Des économistes ayant participé à la campagne présidentielle d'Emmanuel Macron déplorent les "considérations budgétaires" qui "obscurcissent" la réforme des retraites et appellent l'exécutif à davantage de "clarté", dans une tribune au Monde publiée lundi.
"Pour réussir une réforme aussi ambitieuse, il faut de la clarté sur sa finalité, sur ses paramètres, sur la gouvernance future du système et, enfin, sur les conditions de la convergence des différents régimes existants. Cette clarté a jusqu'ici manqué", estiment dans ce texte les quatre co-signataires, à savoir Jean Pisani-Ferry, coordinateur du programme de M. Macron et enseignant à Sciences Po, le professeur au Collège de France Philippe Aghion, le président délégué du Conseil d'analyse économique (rattaché à Matignon) Philippe Martin et Antoine Bozio, qui fut l'inspirateur durant la campagne de la réforme et dirige l'Institut des politiques publiques.
"Les objectifs centraux de la réforme – lisibilité, sécurité, confiance, équité – ont été obscurcis par des considérations budgétaires qui détournent de l'essentiel", observent-ils encore, tout en qualifiant de "réforme de progrès" l'instauration d'un nouveau système universel.
Alors qu'Edouard Philippe doit détailler mercredi le projet du gouvernement, une question parmi d'autres est en suspens: comment articuler, à côté de la réforme structurelle, des mesures de gestion, dites "paramétriques", permettant de résorber le déficit du système, qui devrait s'établir entre 8 et 17 milliards en 2025 selon les projections ?
"Vouloir mener de pair réforme systémique et réforme de financement, c'est risquer de brouiller les enjeux", mettent en garde les économistes.
Ils recommandent ainsi de "renoncer aux mesures d'âge", ciblant l'introduction d'un "âge pivot" à 64 ans pour partir à la retraite, en dessous duquel la pension serait minorée.
Les co-signataires appellent aussi à "dissiper la méfiance quant à l'évolution de la valeur des points accumulés" en gravant dans la loi "des règles d’indexation stables et précises, qui s'appliquent même en cas de récession".
Quant à la "gouvernance du système", elle doit être "transparente" et inclure "les partenaires sociaux", écrivent-ils encore.
Egalement, ils exhortent à veiller à ce que la réforme ne conduise pas à une "dégradation de la situation des fonctionnaires", notamment les enseignants, pour qu""aucune catégorie ne soit perdante".
Enfin, ils appellent à ne pas "allonger à l'excès" les transitions entre les systèmes existants et le futur système universel, alors que l'exécutif réfléchit à différer la mise en application de la réforme pour certaines catégories.
"Si la réforme est injuste ou anxiogène, les délais ne résoudront rien. Si, comme nous le pensons, elle est socialement juste et économiquement efficace, pourquoi la retarder", s'interrogent-ils.