« C’est assez historique », a reconnu le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin. L’article 4 de la proposition de loi sécurité globale devrait en effet mettre fin à une particularité ancestrale de la ville de Paris : son absence de police municipale. Dans la nuit du 16 au 17 mars, le Sénat, à majorité de droite et du centre, a adopté l’article 4 actant le principe d’une police municipale parisienne, quatre mois après les députés. Une fois la loi définitivement adoptée puis promulguée, il reviendra au Conseil de Paris de décider de la création d’une police municipale et de ses missions.
Héritage d’une longue histoire, l’Etat gardait la main exclusive sur la sécurité dans la ville capitale, une ville « pas comme les autres », selon le ministre, qui a rappelé la concentration des lieux de pouvoir, politiques et économiques. S’il n’était pas nécessaire de remonter jusqu’au Premier empire, le débat autour d’une police municipale à Paris est quand même relativement ancien. Dans l’hémicycle, le sénateur LR Philippe Dominati a brandi la première page d’un journal de 1991, évoquant une proposition de création de police municipale dans la capitale. Le serpent de mer pourrait prendre fin, grâce à un alignement des planètes. Le sujet fait aujourd’hui l’objet d’un consensus assez large, de la droite à la gauche. La maire de Paris, Anne Hidalgo, s’est finalement convertie à cette idée. Et le gouvernement est prêt à accompagner le mouvement.
« La création d’une police municipale à Paris est indispensable et urgente. Elle doit permettre à la préfecture de police de recentrer ses missions sur le maintien de l’ordre, la lutte contre la criminalité et la lutte contre le terrorisme », a encouragé Pierre Charon. Le sénateur LR s’est toutefois dit « extrêmement inquiet » du refus de la maire de Paris d’armer cette nouvelle police. A gauche, la sénatrice de Paris Marie-Pierre de la Gontrie a souligné les convergences de vues sur la nécessité de créer cette police municipale. « C’est quand même une très bonne chose ».
Le Sénat ajoute un Conseil parisien de sécurité, pour associer les maires d’arrondissement
Dans la version sortie du Sénat, l’article 4 prévoit la création d’une instance spéciale, réunissant les maires d’arrondissement. L’ajout s’est fait en commission des lois, sous l’impulsion de la sénatrice LR de Paris, Catherine Dumas. Ce « Conseil parisien de sécurité », où siégerait le maire de Paris, les maires d’arrondissement et le préfet de police de Paris, serait « consulté sur les politiques municipales en matière de sécurité et de tranquillité publiques ainsi que sur la doctrine d’emploi de la police municipale ».
Le groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste (CRCE), par la voix de Pierre Laurent, a tenté de s’opposer à l’article 4. « Il intervient dans le cadre d’une loi de sécurité globale qui entretient une confusion préjudiciable entre les missions de police municipale et les missions de sécurité publique de la police nationale […] Vous dites qu’il faut créer la police municipale à Paris, mais en vérité, vous dites qu’il faudrait créer plus de policiers nationaux à Paris, et c’est bien cela le sujet », s’est opposé le sénateur communiste de Paris.
La discussion, qui a pris des allures de « Conseil de Paris », comme s’en est excusée Marie-Pierre de la Gontrie, n’a toutefois pas empêché certains sénateurs d’imaginer les conséquences sur les autres parties du pays. Jérôme Bascher (LR), sénateur de l’Oise, a ainsi rappelé que la capitale était la ville qui comptait le plus de policiers nationaux et gendarmes en garde statique par habitant. « J’espère que vous pourrez redéployer ces forces de police nationale qui manquent tant dans les villes que vous visitez », a-t-il déclaré au ministre.