Sénatoriales 2023 dans le Pas-de-Calais : la multiplication des candidatures

Dans le Pas-de-Calais, les listes se dessinent petit à petit. Face à une gauche qui part en ordre dispersé, la stratégie du camp présidentiel est encore floue et suspendue à la candidature de l’ex-ministre Brigitte Bourguignon. La droite mise sur la continuité et réinvestit ses sortants dans une liste mêlant LR et UDI. Le RN espère bien obtenir un siège dans ce fief de Marine Le Pen, dans la foulée de la vague frontiste des législatives.
Tâm Tran Huy

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L’arrivée d’Emmanuel Macron dans le paysage politique a rebattu les cartes politiques et comme souvent, les sénatoriales s’en font l’écho avec un temps de retard. En 2017, sur les 7 sièges du Pas-de-Calais, le Parti socialiste en avait obtenu 2 (Michel Dagbert et Sabine Van Eghe), la droite 2 également (Jean-François Rapin et Catherine Fournier), le sénateur MODEM Jean-Marie Vanlerenberghe avait été élu sous les couleurs de la majorité présidentielle, le sénateur Dominique Watrin avait porté la voix du PCF et avait fait un siège. Enfin, l’ex-maire PS Jean-Pierre Corbisez, parti en dissidence, avait été également élu.

La gauche part en ordre dispersé

Depuis, la donne a été bouleversée par l’évolution de la Macronie puisque l’ex-président du département, Michel Dagbert a rallié les rangs de Renaissance. Avec son départ, le PS a choisi de ne pas réinvestir Sabine Van Eghe : la candidate devrait donc mener sa propre liste MRC. C’est Blandine Drain qui portera les couleurs du Parti à la rose. Vice-présidente du conseil départemental, elle était déjà candidate pour le PS aux législatives l’an dernier, dans le cadre d’un accord de la NUPES.

Cette fois-ci, pas de NUPES, mais des listes dispersées à gauche. La sénatrice communiste sortante Cathy Apourceau-Poly, qui a pris la suite de Dominique Watrin après sa démission en 2018, accueille en 2e de liste le sénateur sortant, ex-dissident du PS, Jean-Pierre Corbisez qui siège au Sénat au groupe RDSE. L’élue communiste mise sur une campagne de proximité sur des thématiques comme le maintien des services publics, l’inflation et son poids pour les collectivités, ou encore la désindustrialisation. La sénatrice communiste est confiante sur sa réélection, celle de Jean-Pierre Corbisez est moins assurée.

Les écologistes partent de leur côté avec en tête de liste l’adjoint à la transition écologique de Vimy Julien Wojcieszak. Enfin, chef de file LFI pour les sénatoriales dans le Pas-de-Calais, le conseiller municipal d’opposition à Calais Jean-Philippe Lannoy n’espère pas faire de siège seul.

Les tiraillements de la majorité présidentielle

Côté majorité présidentielle, deux sortants se représentent aux sénatoriales. L’ex-président socialiste du département Michel Dagbert, élu sous les couleurs du PS, a rallié les rangs de la Macronie et siège au groupe Renaissance au Sénat. Le sénateur MODEM Jean-Marie Vanlerenberghe, doyen du Sénat, élu il y a 6 ans comme candidat de la majorité présidentielle, a préféré lui siéger au groupe UC. Ce choix de groupe et, dernièrement, son abstention sur la réforme des retraites ont fait grincer des dents du côté de certains ténors de la Macronie, qui auraient préféré le voir raccrocher les gants. Pour l’instant, le parlementaire de 84 ans, ex-rapporteur général du budget de la Sécurité sociale, entend au contraire bien repartir pour un tour. Michel Dagbert et lui ont annoncé être candidats au mois de septembre de façon certaine.

