Paris: Seance questions au gouvernement Assemblee nationale

Retailleau candidat à la présidence des LR : « Il a coupé l’herbe sous le pied de Laurent Wauquiez »

Le ministre de l’Intérieur est officiellement candidat à la présidence des LR. Il peut compter sur « une très large adhésion majoritaire du groupe LR », selon le sénateur Marc-Philippe Daubresse. Mais les soutiens de Laurent Wauquiez, comme le sénateur Laurent Duplomb, l’accusent de relancer une « dramatique guerre des chefs ». L’enjeu pour Bruno Retailleau est maintenant d’obtenir un congrès au plus vite, car « les sondages, ça va, ça vient »…
François Vignal

Temps de lecture :

10 min

Publié le

Mis à jour le

La fusée est lancée. Ses soutiens étaient quasi affirmatifs la semaine dernière. C’est maintenant officiel : Bruno Retailleau est sur les rangs pour la présidence des LR. Dans une lettre aux militants, révélée par Le Figaro ce mercredi, il annonce avoir « décidé de (se) porter candidat à la présidence des Républicains ». « Aujourd’hui, je veux faire pour mon parti ce que je fais à la tête de mon ministère : parler vrai et agir vite », lance l’ancien président du groupe LR du Sénat, qui estime que « la droite est de nouveau écoutée […] et c’est pourquoi demain, elle peut gagner ».

« Bruno Retailleau incarne la droite aujourd’hui »

Sans grande surprise, la nouvelle était attendue du côté du Palais du Luxembourg, où la grande majorité du groupe LR est prête à se ranger derrière son ancien président, comme un seul homme. « Je me réjouis de la volonté de Bruno Retailleau de prendre la présidence de notre parti. Il y aura un vote, un débat, tout cela n’est en rien dramatique », réagit Max Brisson, soutien du ministre de l’Intérieur. « Bruno Retailleau incarne la droite aujourd’hui, par ses fonctions ministérielles. Il faut maintenant le traduire par une refondation de notre parti, sur les idées. Et c’est aussi une incarnation », ajoute le sénateur des Pyrénées Atlantiques. Regardez (images d’Elsa Gavinet) :

« Une très bonne chose », salue également le président LR de la commission des affaires européennes, Jean-François Rapin, un soutien de Xavier Bertrand, qui vient d’annoncer être derrière le ministre de l’Intérieur pour la présidence du parti. « Bruno est quelqu’un qui se prépare depuis très longtemps à ces échéances gouvernementales et au parti. Il s’était présenté la dernière fois, il avait échoué d’assez peu face à Eric Ciotti », note le sénateur LR du Pas-de-Calais, mais « aujourd’hui, on remet les compteurs à zéro ».

« Au Sénat, il n’y a pas photo »

Même enthousiasme chez Marc-Philippe Daubresse. « Je suis ravi. On est d’ailleurs très nombreux au sein du groupe LR du Sénat à être très heureux de cette décision. On l’a eu comme président de groupe. On connaît ses qualités, de sincérité, d’efficacité et de magicien du consensus », lance le sénateur LR du Nord. N’en jetez plus… « Nous savons que c’est un rassembleur », confirme Max Brisson, qui en veut pour « preuve », « que le groupe qu’il a présidé pendant 10 ans a conservé son unité. Alors que la droite n’a cessé de connaître les batailles, les divisions, les divisions se sont arrêtées à la porte du Palais du Luxembourg ».

On le voit, Bruno Retailleau pourra compter largement sur les sénateurs LR. « Au Sénat, il n’y a pas photo, il y a une très large adhésion majoritaire du groupe LR autour de Bruno Retailleau », confirme Marc Phillipe Daubresse. Et « il trouvera un appui dans le groupe majoritaire, avec des propositions de lois » qui « sont prêtes et qui peuvent accompagner son action » sur l’immigration, ajoute l’ancien ministre (lire notre article sur le sujet). Regardez :

« Tout cela me désole », regrette Laurent Duplomb

Quelques sénateurs se rangent néanmoins derrière Laurent Wauquiez. Le supporteur numéro 1 du président du groupe Droite républicaine, c’est le sénateur Laurent Duplomb. Il ne se prive pas d’attaquer la décision de l’ex-sénateur de Vendée :

 Alors que le projet de reconstruction n’est pas finalisé, Bruno Retailleau prend la lourde responsabilité d’ouvrir une fois de plus cette dramatique guerre des chefs qui nous a déjà tant coûté, cela est une grave erreur ! 

