La porte-parole du gouvernement Maud Bregeon a assuré ce mercredi à la sortie du Conseil des ministres qu’Emmanuel Macron a acté qu’il n’y avait pour le moment pas « de socle plus large que celui qui est en place aujourd’hui » pour gouverner. Mais, après les consultations des responsables de partis mardi, « le président continue à écouter et à tendre la main ».
Réunion des parlementaires à Matignon : trois hypothèses sur la table, un confinement le week-end privilégié
Par Pierre Maurer
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L’exécutif prépare les Français depuis le début de la semaine. Mardi soir, le Premier ministre Jean Castex n’a pas caché sur BFMTV que « le moment était venu pour envisager des dispositions pour la région francilienne », alors que la France est entrée dans une « forme de troisième vague ». Mercredi, à la suite du désormais traditionnel Conseil de défense, le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal a concédé qu’il « a été décidé que des mesures supplémentaires allaient être prises » dans les Hauts-de-France et en Ile-de-France. Le niveau d’occupation des lits de réanimation est quant à lui préoccupant, avec 1 161 Franciliens en réanimation selon les chiffres du jour. Selon l’Express et le Figaro, Jean Castex et Olivier Véran devraient annoncer jeudi soir lors de leur conférence de presse un confinement le week-end en Ile-de-France et les Hauts-de-France… Ne resterait plus qu’à décider des modalités.
Trois hypothèses de confinement
En attendant, le Premier ministre recevait ce mercredi soir les présidents des groupes parlementaires pour un point d’étape - devenu synonyme d’annonces importantes le lendemain - à Matignon. Avant la rencontre, Gérard Larcher avait affirmé aux présidents de groupes sa volonté d’avoir des échanges constructifs et de ne pas subir simplement les annonces, critique souvent formulée lors des dernières rencontres. Premier constat : « Aucune nouvelle », résume le président des sénateurs socialistes Patrick Kanner. « On s’attendait à des mesures territorialisées, c’est ce que l’on nous a annoncé », poursuit-il. Trois hypothèses sont sur la table : un confinement le week-end, un confinement augmenté sur le modèle de novembre dernier, et un confinement strict comme en mars 2020. « Le confinement sur le modèle du mois de mars, personne n’en veut. Novembre, pas impossible. Au minimum ce sera sur le modèle de Dunkerque », traduit en format télex l’ancien ministre de François Hollande. « Je pense que ce sera plutôt un confinement comme dans le Sud et à Dunkerque », confirme Guillaume Gontard, président du groupe des écologistes. « La démarche du gouvernement est assez orientée vers la logique territoriale. Ce qui répond à l’attente du Sénat. Mais cela dépend d’un tas de critères que seul le gouvernement a. Et puis on n’a pas encore le recul nécessaire pour mesurer l’impact du confinement le week-end à Dunkerque et ailleurs », ajoute le président des centristes, Hervé Marseille.
Circulation du variant anglais à 70 %
Au rayon des données inquiétantes, Jean Castex, aux côtés du ministre de la Santé Olivier Véran et du Directeur général de la Santé Jérôme Salomon, a affirmé que le variant anglais circulait à 70 % dans les territoires. « J’ai dit que le 28 janvier on était à 10 % de circulation, on a laissé les choses filer ! », s’insurge Patrick Kanner qui estime que Jean Castex et Olivier Véran « savaient qu’il fallait prendre des restrictions ». « La situation est très inquiétante en Ile-de-France, région la plus touchée », appuie Guillaume Gontard, ajoutant qu’il y a, selon les chiffres dévoilés par les ministres, une « augmentation des contaminés sur la tranche 20-39 ans, quand les contaminations chez les plus âgés baissent grâce aux vaccinations ».
Par ailleurs, lors des deux heures de réunion où étaient aussi présents le ministre des Relations avec le Parlement Marc Fesneau et le secrétaire d’Etat chargé de l’Europe Clément Beaune, le Premier ministre a beaucoup interrogé les parlementaires sur « l’acceptabilité des mesures ». « Tout le monde s’en préoccupe. Mais il y a un problème : entre l’acceptabilité et le tri à l’entrée des hôpitaux… », souligne Patrick Kanner. « Cela passe par la transparence. Et là, on a l’impression que ça recommence à zéro. Il y a des incohérences », regrette Guillaume Gontard qui plaide pour la mise en place d’un « protocole plus clair ». Il insiste : « J’ai l’impression qu’on va re-réfléchir au déconfinement. On aurait 3 ou 4 stades, ce serait plus clair. Il y a aussi la nécessité de réfléchir à comment nous allons vivre avec le covid-19 et de voir comment pour les étudiants, la culture, on pourrait travailler précisément pour ouvrir un petit peu. » Mais la question du long terme n’a pas vraiment été abordée par le Premier ministre, constate Hervé Marseille. « Je n’ai pas eu vraiment de réponse », regrette Guillaume Gontard qui a évoqué le sujet.
Pas d’annonces sur les secteurs touchés
Concernant le vaccin AstraZeneca, dont les vaccinations sont suspendues depuis lundi, Jean Castex a réaffirmé qu’il se ferait vacciner une fois la décision de l’Agence européenne du médicament dévoilée. « Quand on lui dit qu’il a été contredit par le président de la République, il dit que personne n’aurait compris que la France ne suive pas la décision des partenaires européens. Il s’en remet aux autorités européennes », confie Hervé Marseille qui a noté chez le chef du gouvernement un « souci de transparence ». La décision européenne doit être rendue jeudi. « Ce sont des mesures de freinage donc on a besoin de ce vaccin », martèle le centriste.
Etat psychologique du pays, culture… Jean Castex n’a pas fait d’annonces précises. « Il m’a dit qu’il y aurait des mesures et des annonces sur la question psychologique », assure Guillaume Gontard, sans avoir plus de précisions. « C’est comme la culture : il a dit que pour l’instant il n’y avait pas de mesures de levée des contraintes. Mais éventuellement des perspectives de réouvertures spécifiques », détaille Hervé Marseille.
Décision en avril pour les régionales
Conformément à ce qui était prévu, le Premier ministre a indiqué attendre la remise de l’avis du Conseil scientifique le 1er avril pour maintenir ou non les élections régionales en juin. Concrètement, l’option de les reporter n’est pas « écartée », analyse Patrick Kanner. « En gros, il y a une hypothèque mais pas besoin d’être grand clerc pour savoir que si la circulation est haute, une décision sera prise », abonde Hervé Marseille. « Si l’avis du Conseil est négatif, il faudra un nouveau texte », anticipe déjà Guillaume Gontard. « Idem pour l’état d’urgence. Tel que c’est présenté il faudra que le gouvernement revienne devant le Parlement pour le prolonger », poursuit-il.
Enfin sur la « méthode » de consultation, les parlementaires ne sont toujours pas convaincus. « On vous informe, on vous consulte un petit peu, mais la décision on la prend sans vous », déplore Patrick Kanner. « On se demande à quoi on sert. On sait très bien que la décision sera prise par Emmanuel Macron. Tous les présidents de groupe ont rappelé qu’on pourrait avoir des échanges plus réguliers et courts », dévoile Guillaume Gontard. Seul Hervé Marseille semble satisfait. « Ça a duré deux heures donc il a pris le temps d’échanger. Je pense que, comme l’a souhaité le président du Sénat, c’est important qu’il y ait ces échanges pour qu’on n’apprenne pas les informations seulement par les agences de presse ». Président du groupe Les Républicains, Bruno Retailleau participait également à la réunion. Son entourage nous a fait savoir qu’il n’avait « rien à en dire ».