Retraites : « Certains pensaient avoir élu Rocard, ils ont Giscard pour l’arrogance et Sarkozy pour la brutalité »

Invité de la matinale de Public Sénat, l’eurodéputé EELV Yannick Jadot estime qu’Emmanuel Macron « a usé de tous les contournements » pour faire adopter la réforme des retraites. En marge d’une 14e journée de mobilisation, il espère que la proposition de loi d’abrogation qui sera discutée jeudi à l’Assemblée pourra aller jusqu’au vote.
Romain David

Temps de lecture :

3 min

Publié le

Mis à jour le

Nouveau souffle ou baroud d’honneur ? L’intersyndicale mobilisée contre la réforme des retraites appelle ce mardi 6 juin à une 14e journée de mobilisation, à deux jours de l’examen en séance publique, à l’Assemblée nationale, d’une proposition de loi visant à abroger le report de l’âge légal de départ à la retraite. Néanmoins, les chances de voir ce texte adopté semblent particulièrement minces, et cette nouvelle séquence pourrait bien marquer l’épilogue de la crise politique déclenchée avec cette réforme. « Evidemment il y a une forme de lassitude, mais aussi contre les coups portés par le président et son gouvernement à la démocratie », a relevé l’eurodéputé EELV Yannick Jadot, invité de « Bonjour chez vous », la matinale de Public Sénat. « Mais je ne crois pas que les Français ont tourné la page. Quand on regarde les enquêtes d’opinion, le niveau d’opposition est toujours aussi important. Moi, je souhaite qu’il y ait du monde dans la rue cet après-midi. »

« Une réforme portée par le seul président et son gouvernement, rejetée majoritairement par les Français, à la quasi-unanimité des salariés, qui n’a jamais été votée par l’Assemblée nationale, peut se mettre en place », déplore Yannick Jadot, qui y voit « une terrible histoire de la démocratie française ». « Emmanuel Macron a usé de tous les contournements de l’esprit de la Constitution, a écrasé la démocratie sociale, veut continuer à écraser la démocratie parlementaire », estime l’élu, qui dénonce ainsi « la dérive illibérale » du quinquennat.

Un parlementarisme rationalisé

« Le président de la République a été élu en 2017 sur une forme de renouveau démocratique, de renouveau de la méthode pour présider ce pays », relève-t-il. « Non seulement il a cassé les partis politiques, mais il est en train d’abîmer la démocratie. Certains pensaient avoir élu Michel Rocard ou Pierre Mendès France, ils ont élu Giscard pour l’arrogance et Sarkozy pour la brutalité », tacle l’ancien candidat à la présidentielle.

La majorité présidentielle entend s’appuyer sur un motif d’inconstitutionnalité pour torpiller la proposition de loi d’abrogation, portée par le groupe LIOT, qui sera débattue jeudi. Les soutiens du président ont déjà réussi à vider ce texte de sa substance – l’annulation du recul de l’âge de départ de 62 à 64 ans – lors de la discussion en commission, ce qui devrait pousser l’opposition à réintroduire par voie d’amendements, lors de la discussion publique, les dispositifs recalés. Toutefois, Yaël Braun-Pivet, la présidente de l’Assemblée nationale, a toujours la possibilité de les faire déclarer irrecevables, via l’article 40 de la Constitution. Ce scénario – très probable – marquerait un précédent notable dans l’histoire parlementaire de la Cinquième République, comme nous vous l’expliquions dans cet article.

« Je lance un appel ce matin, à la présidente de l’Assemblée nationale », a réagi Yannick Jadot. « Est-ce qu’elle veut marquer l’histoire en défendant le Parlement et la démocratie parlementaire, ou est ce qu’elle participera à l’écraser ? C’est la question qui est la sienne. »

Dans la même thématique

Lampedusa – 190 Migrants From Ghana Arrived on the Island on a Coast Guard Boat, Italy – 18 Sep 2023
7min

Politique

Pacte migratoire européen : « L’idée est d’arriver à un accord général avant les élections européennes de 2024 »

Après trois ans d’âpres négociations, l’Union européenne se dirige vers un accord pour un nouveau pacte migratoire. Les échecs répétés de la réglementation actuelle et les récents épisodes d’afflux de migrants ont fini de convaincre les Vingt-sept de la nécessité d’en finir avec le statu quo. Analyse avec François Héran, sociologue et démographe, spécialiste des questions de migrations internationales.

Le

Spontaneous demonstration against the pension reform in Bordeaux
6min

Politique

Contrôles au faciès : récépissé, caméras-piétons, formation des forces de l’ordre… Quelles solutions ?

Saisi par plusieurs ONG, le Conseil d’Etat doit se pencher vendredi sur la pratique des « contrôles au faciès ». Les associations demandent au juge administratif d’ordonner à l’Etat de prendre une série de mesures telle que la modification du Code de procédure pénale pour interdire la discrimination dans les contrôles d’identité. Un débat de longue date au Sénat et dans le débat public.

Le

PARIS : Rendez-vous Gerard Larcher dans son bureau au Senat.
6min

Politique

Gérard Larcher en passe d’être élu président du Sénat pour la cinquième fois

A lui seul, il représente l’institution. Gérard Larcher s’apprête à être réélu président du Sénat pour la cinquième fois, le 2 octobre. Une longévité qui fait figure d’exception dans le paysage politique actuel. Depuis sa première élection en 2008 au Plateau, le sénateur LR a su imprimer sa marque sur la Haute assemblée.

Le

Retraites : « Certains pensaient avoir élu Rocard, ils ont Giscard pour l’arrogance et Sarkozy pour la brutalité »
7min

Politique

Ils quittent le Sénat : Pierre Laurent, le discret militant communiste

Pierre Laurent est du genre réservé. Aussi bien au Sénat qu’au Parti communiste, ce Parisien de naissance a pourtant occupé les plus hautes fonctions : vice-président du Sénat, secrétaire national du PCF.. Après onze ans à la Chambre haute, il s’apprête à rendre les clés, côté parti en revanche, il ne rendra jamais sa carte.

Le