Nouveau tour de force pour la mobilisation contre la réforme des retraites. Mardi, les syndicats ont réuni dans les rues plus de manifestants que le 19 janvier (1,2 million selon le ministère de l’Intérieur, 2,5 millions selon la CGT). En revanche, le nombre de grévistes dans le secteur public accuse une légère baisse : environ 10 % de moins à la SNCF, chez les agents de la fonction publique d’Etat et chez les enseignants, et une baisse de 4 % du côté d’EDF. « Faire la grève n’est pas facile, c’est perdre de l’argent. Ce qui compte, ce sont les gens qui se mobilisent dans la rue », a balayé ce mercredi 1er février François Hommeril, le président de la CFE-CGC, le syndicat de l’encadrement, au micro de « Bonjour chez vous » sur Public Sénat.
Pour ce responsable syndical, « la mobilisation donne une image assez bonne de ce qu’est le rejet de la réforme des retraites dans la population, à plus de 80 % ». Il relève les fortes mobilisations en région, dans les villes moyennes notamment. « Il y a une volonté répartie de façon très uniforme dans le pays de se mobiliser. J’habite en Haute-Savoie. Les chiffres enregistrés à la manifestation d’Albertville sont plus forts que jamais, hier c’était encore plus visible que le 19 janvier. C’est l’expression d’une volonté partagée, tous secteurs confondus et toutes générations confondues », salue notre invité.
« Je mise sur une division de la majorité présidentielle, je constate qu’elle est en train de s’installer »
Si le gouvernement a pu être surpris par l’ampleur des cortèges qui ont défilé à travers la France le 19 et le 31 janvier, la baisse du nombre de grévistes est un indicateur que l’exécutif devrait suivre de très près à l’occasion des deux prochaines journées de mobilisation, le 7 et le 11 février. « Ce que dit le gouvernement sur le sujet, j’ai appris à le prendre avec beaucoup de distance. Il y aurait eu 10 millions de personnes dans la rue, ils seraient allés chercher le taux de grève dans une sous-préfecture en disant : ça a baissé à cet endroit-là », raille François Hommeril. « Je mise sur une division de la majorité présidentielle, je constate qu’elle est en train de s’installer », poursuit ce leader syndical, qui évoque notamment les déclarations discordantes de certains responsables gouvernementaux, notamment celles du ministre Franck Riester sur les femmes, « un peu pénalisées » par la réforme.
« Le gouvernement a perdu la bataille de l’opinion, ce qui le rend nerveux. Quand on commence à perdre le match, on finit par dire des bêtises. Sur l’argumentaire qui justifie la réforme, le gouvernement dit n’importe quoi. Olivier Dussopt, le ministre du Travail, se fout du monde en disant devant l’Assemblée nationale qu’un système avec 180 milliards de réserves est en faillite ! Ça n’est pas sérieux, il se déjuge lui-même », s’agace le président de la CFE-CGC. François Hommeril fait ici référence aux réserves constituées par les régimes complémentaires, qui ne sont pas gérés par la Sécurité sociale, et dont les fonds ont été évalués à 180,4 milliards d’euros dans le dernier rapport du Conseil d’orientation des retraites (COR).
Mardi soir sur TF1, Gabriel Attal, le ministre des Comptes publics, a appelé les syndicats à éviter les blocages et à « respecter les Français qui prennent des vacances bien méritées ». « Le coup du blocage, cela n’est pas sérieux, s’il n’y a plus que ça comme argument du côté du gouvernement, c’est faible, très faible », réagit François Hommeril.
Les Français unis
« La solidarité de l’ensemble des Français est forte, les syndicats devront être attentifs à ne pas développer des actions qui pourront amoindrir cette solidarité », avertit toutefois ce responsable syndical. Et de préciser : « Tous les moyens ne sont jamais bons. Ma limite, ce sont les actions ciblées et agressives vers d’autres personnes, comme les coupures d’électricité, je pense que c’est contre-productif. »