tourneront vers les urnes.
Après la nomination de François Bayrou à Matignon, tout le monde, au sein du bloc central, salue la décision d’Emmanuel Macron. Mais hors micro, on comprend que le président du Modem n’a pas que des soutiens au sein de l’ex-majorité présidentielle. Pour durer, il devra aussi savoir convaincre son propre camp.
La présidente des députés RN attend de voir comment se construit le futur budget avant de se positionner vis-à-vis du prochain gouvernement de François Bayrou. Assurant de pas avoir pris d’engagement, elle « ne renonce pas » à l’outil de la motion de censure.
Après l’annonce de la nomination de François Bayrou à Matignon, les sénateurs LR du Sénat sont dans l’expectative. La participation de la droite au prochain gouvernement, dépendra de l’engagement du Premier ministre sur les priorités qu’il a fixé notamment sur la maîtrise de l’immigration et bien sûr du maintien en poste du ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau.
Emmanuel Macron vient de nommer François Bayrou Premier ministre. Le président du MoDem devient ainsi le premier centriste de la Vème République à accéder à Matignon, il doit désormais composer son gouvernement et se protéger du risque de censure. Allié fidèle mais critique d’Emmanuel Macron, il devra réussir à parler aussi bien aux socialistes qu’à la droite. Analyse sur le plateau de Public Sénat.