Report des régionales : le Sénat adopte le texte avec de nouvelles garanties pour la sérénité du scrutin
Les sénateurs ont adopté ce 26 janvier le projet de loi qui reporte en juin la tenue des élections départementales et régionales. De nouveaux « instruments » pour assurer la sécurité sanitaire des scrutins et de la campagne ont été introduits contre l’avis du gouvernement. L’organisation d’une campagne officielle pour les régionales sur France 3 et France Bleu a finalement fait consensus.
C’est une première étape de franchie au Parlement, où le projet de loi reportant les élections départementales et régionales au mois de juin a été approuvé ce 26 janvier par le Sénat, après quelques modifications substantielles sur le régime des procurations et l’organisation de la campagne. Dans un contexte d’une situation sanitaire difficile et imprévisible, les sénateurs ont accepté le report de mars à juin de ces élections locales, conscients qu’il était « trop tard » pour faire machine arrière. Juin, oui, « mais pas plus loin », a averti le rapporteur du texte au Sénat, Philippe Bas (LR).
La crainte du rapporteur ? Que la crise sanitaire serve de prétexte à un report plus lointain. Il garde en mémoire les échanges de l’Elysée, en juin dernier, avec les présidents de région sur un report des régionales à l’automne 2022. « Le président de la République semble avoir renoncé à cette hypothèse de travail, mais elle était sur la table, si on en croit la presse », s’est-il rappelé. Philippe Bas reste surtout marqué par le trouble qu’ont constitué les propos, devant la commission des lois du Sénat, de Jean-Louis Debré, deux semaines auparavant. L’ancien président du Conseil constitutionnel, auteur d’un rapport remis en novembre sur les conditions de l’organisation du scrutin, avait affirmé qu’un report des départementales et régionales enjambant la présidentielle était une idée présente au sein de l’exécutif (relire notre article). « Nous ne pouvons que dire non à la manipulation du calendrier pour convenance personnelle », s’est exclamé le sénateur Philippe Bas.
« Il n’y a pas de projet caché du gouvernement en ce qui concerne le calendrier », insiste Marlène Schiappa
Sur les bancs du gouvernement, Marlène Schiappa, ministre déléguée chargée de la citoyenneté, a souhaité démentir formellement l’existence d’un « projet caché », rappelant que le Parlement devait être consulté sur tout report. « Le gouvernement entend que ces élections se tiennent en juin prochain », a-t-elle insisté, ajoutant que « tout est mis en œuvre » pour garantir les « meilleures conditions possibles » à ces journées d’élection.
Afin d’adapter le scrutin aux conditions particulières de la pandémie, le Sénat a suivi les « instruments nouveaux » introduit lors de l’examen en commission. En séance, les sénateurs ont notamment adopté un amendement porté par Alain Cadec et plusieurs de ses collègues du groupe LR, bornant un peu plus les dates du scrutin. Le second tour de ces élections doit avoir lieu, selon le vote du Sénat, « au plus tard le 20 juin 2021 », afin d’éviter un scrutin lors du dernier week-end de juin et des premiers départs en vacances. Marlène Schiappa s’y est opposée, rappelant que les dates relevaient d’un décret de convocation des électeurs, et qu’elles seraient fixées au terme de l’adoption du projet de loi en discussion. L’amendement, consensuel au Sénat, a été maintenu. « On n’a aucune confiance dans la parole gouvernementale. Nous mettons les choses dans la loi », a objecté le sénateur LR Jérôme Bascher.
Bataille sur l’assouplissement des possibilités de procuration
Un bras de fer a également opposé l’hémicycle à la ministre sur la question des procurations. Le Sénat est resté sur sa ligne d’autoriser deux procurations par électeur, comme ce fut le cas aux municipales. Une façon de lutter contre l’abstention et de faciliter l’expression démocratique des personnes vulnérables au covid-19. « Ce relèvement ne peut pas devenir une règle générale », a mis en garde la ministre, insistant sur les risques de fraude. Taquin, Philippe Bas a rétorqué que le gouvernement avait déposé un amendement similaire en octobre, au moment de l’examen du projet de loi créant un régime transitoire après l’état d’urgence sanitaire. « Vous vous étonnez que parfois nous soyons troublés par l’évolution des positions de principe qui sont énoncées par le gouvernement », s’est exclamé Philippe Bas.
