Le coup d’après. Au lendemain de l’échec de la motion de censure et de l’adoption de la réforme des retraites, les parlementaires de gauche continuent d’actionner tous les leviers à leur disposition pour obtenir le retrait du projet de loi. Hier, le Conseil constitutionnel a enregistré le dépôt d’une proposition de loi pour organiser en faveur d’un référendum d’initiative partagée (RIP) sur la limitation de l’âge légal de départ à 62 ans. Si le texte est jugé recevable, ils auront alors neuf mois pour réunir 4,87 millions de signatures sur une plateforme.
Le Conseil constitutionnel sera également saisi dans les prochaines heures à la fois par la gauche, pour vérifier la conformité du projet de loi vis-à-vis de la Constitution. Le recours des députés devrait intervenir ce mardi, celui des sénateurs pas avant ce mercredi, voire jeudi. Les opposants contestent notamment l’utilisation par le gouvernement d’un projet rectificatif du budget de la Sécurité sociale comme véhicule législatif.
Hier, le gouvernement a pris de court les oppositions, en annonçant à son tour une saisine du Conseil constitutionnel. La Première ministre Élisabeth Borne a fait savoir qu’elle saisira « directement le Conseil constitutionnel » pour un examen « dans les meilleurs délais ».
Craintes sur le référendum d’initiative partagée après l’annonce d’une saisine gouvernementale
Cette annonce surprise d’un recours gouvernemental a provoqué quelques sueurs froides à gauche. Toute la question était de savoir si l’exécutif exigeait de la part des Sages un examen du texte en urgence, c’est-à-dire en huit jours, contre un mois dans le cadre d’une procédure classique. « Le recours en urgence, ça aurait pu être pour nous emmerder sur le RIP », nous expliquait ce matin un sénateur socialiste de premier plan. Un mauvais pressentiment partagé également sur Twitter par le sénateur PS Rémi Cardon. « Est-ce qu’il n’y a pas une volonté du gouvernement de bloquer le RIP ? »
Sauf hypothèse d’une censure globale, une validation rapide – même partielle – aurait ouvert la porte vers la promulgation, et aurait donc rendu caduque la demande d’un référendum d’initiative partagée, puisque ce denier ne peut s’appliquer à une loi promulguée il y a moins d’un an.
Invité ce matin de RTL, le porte-parole du gouvernement Olivier Véran a semble-t-il éloigné les craintes d’une saisine en urgence. « Dans un délai d’un mois maximum, le Conseil constitutionnel nous dira si oui ou non l’ensemble du texte ou tout ou partie du texte est conforme aux règles constitutionnelles », a-t-il détaillé.
« Il y a eu un peu d’affolement et d’interrogations hier. Si ça reste bien dans l’ordre prévu, et ça a l’air d’être le cas, il n’y a pas de danger sur la proposition de loi du RIP », commente-t-on au groupe communiste du Sénat.
Si beaucoup de socialistes voient dans le RIP un moyen de « poursuivre la mobilisation » et d’en faire une sortie de crise en accordant la parole aux électeurs, d’autres doutent des chances de succès de l’opération. À commencer par sa recevabilité. « Je ne suis pas sûr que le Conseil constitutionnel accepte », considère un membre du groupe socialiste au Sénat. Ces deux dernières années, les Sages ont retoqué deux projets de RIP, l’un pour « garantir un accès universel à un service public hospitalier de qualité », un autre en faveur d’une création d’une taxe sur les bénéfices exceptionnels des grandes entreprises.
Les groupes de gauche devraient s’exprimer ce 21 mars, à 17 heures, pour une conférence de presse commune à l’Assemblée nationale.