Trois départs du gouvernement en 24 heures. Deux ministères régaliens laissés vacants. Plus aucun Modem dans les rangs de l’exécutif. Empêtrés dans l’affaire des assistants parlementaires du Parlement européen, Sylvie Goulard, François Bayrou et Marielle de Sarnez, respectivement chargés des Armées, de la Justice et des Affaires européennes, ont préféré laisser leur place. Ce soir, à 18h, le secrétaire général de l’Élysée Alexis Kohler devrait annoncer la composition du gouvernement Philippe II.
Jean-Pierre Raffarin a un temps été pressenti à la Défense, mais le président de la commission des Affaires étrangères du Sénat a fait savoir sur Twitter qu’il avait d’ « autres projets » que celui d’entrer au gouvernement. Quant à Xavier Bertrand, il a déclaré n’être « pas du tout intéressé ».
« Autour de Bayrou, c’est le désert »
C’est pourtant bien chez Les Républicains que le couple exécutif devrait aller chercher de nouvelles personnalités. L’arrivée de nouveaux ministres Modem semble effectivement largement compromise, « à moins d’en trouver qui n’ont pas été parlementaires européens », précise Bruno Cautrès, chercheur CNRS au Cevipof. Et d’ajouter : « Mais on ne voit pas bien qui car autour de Bayrou c’est le désert. »
Bruno Cautrès n’exclut pas que des « centristes de l’UDI » entrent au gouvernement. Mais là encore, difficile d’identifier des ministrables. « Yves Jégot pourquoi pas, mais Jean-Christophe Lagarde serait un élément de déstabilisation majeure à droite. S’il franchit ce pas, il se coupe de toute perspective de l‘alliance avec les LR. »
« Une hécatombe dans les rangs socialistes »
Enfin, à gauche, les législatives ont été « une telle hécatombe dans les rangs socialistes, qu’ils soient frondeurs ou macro-compatibles » que le politologue n’envisage pas que le nom d’un membre du PS soit prononcé ce soir. D’autant que parmi ceux qui ont « survécu aux élections, la plupart ont été ministres de Hollande ». Or Emmanuel Macron a fait part de sa volonté de se démarquer du quinquennat précédent.
Restent alors Les Républicains, mais pas n’importe lesquels et au risque que l’exécutif déplace son « centre de gravité à droite, offrant ainsi un argumentaire à la gauche pour se reconstruire ». Emmanuel Macron et Édouard Philippe opteraient plutôt pour « des Républicains centristes », au profil « giscardien ». « Nathalie Kosciusko-Morizet aurait très envie de rentrer au gouvernement. Déjà pour le premier gouvernement, elle se voyait ministre de la Défense », confie Bruno Cautrès. L’ancienne ministre de l’Écologie vient toutefois de perdre les législatives. Et, comme le remarque le politologue, Emmanuel Macron se mettrait dans une position « difficile » s’il faisait entrer au gouvernement des candidats battus aux législatives alors même qu’il avait posé comme principe une victoire à ces élections pour que les ministres déjà en place puissent rester.
« Un professionnel de la Justice » et un glissement de Le Drian
Bruno Cautrès évoque brièvement le nom de Thierry Solère, avant de dresser le portrait du ministre idéal : « Une personnalité jeune, peu connue des Français et, de manière stratégique, qui permet d’atténuer le sentiment que le centre stratégique du gouvernement est placé à droite. » Selon lui, l’idéal serait d’opter pour un Républicain peu connu, un élu local du type d’Édouard Philippe avant qu’il devienne chef du gouvernement. Un profil qui reste toutefois peu compatible avec un ministère régalien, comme le sont ceux de la Défense et de Justice. Comme garde des Sceaux, l’exécutif pourrait nommer « un professionnel de la Justice », à l’image de Muriel Pénicaud, au Travail.
À la Défense, un « glissement » de Le Drian, actuellement aux Affaires étrangères, est envisageable. Un ministère qu’il connaît très bien puisqu’il l’a occupé tout au long du quinquennat précédent.
Finalement, la seule personnalité qui semble remplir tous les critères, c’est Fabienne Keller. « Un profil lisible par les Français et un discours plus que constructif » selon Bruno Cautrès. Et d’ajouter : « Elle n’est pas loin d’être clairement macroniste et a multiplié les mains tendues à son égard. » Autre qualité et pas des moindres, elle a été maire de Strasbourg, un ancrage local et un symbole pour l’Union européenne. « C’est une européiste convaincue », renchérit le politologue. Un profil qui conviendrait parfaitement pour remplacer Marielle de Sarnez aux Affaires européennes.