C’est l’un des ultimes rebondissements de cette année politique, où beaucoup de choses ne se seront pas passées comme prévu pour Emmanuel Macron. L’exécutif a reporté la présentation de sa réforme des retraites au 10 janvier, rayant subitement la date annoncée du 15 décembre. Pour le patron des députés Les Républicains à l’Assemblée nationale, ce changement de dernière minute illustre une certaine nervosité sur un texte inflammable, dans un contexte déjà miné par les tensions sur le réseau électrique. « Le président de la République a fini par se faire peur tout seul […] Je crois qu’il a vu le risque. Il a préféré essayer de laisser passer les vacances de Noël des Français, ce qui me paraît sage », réagit le député LR Olivier Marleix, invité ce 12 décembre d’Audition Publique, sur les chaînes parlementaires, en partenariat avec Le Figaro Live. « S’il était sûr de lui et de sa réforme, il n’aurait pas reculé […] Il s’est rendu compte que cet âge de 65 ans était trop brutal. »
En annonçant le nouveau calendrier, ce lundi au Conseil national de la refondation, Emmanuel Macron a justifié le report pour que « ceux qui viennent de prendre des responsabilités puissent échanger avec le gouvernement ». Ces derniers jours, plusieurs partis (LR, UDI, EELV) ont renouvelé leur présidence. « On peut remercier Éric Ciotti d’avoir sauvé nos vacances, d’avoir évité une grève des trains. L’élection du président des Républicains a déjà quelque chose de très utile », sourit le député d’Eure-et-Loir.
Au-delà de la boutade, Olivier Marleix compte dire à Élisabeth Borne, qui reprend des consultations auprès des présidents de groupe, tout le mal qu’il pense d’un report de l’âge légal de départ à 65 ans, âge que le gouvernement pourrait « abandonner », selon lui. « Je veux que le gouvernement n’agite pas de chiffon rouge inutile […] Ce chiffre de 65 ans, ce ne serait pas compris par les Français. Ce serait compris comme une provocation. » Et dans ce cas précis : « On ne soutiendrait pas cette réforme », prévient le patron des députés LR.
Le spectre de la motion de censure
Dans un tel scénario, Olivier Marleix ne se prononce pas encore sur la possibilité de soutenir une motion de censure, l’arme de dissuasion parlementaire. « On n’en est pas là. Cela fait partie des hypothèses sur lesquelles on ferait entendre nos désaccords, avec les moyens dont nous disposons », prévient-il. Plutôt que des perspectives « lointaines », le député préconise d’en rester à un objectif concret dès la fin du quinquennat : un recul d’un trimestre chaque année, pour atteindre l’âge de 63 ans en 2027. « Allons-y pas à pas. Ce sera déjà pas mal », confesse le député LR. Couplé avec « peut-être » une accélération de la réforme Touraine (laquelle prévoit à ce stade 172 trimestres de cotisations en 2035, soit 43 années, à partir de la génération 1973), la réforme permettra de ramener 10 milliards d’euros dans la caisse des retraites, selon lui. Et surtout, « ça ne met pas les Français dans la rue », veut-il croire.
Lors des débats sur le budget de la Sécurité sociale en novembre, la majorité sénatoriale de droite avait quant à elle défendu le principe d’un recul à 64 ans. Olivier Marleix n’y voit aucune contradiction, soulignant que le recul à 64 ans ne serait atteint qu’à un horizon de dix ans. Au même rythme, en somme. « On est tout à fait en ligne avec ce que proposent les sénateurs », assure-t-il, précisant avoir relu l’amendement avant l’émission.
D’autres ont poussé le curseur plus loin dans le passé. Le totem des 65 ans avait été porté par Valérie Pécresse, candidate du parti durant la dernière élection présidentielle, rappelons-le. Tout juste intronisé président des Républicains, Éric Ciotti s’était lui aussi prononcé en faveur d’un report de l’âge légal à 65 ans. Pour Olivier Marleix, ces positions avaient du sens puisqu’elles s’inscrivaient dans un « projet de redressement global » de la dépense publique.
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