Laurent Duplomb, sénateur LR de la Haute-Loire.

Pour le sénateur LR de la Haute-Loire, « il en porte la responsabilité alors que la droite a plus besoin de collectif, que de divisions et je pense que le poste de ministre de l’Intérieur, dans la situation actuelle, mérite que l’on s’en occupe exclusivement ». « Tout cela me désole car cela augure une fois de plus une période difficile pour la droite alors qu’un espoir est en train de naître », pointe encore ce fidèle de Laurent Wauquiez.

« Ce n’est l’intérêt de personne de rallumer la guerre des chefs, Bruno Retailleau en a fait les frais »

Guerre des chefs ? « On a quand même quelques heures de vol, tous. J’ai fait partie des membres fondateurs de l’UMP. On a connu ça », minimise Marc-Philippe Daubresse. « En quoi une élection est une guerre des chefs ? Une élection, ce n’est pas un plébiscite », rétorque Max Brisson. « Ce n’est l’intérêt de personne de rallumer la guerre des chefs. Bruno Retailleau en a fait les frais, quand il s’est présenté à la présidence de LR face à Eric Ciotti. Il a beaucoup souffert des divisions de notre campagne politique », estime pour sa part Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission des affaires économiques, qui voit Bruno Retailleau comme « le plus à même » de « redonner des couleurs à notre famille politique ».

La semaine dernière, lors d’un dîner, Laurent Wauquiez aurait rappelé à Bruno Retailleau un accord entre les deux. Au député le parti, à Bruno Retailleau la place au gouvernement. « Ce pacte n’a jamais existé que dans la tête de Laurent Wauquier », rétorque Max Brisson, qui ajoute : « Un procès en illégitimité de Bruno Retailleau n’est pas acceptable, car ce serait remettre en cause la démocratie. […] D’ailleurs, dans le projet de refondation porté par Laurent Wauquiez, le point numéro 1, c’est la démocratie dans le parti. Et bien ça commence par des élections et des militants qui vont arbitrer entre les deux ».

Frédérique Puissat veut « que le groupe reste uni, une campagne, c’est souvent une période compliquée »

Du côté de Mathieu Darnaud, qui a succédé au ministre à la présidence du groupe, il ne faut pas attendre de prise de position pour l’heure. « En tant que président de groupe, il affiche une neutralité qui correspond aux différentes sensibilités au sein du groupe, qu’il respecte », confie son entourage, mais « c’est normal et sain qu’il y ait des candidats à la tête d’un parti, normal et sain qu’il y ait une campagne », ajoute-t-on. Frédérique Puissat, vice-présidente du groupe LR, compte pour sa part être « garante que le groupe reste uni. Une campagne, c’est souvent une période compliquée ». La sénatrice LR de l’Isère, département de la région que présidait le président du groupe des députés LR, ménage chacun. « Laurent Wauquiez a été président des LR, il a été un très grand président de notre région Auvergne-Rhône-Alpes. Il y a des attachements territoriaux, à l’homme. Bruno Retailleau a été ici symbole de cohésion. Puis il a pris la lumière à l’Intérieur », salue Frédérique Puissat, qui tient une réunion publique vendredi, en début de soirée, à Sassenage, près de Grenoble, avec le ministre de l’Intérieur.

Reste que pour l’heure, Laurent Wauquiez n’est pas encore officiellement candidat. Selon un sénateur, ça ne saurait tarder. « Il doit se déclarer demain soir à Valence, lors d’un meeting avec le maire LR Nicolas Daragon, dont il est proche », avance ce sénateur. C’est justement ce qui aurait précipité la déclaration du ministre de l’Intérieur. « Bruno Retailleau a coupé l’herbe sous le pied de Laurent Wauquiez… » savoure un soutien.

« Avant de se lancer, il a vérifié dans les fédérations si ça passait bien »

Si Bruno Retailleau aura l’appui d’une grande partie des sénateurs LR, reste que ce sont les militants qui votent. « Une élection, c’est toujours une élection. Les jeux ne sont jamais faits d’avance », reconnaît Marc-Philippe Daubresse, « vous avez vu ce qu’il s’est passé et qui a abouti à l’élection funeste d’Eric Ciotti ? Il y a des dynamiques d’élection. Il peut se poser différents problèmes. Il faut faire campagne jusqu’au bout ».

