François Bayrou écarte une suspension de la réforme des retraites
A quelques heures du discours de politique générale, le premier ministre a commencé à donner ses arbitrages aux présidents des groupes du socle commun.
Par Public Sénat
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Des filières engorgées contraintes de recruter par tirage au sort quand d'autres sont délaissées, une plateforme informatique d'orientation (APB, pour admission post-bac) totalement saturée et, en bout de ligne, un taux d'échec de près de 60% en première année de fac. Face aux failles criantes du système actuel, la ministre de l'Enseignement supérieur Frédérique Vidal a cherché l'équilibre entre la nécessité de réformer les modalités d'accès à l'université sans toutefois instaurer une sélection, « chiffon rouge » pour de nombreuses organisations syndicales, étudiantes et de parents d'élèves, attachées au principe historique d'accès pour tous à l'enseignement supérieur par le baccalauréat. Retour sur les principales manifestations.
La première cohabitation de la Vème République voit arriver un deuxième gouvernement Chirac en mars 1986. À l‘automne, le secrétaire d'État aux Universités, Alain Devaquet, dépose un projet de loi, qui accorde une autonomie plus grande aux universités, notamment sur les conditions de recrutement des étudiants. Il était prévu que les établissements « déterminent librement les formations qu'ils dispensent et les diplômes qu'ils délivrent » et fixent les conditions de passage d'un cycle à l'autre. En ce sens, le projet de loi introduisait une notion de sélection dans l'accès des bacheliers aux études supérieures.
Des manifestations monstres auront lieu pendant un mois. L’actuel sénateur socialiste de Paris, David Assouline, figure parmi les porte-parole de la coordination étudiante. C’est en marge d’une de ces mobilisations, le 6 décembre, que l’étudiant Malik Oussekine trouvera la mort, frappé par les « voltigeurs », des policiers à moto armés de matraques. Ce drame a des conséquences politiques directes. Alain Devaquet démissionne dans la foulée et Jacques Chirac annonce le retrait du projet de loi le 8 décembre.
L’arrivée de Jacques Chirac à l’Élysée est suivie, dans les mois qui viennent, de réformes ambitieuses menées au pas de charge par le Premier ministre, Alain Juppé. Dans le sillage du «plan Juppé » sur les retraites et la protection sociale, François Bayrou, alors ministre de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur, propose « un plan d’urgence » pour les universités. Parmi les pistes de réflexions : la création d’une nouvelle filière technologique, la réforme du premier cycle et un programme de formation à l’orientation de futurs bacheliers.
De nombreux étudiants craignent l’arrivée d’une sélection qui ne dit pas son nom et se joignent aux cortèges des manifestants de cette fin d‘année 1995. «Le problème n'est pas de savoir si le bac doit rester ou non un passeport pour l'université ». Mais (…) « de changer les premiers cycles, de changer l'orientation avant le bac et de diversifier les filières » éludait Alain Juppé.
Nicolas Sarkozy, député des Hauts-de-Seine, en disgrâce dans sa famille politique à cette époque, était plus clair. La sélection était pour lui la « meilleure garantie de l'égalité des chances ». « La sélection par le diplôme et le travail est le moyen d'éviter la sélection scandaleuse par l'argent ». Invité sur France 2 le 22 novembre 1995, François Bayrou précisera que son gouvernement ne veut pas « fermer les portes » de l’université. « On n’a pas le droit de priver un jeune de pouvoir tenter sa chance. Il n’y a rien de plus cruel et de plus révoltant »
En 2003, alors que le gouvernement met en place l'uniformisation européenne des diplômes (LMD licence-master-doctorat) le ministre de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur, Luc Ferry veut mettre en marche une deuxième réforme sur l’autonomie des universités. Les principales inquiétudes des étudiants concernent la hausse des droits d’inscription, le rapprochement des facultés avec les entreprises et les collectivités locales afin de créer « des réseaux européens et des pôles d'excellence ». Les syndicats craignent une mise en concurrence des universités qui induiraient une sélection insidieuse des étudiants. Luc Ferry aura beau marteler : « ni sélection à l'entrée de l'université, ni modification du régime des droits d'inscription (…) ni mise en concurrence des universités françaises entre elles», il retirera son projet de loi sur l’autonomie des universités.
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