Après avoir engagé la responsabilité du gouvernement samedi, via le « 49-3 » de la Constitution, pour faire adopter la réforme des retraites, Édouard Philippe devra affronter ce mardi à l’Assemblée nationale deux motions de censure. L’une déposée par les trois groupes de gauche, la seconde par les Républicains. Comme en 2016, lors de la loi Travail (le précédent 49-3), les communistes pourraient joindre leurs voix à celles de la droite. « A priori – sauf si dans leurs propos il y a vraiment des choses insupportables, je serai enclin à voter leur motion de censure », a déclaré le numéro 1 du Parti communiste français, le député Fabien Roussel, dans Audition publique, émission des chaînes parlementaires en partenariat avec Le Figaro Live. « Je ne partage pas le contenu de leur motion, mais sur la forme, comme nous, ils dénoncent l’usage du 49-3 et pour que soyons forts dans cet hémicycle, nous avons plutôt intérêt à nous additionner. »
La demande répétée de Gérard Larcher, de décaler l’examen au Sénat du projet de loi, pour attendre les conclusions de la Conférence de financement, a d’ailleurs été approuvée par le communiste. « Je soutiens les Républicains qui mettent la pression sur le gouvernement sur la question du financement, c'est une vraie question », a-t-il ajouté.
Fabien Roussel s’attend à une « réaction d’émotion et de colère » dans la rue, après le 49-3
Les socialistes, cosignataires avec la France insoumise et les communistes, d’une motion de censure de gauche, ont exprimé la même réserve, par la voix d’Olivier Faure. Ils refuseront de voter en faveur de la motion du groupe si celui-ci fait mention d’un recul de l’âge légal de départ à la retraite. Quant au consensus pour une motion commune à la gauche, Fabien Roussel a précisé que son groupe n’avait pas eu besoin de faire de concessions. « L’objet de la motion de censure n’est pas de présenter le programme du Parti communiste français […] Il n’y a pas eu de mal à nous trois, à écrire le sens de cette motion de censure dont nous parlons depuis plusieurs semaines. »
49-3 : Fabien Roussel dénonce la « méthode brutale » du gouvernement
Arithmétiquement, les motions de censure ont peu de chance d’être adoptées. Additionnés, les effectifs des groupes LR, PS, GDR et LFI totalisent 167 députés, loin des 290 députés requis pour être majoritaires. Néanmoins, Fabien Roussel espère « convaincre quelques députés de la majorité à voter » en faveur d’une motion d’une censure.
Le député du Nord, ne sera pas seulement dans l’hémicycle, mais aussi dans la rue, pour participer à l’appel de plusieurs syndicats. « Il faut la mobilisation la plus forte des salariés », a appelé le parlementaire, qui s’attend à une « réaction d’émotion et de colère » après l’usage du 49-3. « On n’a pas le droit de l’utiliser sur un texte aussi important », s’est-il indigné, « jamais un gouvernement ne l’a utilisé dans une telle situation ». Le secrétaire général du PCF s’est montré inquiet pour les institutions. « Ma crainte, c’est que, aujourd’hui, la République sorte abîmée de cet épisode ».
Comme de nombreux autres opposants, Fabien Roussel a sévèrement critiqué le timing du gouvernement, qui a dégainé le 49-3 lors d’un Conseil des ministres exceptionnel, ce samedi, consacré à la progression du coronavirus (Covid-19) en France. « Le Premier ministre a opportunément profité de cette épidémie qui arrive, pour brutalement utiliser le 49-3, en disant comme ça va passer au second plan de l'actualité. »