Les remontées de terrain seraient bonnes. C’est aussi ce qui l’aurait poussé à se déclarer. « Avant de se lancer, il a vérifié dans les fédérations si ça passait bien », confie un soutien. « On revient grâce à l’effet Retailleau », assure le président de la commission des affaires sociales, Philippe Mouiller. Le sénateur LR des Deux-Sèvres constate qu’« avant même qu’il soit candidat, on a remarqué un nombre d’adhésions en hausse ». « Il suffit d’aller en circonscription pour voir qu’il se passe quelque chose », confirme un autre cadre LR, qui ajoute : « On est dans un parti qui a besoin d’un chef. Et il incarne quelque chose ».

« Il faudrait que Retailleau fasse attention à ne pas paraître comme le candidat des chapeaux à plume »

Malgré la confiance affichée, chez les amis de Bruno Retailleau, on sait bien que tout n’est pas fait. Selon un soutien de l’ex-président de groupe, c’est paradoxalement son succès qui pourrait se retourner contre lui. Car après Xavier Bertrand, le prochain soutien de poids qui va arriver devrait être David Lisnard, maire LR de Cannes, avant Valérie Pécresse. « Il faudrait que Retailleau fasse attention à ne pas paraître comme le candidat des chapeaux à plume », met-on en garde.

Autre (légère) inquiétude dans le camp Retailleau : que la belle embellie sondagière, qui a sûrement aussi participé à le convaincre à se lancer, pourrait « ne pas durer éternellement ». « A un moment, les planètes s’alignent, ou pas. Et ça ne dure pas », sait bien un élu expérimenté. « Il sait que les sondages, ça va, ça vient », confirme Frédérique Puissat. Le ministre de l’Intérieur est lui-même « très surpris de ce qu’il se passe », confie un proche, qui raconte que Bruno Retailleau n’a pas caché son étonnement de se retrouver sur les affiches de la candidate LR, Isabelle de Maistre, à Boulogne-Billancourt, terre de la droite macron-compatible. Pas vraiment la droite catholique conservatrice voire traditionnaliste, qu’on lie volontiers à l’ancien sénateur de Vendée.

« Wauquiez veut du temps pour faire le tour des fédérations »

C’est pourquoi Bruno Retailleau vise une Blitzkrieg pour prendre le parti. La semaine dernière, lors d’un bureau politique des LR, il a défendu un congrès au plus vite, quand Laurent Wauquiez n’est pas pressé. « Wauquiez veut du temps pour faire le tour des fédérations. Il a commencé d’ailleurs », décrypte un élu du parti. Deux solutions sont sur la table des LR, lors d’un bureau politique, lundi prochain, à 18 heures, qui s’annonce déjà à risque. Soit ils considèrent qu’il s’agit d’une période « ordinaire », comme lorsque le mandat du président prend fin. Et le scrutin doit être organisé 90 jours après la décision du bureau. Soit ce n’est pas le cas, car il y a une direction provisoire, et l’élection doit alors être organisée entre 50 et 65 jours après la décision du bureau. Une sénatrice LR résume : « Chacun joue son calendrier ». Et sa carte.

Dans la même thématique

Retailleau candidat à la présidence des LR : « Il a coupé l’herbe sous le pied de Laurent Wauquiez »
3min

Politique

Emmanuel Grégoire candidat à la mairie de Paris : "Je ne pourrai pas soutenir quelqu'un qui a passé son temps à me tirer le tapis sous le pied », déclare Anne Hidalgo

Invitée de la matinale de Public Sénat, la maire de Paris Anne Hidalgo s’est exprimée sur la fin de son mandat, et les élections municipales à venir. Si l’édile soutient le sénateur socialiste Rémi Féraud pour la succéder, elle attaque son premier adjoint Emmanuel Grégoire, également candidat, qui n’a pas « rempli son rôle de protéger le maire ».

Le

Retailleau candidat à la présidence des LR : « Il a coupé l’herbe sous le pied de Laurent Wauquiez »
2min

Politique

Assouplissement du ZAN : Agnès Pannier-Runacher dénonce « la manière dont certains populistes se saisissent de ce sujet »

La majorité sénatoriale propose d’assouplir les objectifs de zéro artificialisation nette (ZAN) des sols, dans un texte examiné à partir de ce 12 mars. Si la ministre de la Transition écologique accepte de donner « un peu de souplesse » aux élus locaux dans l’application de la loi, elle s’oppose à tout abandon des objectifs chiffrés.

Le