Sénateurs et médecins : « Reprendre du service : c’était une évidence »
Avant d’être élus sénateurs, ils étaient médecins. Certains ont gardé une activité partielle en parallèle de leur mandat de parlementaire. D’autres avaient abandonné leur métier. En pleine crise sanitaire, ils ont troqué leur écharpe d’élu pour la blouse blanche.

Sénateurs et médecins : « Reprendre du service : c’était une évidence »

Avant d’être élus sénateurs, ils étaient médecins. Certains ont gardé une activité partielle en parallèle de leur mandat de parlementaire. D’autres avaient abandonné leur métier. En pleine crise sanitaire, ils ont troqué leur écharpe d’élu pour la blouse blanche.
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Par Flora Sauvage

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Pour eux, il n’était pas possible de rester les bras croisés. Face à l’épidémie de Covid 19, Véronique Guillotin a décidé de se porter volontaire pour renforcer l’équipe de soignants de l’hôpital du Mont Saint Martin, en Meurthe et Moselle. Médecin généraliste et gériatre de formation, cette sénatrice du mouvement radical avait arrêté de travailler en septembre 2017 lors de son élection à la Haute assemblée pour se consacrer entièrement à son mandat de parlementaire. Devant l’ampleur de l’épidémie de Covid 19, la sénatrice tente de s’inscrire à la réserve sanitaire, mais face à la complexité de la démarche, elle prend contact avec l’Agence régionale de santé du Grand Est ainsi que la direction de l’hôpital de proximité.

« J’ai été très bien accueillie à l’hôpital »

« Je les ai appelés pour leur dire que j’étais disponible pour reprendre du service » raconte-elle. Le lendemain, l’hôpital la rappelle. « J’ai été très bien accueillie par l’équipe, je suis là en soutien, j’essaie d’absorber une partie de leurs patients pour les soulager » raconte-t-elle. Depuis dix jours, Véronique Guillotin assiste l’équipe affectée à l’unité Covid 19 de l’hôpital. « On peut ouvrir jusqu’à 20 lits dans cette unité, si l’état des patients au scanner est stable, on les garde, si leur état se dégrade on les descend en réanimation à l’étage inférieur. Et quand cela dépasse nos capacités en termes de lits, on transfère les patients à Nancy » dit-elle.

« Comme une évidence »

Satisfaite de pouvoir aider, reprendre du service à l’hôpital s’est présenté « comme une évidence » pour Véronique Guillotin. D’autres sénateurs, jonglent entre leurs deux fonctions. C’est le cas de Jean-François Rapin, médecin généraliste et sénateur LR du Pas-de-Calais. Il n’a jamais abandonné la pratique de la médecine de ville. Il assure une présence à temps partiel au cabinet médical les lundis et samedi matin. Depuis le début de l’épidémie, quelques cas suspects ont été détectés, mais sans tests de dépistage, impossible d’affirmer qu’il s’agit de patients contaminés au Covid 19. Une patiente de retour du Morbihan avec une rhinite a été confinée chez elle tout comme un patient de retour de Paris avec 40 de fièvre. « En fait, je considère que tous les patients qui présentent les symptômes d’une rhinite, sont susceptibles d’être Covid 19 positif » dit-il. Lui-même présente de légers symptômes mais il n’a pas fait le test.

Le parking a été transformé en salle d’attente

Pour limiter les risques, « nous avons interdit l’accès à la salle d’attente, les patients attendent dans leur voiture, et les médecins vont les chercher sur le parking ». Mais ce que Jean-François Rapin craint le plus, c’est la fin du confinement : « une fois le pic épidémique passé, je ne vois pas comment on va décréter la fin du confinement uniquement en fonction de la baisse du nombre de cas. Il faudra passer par un dépistage massif de tous les soignants », affirme-t-il.

« Il n’y a pas de remède miracle »

Quant au traitement à l’hydroxychloroquine mis en avant par le professeur Didier Raoult de l’Institut hospitalo-universitaire Méditerranée infection à Marseille, et présenté comme un remède miracle, le sénateur reste prudent. « Faire une étude sur 24 patients seulement me perturbe un peu » dit-il. Aux yeux de Jean-François Rapin, cette étude doit être réalisée sur un plus grand nombre de patients. Même constat chez Bernard Jomier, sénateur de Paris et médecin généraliste : « C’est une molécule qui est prescrite à l’hôpital Bichat pour les patients les plus graves testés positifs au Covid 19 depuis 10-15 jours, mais si c’était le remède miracle on le saurait ».

Baisse de la fréquentation

Dans son cabinet du 19ème arrondissement de la capitale, ce sénateur socialiste qui a rejoint la réserve sanitaire pour prêter main-forte à l’hôpital de Melun (Seine-et-Marne), constate une baisse de la fréquentation. Pour accueillir les patients qui présentent des symptômes du Covid 19, la cuisine a été transformée en salle d’attente bis pour éviter que les patients se côtoient. La téléconsultation a massivement pris le dessus sur les consultations classiques : « Mais on touche vite les limites de la téléconsultation : cela nous rappelle l’importance de l’examen clinique ». Par ailleurs, Bernard Jomier craint les conséquences de l’épidémie pour les patients atteints de pathologies au long cours : « combien de décès surviendront par défaut de soins ? » s’alarme-t-il. Aux Pennes Mirabeau, Michel Amiel, sénateur (les Indépendants) des Bouches-du-Rhône, et médecin généraliste retraité depuis 5 ans, partage cette inquiétude : « certaines chimiothérapies sont annulées pour éviter de faire venir des patients fragilisés atteints de cancer à l’hôpital » affirme-t-il. Selon une étude publiée dans la revue The Lancet, la mortalité au Covid 19 des patients atteints de maladies cardiovasculaires et de cancers est très élevée.

Inquiétude légitime

Manque de masques, de surblouses, de lunettes. Les mesures de protections à disposition des personnels de santé restent insuffisantes. « L’inquiétude des soignants est légitime, quand on voit que sur cinq médecins décédés du Covid 19, quatre exerçaient en libéral », explique Bernard Jomier. En première ligne face au nouveau coronavirus, les soignants paient un lourd tribut dans la lutte contre l’épidémie.

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