Retraites: le mouvement syndical plus que jamais coupé en deux

Retraites: le mouvement syndical plus que jamais coupé en deux

Même s'il n'y a jamais eu de front uni des syndicats contre la réforme des retraites, l'offre du gouvernement de négocier une...
Public Sénat

Par Céline LOUBETTE

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Même s'il n'y a jamais eu de front uni des syndicats contre la réforme des retraites, l'offre du gouvernement de négocier une alternative à l'âge pivot a entériné leur division en deux blocs antagonistes: ceux qui privilégient la "logique de dialogue" et ceux qui "organisent la bataille".

Le projet du gouvernement, visant à mettre en place un régime de retraite unique par points, divise depuis le début les syndicats. Ceux dits "contestataires", CGT et FO en tête, s'opposent à la réforme dans son ensemble, estimant qu'elle fera baisser les pensions, et sont à la pointe du mouvement ininterrompu de grèves et de manifestations, arrivé dimanche à son 39e jour consécutif.

Les "réformistes", CFDT, CFTC et Unsa, sont favorables à la retraite par points. Mais leur ferme opposition à la mesure "paramétrique", -autrement dit purement budgétaire-, d'un âge pivot à 64 ans en 2027 assorti d'un malus pour ceux qui partiraient plus tôt, a pu faire croire pendant un moment à un front syndical uni.

La main tendue du Premier ministre, qui a proposé samedi de retirer à court terme cet âge pivot à condition de trouver des sources alternatives de financement pour équilibrer le régime, a mis en évidence le fossé entre les deux camps.

"Nous sommes passés d'une logique d'affrontement à une logique de dialogue", a souligné dans le Journal du dimanche le numéro un de la CFDT, Laurent Berger, saluant une "victoire" de son syndicat "mais aussi de l'Unsa et de la CFTC". Laurent Escure (Unsa) s'est réjoui de pouvoir discuter désormais "sereinement" avec le gouvernement, et Cyril Chabanier (CFTC) de pouvoir entrer "dans le processus de dialogue".

Une salve de réactions qui a irrité Yves Veyrier (FO), plus que jamais opposé à la réforme. "Je ne suis pas complotiste, mais il y a des moments où je pourrais presque le devenir", a-t-il dit sur France Info, soulignant que "beaucoup de communication était prête" dès samedi après-midi "pour saluer le compromis", et qualifiant les syndicats réformistes d'"acteurs de second rôle" dans la mobilisation.

Allant plus loin, Laurent Brun, de la CGT Cheminots, a dénoncé sur BFMTV "une opération de promotion mutuelle entre le gouvernement et la CFDT pour mettre en scène une pseudo-concession qui en réalité n'en est pas une". "Pour le gouvernement, on a l'impression qu'il y a un syndicat unique, alors qu'il y en a huit", a renchéri le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, sur BFMTV

"Les organisations qui sont mobilisées (...) ne changent pas d'avis" sur la réforme, "et c'est elles qui organisent la bataille depuis le début du conflit", a martelé M. Brun.

- mouvement social "à la peine" -

Ces deux pôles syndicaux "sont deux structurations bien indépendantes l'une de l'autre, ce qui explique aussi que le mouvement social soit à la peine" car "dans le passé, quand les mouvements sociaux ont gagné, il y avait une unité syndicale", analyse Dominique Andolfatto, politologue spécialiste des syndicats, interrogé par l'AFP.

Avec d'un côté, explique-t-il, un Laurent Berger "plutôt d'accord avec l'architecture générale" du projet, mais qui ne devait dans un premier temps "pas trop donner l'impression de le soutenir", d'où notamment son opposition à l'âge pivot.

Son prédécesseur, François Chérèque, avait en effet plongé la CFDT dans une profonde crise interne et fait face à la défection massive de militants après avoir très rapidement passé un accord avec le gouvernement Raffarin sur la réforme des retraites de 2003.

De l'autre côté, l'intersyndicale, emmenée par la CGT, se trouve face à un risque d'essoufflement d'un mouvement de jour en jour plus coûteux pour les grévistes. D'autant plus que, souligne M. Andolfatto, "il y a du monde dans la rue, mais par rapport à d'autres mouvements sociaux, finalement pas tant que cela", notamment comparé à la réforme des retraites de 2010. Or, le gouvernement Sarkozy "avait tenu", rappelle-t-il.

Pour Dominique Andolfatto, ce que révèle la crise des retraites, c'est, au-delà de ses divisions, "l'impasse dans laquelle se trouve le mouvement syndical, qui a renoncé à ce qui devait être ses fondamentaux: avoir des adhérents". Car "c'est toujours cela qui a impressionné le pouvoir, quel qu'il soit".

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