Depuis la reprise de l’examen du projet de la loi de finances au Sénat, il ne se passe pas un jour sans que les esprits s’échauffent autour d’une coupe budgétaire inscrite dans des amendements du gouvernement, déposés, souvent, à la dernière minute. Les élus de la France Insoumise y voient l’illustration d’un fourvoiement du PS qui n’a pas voté la censure la semaine dernière. Les socialistes misent, eux, sur la commission mixte paritaire pour continuer à faire pression.
Révision de la Constitution : « Ça fait 5 ou 6 ans qu’Emmanuel Macron fait des annonces », affirme Jean-Louis Debré
Par Henri Clavier
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Chez les Debré, la Ve République est une histoire de famille, c’est le père de Jean-Louis Debré, Michel Debré qui en est à l’origine, tant dans la rédaction que dans l’inspiration politique. Car comme le rappelle l’ancien président du Conseil constitutionnel, « c’était un projet politique [la Constitution de la Ve République] devenu une réalité ». Celui qui fut également président de l’Assemblée nationale et proche de Jacques Chirac livre sa vision des contestations de la Ve République et son avis sur l’évolution de la vie politique.
La Constitution de la Ve ? Une réponse à « l’incapacité de l’État à gouverner la France »
À l’occasion du 65e anniversaire du texte fondateur de la Ve République, Jean-Louis Debré a voulu mettre en avant les vertus du texte constitutionnel, en dépit des critiques toujours plus prononcés contre le fonctionnement actuel des institutions. « C’est une Constitution qui a examiné le fonctionnement de l’Etat et analysé les causes de l’échec, de l’incapacité de l’Etat à gouverner la France. » Conformément à la volonté de Charles de Gaulle, la Constitution tente d’effectuer une synthèse des précédentes expériences constitutionnelles françaises. La Ve République a voulu rompre avec l’instabilité ministérielle qui pouvait exister sur les précédents régimes et stabiliser le pouvoir en installant un exécutif fort. Pour Jean-Louis Debré, « c’est trop facile de dire que ce sont les institutions » qui sont responsables du désintérêt de la politique. A l’inverse, « plus le climat politique est détérioré, plus les institutions montrent leur utilité. Les institutions ont permis à la crise politique de ne pas se traduire par une crise gouvernementale », estime Jean-Louis Debré en faisant référence aux Gilets Jaunes.
Pour l’ancien président de l’Assemblée nationale, la difficulté ne se situe pas au niveau des institutions mais plutôt au niveau de leur pratique. « Les politiques n’ont plus rien à dire. Il n’y a plus de combat d’idées », souffle Jean-Louis Debré qui appelle à ce que les « hommes et femmes politiques s’interrogent sur l’image qu’ils véhiculent ».
« L’utilisation des référendums sous la Ve montre que bien souvent on ne répond pas à la question posée »
Naturellement, l’ancien juge constitutionnel a commenté les pistes qui circulent concernant une révision du texte constitutionnel alors qu’Emmanuel Macron s’exprime ce matin devant le Conseil constitutionnel. « Sur la Constitution, ça fait 5 ou 6 ans qu’Emmanuel Macron fait des annonces », souligne Jean-Louis Debré, sceptique sur la capacité du chef de l’Etat à porter cette révision de la Constitution. Si ce dernier n’est pas hostile à un élargissement du champ du référendum à l’immigration, il précise tout de même que « l’utilisation des référendums sous la Ve montre que bien souvent on ne répond pas à la question posée ».
Enfin, Jean-Louis Debré a exprimé son incompréhension quant à l’inscription de l’autonomie de la Corse dans la Constitution. « Comment est-ce que, juridiquement, on rédige ça ? Est-ce que l’autonomie va remettre en cause l’article premier de la Constitution ? » Exemplaire relié de la Constitution à la main, Jean-Louis Debré s’interroge sur la faisabilité de cette révision sans que cela ne rentre en conflit avec d’autres dispositions de la Constitution.
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