Retraites: le gouvernement, « déterminé », accélère son calendrier avant la grève
Pressé de sortir de "l'ambiguïté" sur la réforme des retraites, le gouvernement a exhorté ses troupes à "passer un message de très grande...

Retraites: le gouvernement, « déterminé », accélère son calendrier avant la grève

Pressé de sortir de "l'ambiguïté" sur la réforme des retraites, le gouvernement a exhorté ses troupes à "passer un message de très grande...
Public Sénat

Par Gabriel BOUROVITCH, Aurélie CARABIN

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

Pressé de sortir de "l'ambiguïté" sur la réforme des retraites, le gouvernement a exhorté ses troupes à "passer un message de très grande détermination" et devrait faire "des annonces" d'ici mi-décembre, après la grève reconductible qui débutera jeudi 5.

"Nous devons passer un message de très grande détermination. Nous nous sommes engagés là-dessus": Le premier ministre Edouard Philippe a tenu un langage de fermeté à l'Assemblée nationale devant les parlementaires de la majorité réunis à huis clos, ont affirmé des sources concordantes à l'AFP.

"Nous avons un mandat là-dessus", a insisté Edouard Philippe à l'occasion de ce rendez-vous auquel participaient également la ministre de la Santé Agnès Buzyn et le haut-commissaire aux Retraites, Jean-Paul Delevoye.

À neuf jours de l'épreuve de force, l'exécutif veut reprendre la main sur le calendrier et enjamber la date choisie par les syndicats opposés à son projet de "système universel" de retraite censé remplacer les 42 régimes existants.

Selon plusieurs parlementaires présents à la réunion de mardi soir, M. Philippe s'exprimera mercredi pour "dire ce qu'il retient (de ses) échanges avec les partenaires sociaux" qui se sont déroulés lundi et mardi, alors qu'un séminaire gouvernemental sur la réforme est prévu dimanche à Matignon.

M. Delevoye s'exprimera quant à lui entre le 10 et le 13 décembre, avant une prise de parole du chef du gouvernement avant la fin de l'année pour "donner les arbitrages".

Syndicats et patronat auraient pourtant préféré que le pouvoir abatte ses cartes avant la date fatidique.

Le président de l'U2P Alain Griset (G) reçu à Matignon le 26 novembre 2019 par le Premier ministre Edouard Philippe (D) et le haut-commissaire aux retraites Jean-Paul Delevoye (2eD)
Le président de l'U2P Alain Griset (G) reçu à Matignon le 26 novembre 2019 par le Premier ministre Edouard Philippe (D) et le haut-commissaire aux retraites Jean-Paul Delevoye (2eD)
POOL/AFP

"On a perdu beaucoup de temps", a regretté Laurent Berger (CFDT), pointant les "tergiversations de la part du gouvernement".

"La colère est en train de s'enkyster dans certains secteurs", a mis en garde Laurent Escure (Unsa), réclamant "que des arbitrages soient rendus le plus vite possible" car, "si c'est après le 5, on sera dans une zone de danger".

La grève "aura lieu de toute façon", a observé Geoffroy Roux de Bézieux (Medef), disant s'attendre à "des difficultés", même une "très courte grève" pouvant "avoir un impact sur l'image et l'attractivité du pays". "Pendant une journée, on peut s'organiser", a affirmé François Asselin (CPME), surtout inquiet du "jour d'après".

- "Inquiétude" et "provocations" -

"Cette attente d'annonces génère plutôt de l'inquiétude", a souligné Alain Griset (U2P), qui a demandé mardi au Premier ministre et au haut-commissaire de "garantir la liberté d'exercice" des artisans et des commerçants.

Une revendication concernant particulièrement les métiers de l'alimentation, pour qui "les périodes de Noël sont essentielles", a-t-il souligné. "Si jamais il y avait des blocages, beaucoup se verraient au premier trimestre dans une situation financière extrêmement compliquée", a-t-il ajouté.

La crainte n'est pas infondée: parti des bastions de la RATP et de la SNCF, l'appel à une grève reconductible contre la réforme des retraite a été rejoint par la CGT, FO, FSU, Solidaires, et plusieurs syndicats étudiants et lycéens, puis par des organisations d'Air France, d'EDF, d'avocats, de magistrats...

Le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez s'exprime devant la presse le 26 novembre 2019 après avoir été reçu à Matignon sur la réforme des retraites
Le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez s'exprime devant la presse le 26 novembre 2019 après avoir été reçu à Matignon sur la réforme des retraites
AFP

Fait rare, les cadres de la CFE-CGC ont appelé à manifester, son président François Hommeril redoutant un futur système "à la main de l'État" qui "viendrait à amoindrir le niveau général des pensions".

La CFTC a laissé ses syndicats libres de rallier le mouvement, bien que son secrétaire général Cyril Chabanier "privilégie toujours le dialogue par rapport à la grève".

Le leader de la CGT, Philippe Martinez, est prêt pour le bras de fer: "On n'avait jamais eu autant de demandes" de salariés "qui veulent savoir comment" participer à la mobilisation du 5 décembre, a-t-il assuré, évoquant des appels à la grève dans "les raffineries, la pétrochimie, le caoutchouc, l'automobile".

"Tout le monde est concerné (...) c'est une réforme qui concerne le public comme le privé", a-t-il insisté, dénonçant "la grosse provocation" de l'exécutif qui cible depuis plusieurs jours les seuls régimes spéciaux.

Des régimes qu'Emmanuel Macron lui-même a jugés "d'une autre époque", la ministre des Solidarités, Agnès Buzyn, pointant leurs "revendications très corporatistes", et le président de l'Assemblée nationale, Richard Ferrand, leur reprochant de vouloir "conserver des inégalités".

Trop pour M. Martinez, venu dire en face à M. Philippe: "Arrêtez les provocations et recadrez un peu vos ministres".

Partager cet article

Dans la même thématique

Kanner
6min

Politique

Budget 2026 : « L’objectif, ce n’est pas 40 milliards d’économies, c’est 120 milliards en trois ans », avertit Patrick Kanner

Le ministre de l’Economie a consulté les parlementaires socialistes sur le budget. S’ils n’ont pas obtenu de réponses sur les choix du gouvernement, Eric Lombard leur a remis « une lettre de deux pages sur le bilan des engagements pris par François Bayrou » l’hiver dernier, explique Patrick Kanner, patron des sénateurs PS.

Le

POLICE MUNICIPALE
4min

Politique

Réforme des polices municipales : un projet de loi calqué sur une mission du Sénat

Une police municipale renforcée, c’est l’idée du projet de loi présenté par le ministre délégué auprès du ministre de l’Intérieur, François-Noël Buffet, dans un entretien accordé hier au journal Le Parisien. Ses propositions font largement écho à la mission d’information de la sénatrice LR Jacqueline Eustache-Brinio sur la police municipale, présentée en mai dernier.

Le