Régionales : santé, sécurité, désertification, alliances… Ce qu’il faut retenir du débat organisé en Centre Val-de-Loire

Régionales : santé, sécurité, désertification, alliances… Ce qu’il faut retenir du débat organisé en Centre Val-de-Loire

Lors d’un débat organisé par Public Sénat et TV Tours, les candidats aux élections régionales des 20 et 27 juin se sont affrontés durant plus d’une heure et demie. Si le RN est en tête des sondages, l’issue du scrutin est incertaine et les éventuelles alliances pourraient permettre au président socialiste sortant, François Bonneau, de conserver sa place.
Public Sénat

Par Pierre Maurer

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La région Centre Val-de-Loire va-t-elle tomber aux mains du Rassemblement national ? Moins médiatisée que la tumultueuse région PACA, où le RN a les plus grandes chances de l’emporter, le Centre Val-de-Loire voit son « Bardella local », le candidat du RN Aleksandar Nikolic, caracoler en tête des sondages. Jeudi soir, ses adversaires ont eu l’occasion de se confronter au jeune protégé de Marine Le Pen lors d’un débat organisé par Public Sénat et TV Tours.

Tour de table. Chacun présente à grands traits son projet. L’écologiste Charles Fournier, vice-président de la région à la Transition écologique débute et plaide pour une « démocratie qui associe les citoyens ». Aleksandar Nikolic dénonce d’emblée la « gestion à la petite semaine » du président socialiste sortant et veut « changer le quotidien des habitants » : payer moins cher le carburant, assurer la sécurité, déployer des camions de « santé mobiles ». François Bonneau, lui, martèle sa volonté de faire le « rassemblement » pour les « défis sociaux et environnementaux ». Vient le tour de Marc Fesneau, le ministre chargé des relations avec le Parlement, dépêché par la majorité présidentielle pour tenter de s’emparer de la région. Ce cadre du Modem défend la région comme « acteur central » des mobilités, des grandes transitions. Lui aussi prône le « rassemblement et le dépassement politique ». Nicolas Forissier, le chef de files des Républicains conclut la séquence en tapant sur le bilan de la gauche au pouvoir « depuis 23 ans » et veut « repartir des territoires » en « simplifiant » les démarches.

Leonard de Vinci sème la discorde

Economie, santé, sécurité, territoires… pendant plus d’une heure et demie, les adversaires s’affrontent la plupart du temps dans la cordialité, lézardée par quelques hausses de ton. La première intervient sur le volet économique : le candidat du RN propose de créer un parc d’attractions en l’honneur de Léonard de Vinci, qui a terminé sa vie à Amboise, et espère ainsi générer des emplois. « On ne crée pas des dizaines de milliers d’emplois en créant un parc d’attractions ! On a besoin d’une politique économique sur l’ensemble du territoire ! Nous ne sommes pas une réserve d’Indiens Monsieur Nikolic ! », s’emporte Marc Fesneau. « Caricature ! », objecte Nikolic. L’occasion d’une courte union sacrée pour ses adversaires. « Le tourisme est en développement complet et non avec un parc dans lequel on enfermerait Leonard de Vinci ! », enfonce François Bonneau.

Union rapidement rompue quand Nicolas Forissier attaque le socialiste sur son bilan et ses supposées manœuvres de séduction auprès des chefs d’entreprise. « Ça vous gêne que les entreprises me soutiennent ! », rétorque François Bonneau. Une courte vidéo de la candidate de Lutte ouvrière absente du plateau, Farida Megdoud, complète le tableau, s’adressant peu ou prou à l’ensemble des candidats : « Comment pouvez-vous prétendre défendre l’intérêt des classes populaires ? Vous arrosez les grands groupes capitalistes ! C’est scandaleux. »

Sécurité : « On sent la course à l’échalote »

Le débat se déporte sur la sécurité, thème phare du candidat RN. Elle a beau ne pas être une compétence de la région, tous veulent en faire plus, dans les transports et les établissements scolaires notamment. Seul l’écologiste Charles Fournier s’inscrit en faux contre le discours sécuritaire. « On sent la course à l’échalote », observe-t-il. François Bonneau, lui, demande « plus de moyens consacrés » pour lutter contre les violences « faites aux femmes et aux enfants ». Il assure avoir créé « 170 postes » d’agents dans les établissements scolaires. « C’est n’importe quoi ! », tonne Nicolas Forissier, qui veut lui faire « 100 % de ce qui est possible dans ce domaine » et nommer un vice-président de région à la sécurité, en l’espèce le « général Lizurey ».

Marc Fesneau veut, lui, « un plan de vidéosurveillance dans les transports et les établissements scolaires ». Les propositions du candidat RN étonnent : Aleksandar Nikolic veut « réquisitionner des gendarmes réservistes pour les transports. » « Les agressions arrivent. Il n’y a pas zéro cas monsieur ! », lance-t-il à l’écolo Charles Fournier. Dans les lycées, ce serait des « unités d’intervention et de prévention » de 20 à 30 fonctionnaires. Charles Fournier et François Bonneau se font un malin plaisir à tenter de le prendre à défaut sur les chiffres.

Déficit de médecins

Puis la discussion se focalise sur la « désertification médicale ». En Centre Val-de-Loire, la santé est la première préoccupation des électeurs selon les enquêtes d’opinion. « On est devenus la région où il y a le moins de médecins par habitant. On va nous dire que c’est la faute de l’Etat ! Je considère qu’on doit prendre ce sujet à bras-le-corps ! », attaque le LR Nicolas Forissier qui veut recruter des médecins et faire « un travail de dentelle ». François Bonneau défend alors son bilan. Il avait promis de recruter 300 médecins salariés, seul 10 sont arrivés. « J’avais dit que nous construirons 100 maisons de santé, on en a construit 107. On est passé de 45 à 110 kinés, les aides-soignantes disposent de formations partout sur le territoire. C’est la première des régions sur les maisons de santé. Je veux créer 330 médecins salariés dans les centres de santé », promet-il. Marc Fesneau intervient : « Dire 300 c’est facile, mais manifestement on a du mal à en trouver plus de 10. L’idée du médecin salarié est bonne, la maison de santé aussi, mais il ne faut pas que ce soit du prêt-à-porter pour chaque territoire. Certains médecins veulent être en cabinet. »

Pour Aleksandar Nikolic, le problème vient du manque « d’attractivité » de la région. « Les médecins salariés ce n’est pas une mauvaise idée, mais le vrai problème ce sont les salaires pour attirer ces médecins. Si vous avez de salaires inférieurs au libéral, on aura du mal », argue-t-il. Il se prononce par ailleurs formellement contre le recours aux médecins étrangers. « Cela ne vous dérange pas que dans le nucléaire on ait des salariés qui ne parlent pas les mêmes langues ! », peste Charles Fournier.

« Les petites négociations »

Ecologie, agriculture, ruralité, équilibre des territoires… Les candidats n’échappent aux questions sur les éventuelles alliances de second tour. Sans ambages, le socialiste Bonneau et l’écolo Fournier ne cachent pas leur volonté d’union. « Nous n’avons pas le même projet mais nous avons des convergences. Si les conditions sont réunies, nous nous rassemblerons », explique Charles Fournier. En face, le ministre Marc Fesneau et Nicolas Forissier s’allieront-ils ? Le député LR en a marre qu’on lui rabâche la question, mais Marc Fesneau ne « ferme pas la porte ». Esseulé, le RN dispose de peu de marges de manœuvre et moque « les petites négociations ». Elles pourraient surtout lui ôter la victoire.

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