Autre point de friction entre le Sénat et le gouvernement : la question de la « déterritorialisation » des procurations, c’est-à-dire la possibilité pour un proche de pouvoir voter par procuration pour un membre de sa famille, même en cas de résidence dans une autre commune, donc d’inscription sur des listes électorales différentes. Marlène Schiappa s’est déclarée défavorable, arguant qu’il n’était « techniquement pas possible » d’offrir cette possibilité aux électeurs. Les fichiers informatiques en question ne seront opérationnels qu’en 2022. Philippe Bas a regretté que « ce travail n’ait pas été accéléré ». L’amendement porté par le socialiste Éric Kerrouche, pour permettre aux communes volontaires d’organiser un système de vote par correspondance, n’a pas été retenu. « Ce n’est parce que ça se fait ailleurs que c’est forcément bien », a répondu simplement la ministre.
Le gouvernement ouvre finalement la voie à une campagne officielle pour les régionales sur le réseau France 3
Le gouvernement a cependant changé d’avis sur un point, en renonçant à la dernière minute à son amendement de suppression de l’article 6, introduit par le Sénat. La commission des lois avait adopté le principe d’une campagne officielle radiotélévisée pour les régionales, en demandant des clips sur France 3 et France Bleu. Le gouvernement craignait que l’audiovisuel ne soit pas en mesure de répondre à temps à cette demande. Marlène Schiappa a déclaré qu’il avait été « sensible aux arguments portés par le Sénat » et qu’il convenait de « respecter la volonté parlementaire ». L’amendement devrait en toute logique survivre à la navette parlementaire.
Mais un manque a été constaté pour les départementales, où le découpage cantonal rend plus difficile l’organisation d’une telle campagne. Le Sénat a adopté un amendement de Maryse Carrère (Rassemblement Démocratique et Social Européen) imposant à l’audiovisuel public la diffusion de programmes expliquant le rôle des conseils régionaux. Le gouvernement n’a pas soutenu l’initiative, pour une raison de forme principalement : le contenu des programmes ne se fixant pas au niveau de la loi.
Parmi ses autres principales modifications, le Sénat se montre également attaché à sa réécriture de l’article 2, lui qui a refusé d’y voir apparaître une quelconque clause de revoyure au 1er avril, provoquée par un rapport du Conseil scientifique. « Nous demandons que le rapport soit un rapport du gouvernement au Parlement, fondé sur l’avis du Conseil scientifique, et que cet avis ne porte pas sur l’opportunité des élections, mais le bon déroulement au niveau sanitaire », a résumé le sénateur Philippe Bas. Le gouvernement n’a pas cherché à amender l’article, mais la majorité sénatoriale reste sur ses gardes. « Il ne faudrait pas que ce texte, une fois passé par l’Assemblée nationale, se retrouve avec un article 2 initial, revenant à la clause de revoyure », a souligné le sénateur LR Roger Karoutchi. Le texte va désormais être aux mains des députés.
La réunion à l’Elysée n’a pas abouti sur un accord. Mais avec des lignes rouges qui peuvent paraître très éloignées, la sortie de crise semble encore lointaine. Un début de rapprochement émerge cependant sur la méthode, autour du non-recours au 49.3.
Depuis la chute de Bachar Al-Assad, certaines déclarations de responsables politiques conciliant avec le régime dictatorial refont surface. En octobre 2015 par exemple dans l’émission « Preuves par 3 » sur Public Sénat, Jean-Luc Mélenchon estimait que les bombardements russes et syriens faisaient partie d’une guerre nécessaire contre les rebelles.
Reçus par Emmanuel Macron ce mardi, avec d’autres formations politiques à l’exception de LFI et du RN, socialistes et écologistes se sont engagés, s’ils accèdent au pouvoir, à ne pas utiliser le 49.3 à condition que les oppositions renoncent à la motion de censure. « Ça a été repris par Horizons, par le MoDem », a assuré Olivier Faure, le Premier secrétaire du PS.
À la sortie d’une réunion avec les partis, hors LFI ou RN, le patron des députés de la Droite républicaine insiste à nouveau sur la nécessité d’aboutir à un accord de non-censure pour qu’un gouvernement survive. Il maintient sa ligne rouge : la droite ne veut ni ministres issus de la France insoumise, ni application du programme du Nouveau Front populaire.