French Prime Minister during an inter-ministerial meeting

Remaniement : « Dans sa communication, Élisabeth Borne s’exprime à la manière d’une cheffe de projet », estime Christel Bertrand

Alors que les rumeurs de remaniement semblent s’amplifier, Élisabeth Borne a accordé un entretien au Parisien le dimanche 9 juillet. L’occasion de défendre son bilan mais également de rappeler ses objectifs et sa loyauté. Entretien avec Christel Bertrand, consultante en stratégie de communication politique et communication de crise.
Henri Clavier

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Avec cet entretien accordé au Parisien, quelle stratégie adopte Élisabeth Borne pour conserver sa place ?

Dans sa communication, Élisabeth Borne s’exprime à la manière d’une cheffe de projet. Elle se met volontairement dans cette position en répétant le mot « délivrer » qui fait totalement partie de cette fonction de cheffe de projet. Elle nous présente une méthode de travail, avec la possibilité de mesurer, de quantifier la qualité de son travail. L’important est également de donner à voir cette méthode. Et même si tous les objectifs n’ont pas été remplis, notamment l’élargissement de la majorité, elle apporte des résultats concrets et tangibles. Donc elle essaye de montrer son efficacité et sa capacité à faire face, à être à la hauteur des enjeux.

Élisabeth Borne a-t-elle réussi à faire évoluer son image depuis son arrivée à Matignon il y a un peu plus d’un an ?

Au début, le plus important dans ce genre de fonction est de réussir à incarner le costume, or il y a souvent un laps de temps pour y parvenir. Dans le cas d’Élisabeth Borne, il faut construire son image pour qu’on ne lui impose pas une image préconçue. A son arrivée, elle a beaucoup été comparée à Jean Castex notamment dans le profil. Elle a été décrite comme quelqu’un d’austère et de froid avec un profil plutôt technocratique. Finalement, après un an, dans un contexte particulièrement mouvementé, elle parvient à se forger sa propre image. C’est en se faisant connaître qu’elle a réussi à dépasser les idées reçues. On remarque qu’elle a été très présente dans les médias pour montrer une autre facette.

Quelles méthodes sont utilisées pour faire passer son message ?

Élisabeth Borne cherche à montrer qu’elle est dans l’action, c’est pour ça que dans le parisien elle se réfère aux textes que le gouvernement a réussi à faire adopter. Elle a réussi à transformer ses faiblesses en force, tout le monde l’identifie désormais. Par ailleurs, son objectif est de renvoyer une image de sérieux, de travail et de rigueur. C’est une perception qu’elle cultive on le voit très clairement dans l’entretien accordé au Parisien. Élisabeth Borne veut apparaître comme quelqu’un de simple, de sobre et de concret. C’est particulièrement visible lorsqu’à plusieurs reprises elle rappelle qu’elle ne commente pas les rumeurs.

Est-ce que cela lui permet d’être complémentaire d’Emmanuel Macron ?

Toute sa stratégie consiste à se différencier. On la présentait comme un profil similaire à celui de Jean Castex mais elle sait se distinguer et faire face. C’est, en tout cas, le visage qu’elle essaye de montrer en montrant une capacité importante d’adaptation.

Élisabeth Borne se distingue-t-elle d’Emmanuel Macron dans la communication ?

Ce n’est pas la même stratégie. C’est difficile d’incarner une posture de communicant, mais dans ses prises de paroles on sent la volonté de répondre aux attentes de la population, de fournir des explications. Élisabeth Borne s’exprime clairement, ce n’est pas le genre à faire cinq phrases alambiquées pour dire ce qui peut être résumé en quelques mots. Ça rejoint le sérieux et la rigueur qu’elle essaye de démontrer, pour cela il faut donner à voir son action, être concret donc c’est ce qu’elle essaye de faire.

On peut y voir une forme de campagne pour rester à son poste ?

Oui, Élisabeth Borne fait campagne pour rester à Matignon. C’est d’ailleurs logique puisqu’elle a réussi à se forger l’image de quelqu’un de sérieux, qui ne triche pas. La photo choisie par le Parisien pour illustrer son entretien n’est d’ailleurs pas neutre. Elle regarde son interlocuteur dans les yeux et renvoie l’image de quelqu’un qui écoute. Élisabeth Borne donne l’impression de considérer son interlocuteur, qu’elle est capable d’écouter et surtout le plus important qu’elle assume son action et reste fidèle à son objectif.

Doit-on considérer que les rumeurs de remaniement concernent davantage les ministres qu’Élisabeth Borne ?

En partie, lorsque l’on a une équipe de 40 ministres, chaque membre du gouvernement doit aussi relayer l’action de l’exécutif. Force est de constater que beaucoup de ministres ont du mal à remplir ce rôle et à se forger une image dans les médias. Donc c’est souvent Élisabeth Borne qui assume ce rôle et renforce cette position de cheffe de projet.

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