« Ridicule », « irresponsable », « greenwashing du jeu » : unanimité au Sénat contre le loto de la biodiversité
Lors de l’examen du budget 2023, le Sénat s’est montré unanime contre la proposition de la majorité présidentielle de créer un « loto de la biodiversité » pour financer des actions pour préserver l’environnement. Mesure « irresponsable » face aux enjeux soulevés, rendement fiscal « ridicule », incitation à des pratiques de jeu addictives : les sénateurs de tous les bancs n’ont pas manqué de mots pour dénoncer l’initiative de députés Renaissance.

« Ridicule », « irresponsable », « greenwashing du jeu » : unanimité au Sénat contre le loto de la biodiversité

Lors de l’examen du budget 2023, le Sénat s’est montré unanime contre la proposition de la majorité présidentielle de créer un « loto de la biodiversité » pour financer des actions pour préserver l’environnement. Mesure « irresponsable » face aux enjeux soulevés, rendement fiscal « ridicule », incitation à des pratiques de jeu addictives : les sénateurs de tous les bancs n’ont pas manqué de mots pour dénoncer l’initiative de députés Renaissance.
Louis Mollier-Sabet

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Le déclenchement du 49-3 à l’Assemblée n’avait pas permis aux députés de débattre de la mesure, et c’est peut-être presque tant mieux vu l’accueil réservé au Sénat. Emanant de députés Renaissance, la proposition de la création d’un « loto de la biodiversité » avait été reprise par l’exécutif dans le projet de loi de finances considéré comme adopté par l’Assemblée nationale. Sur le modèle du « loto du patrimoine », créé en 2017 pour financer la Fondation du patrimoine par une partie des revenus générés par le Loto du patrimoine, le but était de financer l’Office français de la biodiversité par un Loto dédié. Une fausse bonne idée, répond unanimement le Sénat.

« C’est trop important pour être laissé aux jeux de hasard »

« Le loto spécifique sur le patrimoine est assez bien identifié et a un avantage : donner un coup de projecteurs sur des biens patrimoniaux qui font l’identité de la France », a ainsi expliqué Jean-François Husson, rapporteur général LR du budget, qui a déposé un amendement de suppression de l’article en question, avant d’ajouter : « Mais là, on est sur des fonctions régaliennes de l’Etat, sur des missions liées à l’écologie qui méritent bien d’autres moyens. […] C’est trop important pour être laissé aux jeux de hasard. C’est irresponsable. »

Christine Lavarde, sénatrice LR, a, elle aussi, déposé un amendement de suppression de l’article et dénonce « un rendement de la mesure de 10 millions d’euros » : « C’est mépriser tout ce qui est fait par le ministère, l’Office français de la biodiversité ou les collectivités. » La sénatrice des Hauts-de-Seine s’est par ailleurs dit « assez choquée » d’avoir été invitée par le directeur général de l’Office national de la Biodiversité à un « déjeuner-débat sur l’engagement des entreprises pour la préservation de la biodiversité, avec en témoignage Stéphane Pallez, PDG de la Française des Jeux. »

« Un mélange des genres rédhibitoire éthiquement »

Parce que l’initiative soulève un autre problème : le financement de politiques publiques par l’incitation aux jeux d’argent. « Le faire par un loto, c’est dangereux, c’est un enjeu de santé publique », alerte Christine Lavarde. « Le gouvernement fait en ce moment une campagne de sensibilisation à l’addiction qui peut être créée par le jeu sur les paris sportifs », plaide la sénatrice.

La gauche aussi a déposé des amendements de suppression, et notamment Angèle Préville, sénatrice socialiste, qui développe la même argumentation que ses collègues de la majorité sénatoriale : « La biodiversité mérite des ressources pérennes, cela ne peut s’appuyer sur une incitation aux jeux d’argent, sources de comportements addictifs, de difficultés sociales et financières, mais aussi de problèmes psychologiques. C’est un enfer pour les familles qui le subissent », a-t-elle expliqué en dénonçant un « greenwashing du jeu » et un « mélange des genres rédhibitoire éthiquement. »

Gabriel Attal a simplement formulé un avis défavorable sur les amendements de suppression, ne développant pas davantage la position du gouvernement sur le sujet. « Le mutisme du ministre traduit de l’embarras », a analysé le sénateur LR François Bonhomme. Si le ministre des Comptes publics n’a pas pris la parole aujourd’hui, l’exécutif devra se positionner définitivement sur cette mesure lors de la navette parlementaire entre le Sénat et l’Assemblée.

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