Le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2021 ne ressemblera à aucun autre. En présentant fin septembre les grandes lignes de ce texte annuel à la base des politiques de santé, le gouvernement en était conscient. Il s’agit de « l’un des exercices les plus singuliers depuis la création du PLFSS en 1996 », expliquait-il. Les travaux parlementaires débutent officiellement ce 7 octobre, jour de l'adoption du texte en Conseil des ministres, avec l’audition d’Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé, et d’Olivier Dussopt, ministre délégué chargé des comptes publics, devant les deux chambres du Parlement. La nouvelle commission des Affaires sociales du Sénat, présidée par la sénatrice LR Catherine Deroche, va les entendre à 18h30.
Sans tenir compte des crédits liés à la crise de la Covid-19, l’objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam) progressera de 6 % en 2021, soit 12,5 milliards de dépenses d’assurance maladie supplémentaires. En 2020, l’Ondam devrait augmenter de 7,6 %, sous l’effet des réponses à la crise sanitaire et d’une partie des engagements du Ségur de la Santé conclu cet été. Durant les années 2010, l’Ondam progressait chaque année à un niveau légèrement supérieur à 2%.
Ce PLFSS traduit les engagements du gouvernement pris dans le cadre du Ségur de la Santé, réuni pour répondre au malaise des personnels soignants. Il prévoit notamment 8,8 milliards d’euros de revalorisation salariale pour les personnels hospitaliers et les Ehpad sur la période 2020-2023. L’augmentation mensuelle de 90 euros par mois en septembre sera suivie d’une nouvelle revalorisation de 93 euros en mars 2021.
Plongeon du déficit du régime général en 2020
Aux mesures d’urgence liées à la crise, s’ajoutent des pertes importantes de recettes, notamment la chute de rentrée des cotisations sociales pendant le confinement. Alors qu’il se rapprochait de l’équilibre en 2018 et en 2019 (déficit à 1,9 milliard d’euros), le solde de la Sécurité sociale s’est brutalement dégradé en 2020. Le déficit du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse est attendu à 44,4 milliards cette année. Le redressement de la trajectoire des comptes sociaux sera long. En 2021, le déficit devrait se stabiliser entre 25 et 30 milliards, et ne devrait pas repasser sous la barre des 20 milliards les trois années suivantes.
Lors de l’examen du dernier texte social cet été (projet de loi relatif à la dette sociale et à l’autonomie), le Sénat à majorité de droite et du centre avait notamment insisté sur la nécessité de rendre le système de protection sociale français soutenable pour les générations futures, en plein débat sur l’amortissement de la dette sociale. Le Sénat avait notamment plaidé pour l’instauration d’une règle d’or, hors période de crise majeure (relire notre article).
La Cour des comptes appelle à agir pour sauvegarder la Sécurité sociale dans la durée
Ce 7 octobre, c’est la Cour des comptes qui a tiré la sonnette d’alarme sur la trajectoire budgétaire dans son rapport annuel, s’inquiétant de la pérennité de la Sécu. Pour rétablir l’équilibre financier, les magistrats recommandent notamment d’approfondir la réforme des groupements hospitaliers de territoire ou encore de simplifier le système de financement des hôpitaux, un aspect qui sera d’ailleurs abordé par le présent PLFSS. Plaidant pour une amélioration de « l’efficience de notre système de santé », les Sages de la rue Cambon poussent pour une meilleure régulation des prescriptions de dispositifs médicaux. Ils résument ainsi l’enjeu : il faut agir sur les « ressorts structurels de la dépense d’assurance maladie sans pour autant réduire la qualité de prise en charge des patients ».
Ils appellent également à « mieux cibler certaines dépenses de solidarité ». Selon eux, les minima de pensions indispensables aux petites retraites gagneraient à être « harmonisés » et « simplifiés ». Ils notent aussi que la branche famille de la Sécu a échoué à atteindre les objectifs de création de places dans les crèches, « malgré l’augmentation des financements », et à réduire les inégalités territoriales.
Avant la loi sur le grand âge et l’autonomie, ce PLFSS 2021 matérialisera aussi la mise en place de la cinquième branche de la Sécurité sociale, actée cet été par le Parlement. La politique de l’autonomie disposera de recettes qui lui sont propres.