Les rumeurs font aussi état de deux candidatures de figures de la Macronie : Brigitte Bourguignon et Agnès Pannier Runacher. L’hypothèse de l’arrivée de la ministre de la Transition énergétique dans le Pas-de-Calais a été évacuée, assure un cadre du parti. En revanche, celle de Brigitte Bourguignon se confirme. Mais une grande inconnue demeure : sur quelle liste figurera l’ex-ministre des Solidarités et de la Santé, et dans quelle position ? Après avoir échoué en 2022 à se faire réélire lors des élections législatives, Brigitte Bourguignon espère bien se rattraper lors des élections sénatoriales. Elle aimerait mener la liste Renaissance et à défaut, ne sait pas encore si elle occuperait la 2e place de la liste MODEM (derrière Jean-Marie Vanlerenberghe) ou Renaissance (derrière Michel Dagbert). Ce qui n’est pas sans poser problème : impossible aujourd’hui de savoir dans quel ordre arriverait le trio alors qu’il n’y a, a priori, que 2 places pour 3 ambitions.

Des difficultés qui font craindre à certains, dans la majorité présidentielle, que l’histoire se termine mal et que tout le monde échoue à se faire élire. D’autant qu’Horizons pourrait s’inviter dans la danse avec Hubert Degrève, président des maires ruraux du Pas-de-Calais et maire du petit village de Tubersent. Michel Dagbert, lui, se veut aujourd’hui optimiste. « Le ciel est en train de s’éclaircir » juge aujourd’hui l’élu sortant, qui a pu longuement échanger avec Brigitte Bourguignon après l’inauguration cette semaine de la Gigafactory de Douvrin. Cette semaine, le bureau exécutif Renaissance s’est mis d’accord sur un vœu pour aboutir à une liste rassemblant toutes les composantes de la majorité présidentielle (MODEM, Renaissance et Horizons). Michel Dagbert espère bien que cette voie sera choisie par le parti au niveau national. Comme tous les sortants, il a été investi par Renaissance mais précise « sans préjuger de la place sur la liste. Ce n’est pas une revendication d’être en numéro 1 pour l’heure. » L’enjeu prioritaire pour lui : éviter les divisions qui pourraient profiter aux autres partis et surtout au RN.

La liste de la droite dans la continuité

A droite, le sénateur LR Jean-François Rapin repart en course avec en deuxième de liste, l’UDI Amel Gacquerre, devenue sénatrice en 2021 à la suite du décès de Catherine Fournier. Le sénateur se veut confiant pour la réélection des sortants : « la base de deux sièges est incontournable ». Il mise sur une présence sur le terrain tout au long de son mandat mais se veut prudent sur les pronostics. « La visibilité politique est moins nette qu’en 2017, les maires sont plus discrets sur leurs intentions de vote, sont moins politisés. » Si La Voix du Nord s’est fait l’écho d’une possible perte de voix  voire de siège, en raison du changement de couleur politique de Natacha Bouchart (l’ex-LR a soutenu Emmanuel Macron lors de l’élection présidentielle), Jean-François Rapin explique, lui, avoir été en contact direct avec la maire de Calais qui lui « a dit ne soutenir personne pour l’instant ».

Vers un siège pour le RN dans le Pas-de-Calais ?

Le Pas-de-Calais est enfin l’un des départements où le RN espère bien obtenir un siège. Comme en 2017, la liste RN est menée par Christopher Szczurek, adjoint de Steeve Briois à Hénin-Beaumont. Preuve de l’importance de ce scrutin pour le parti frontiste, le candidat du Rassemblement national a eu droit au soutien de Marine Le Pen pour lancer sa campagne jeudi 1er juin. La présidente du groupe à l’Assemblée nationale est venue dans ce département qu’elle considère comme son fief politique pour poursuivre au Sénat le mouvement entamé à l’Assemblée (88 députés).

Pour obtenir son siège, le RN compte sur la relation dégradée entre l’Etat et les maires, et espère aussi rallier des voix à droite : le choix en 3e de liste est l’ex-LR Benoît Hoguet (maire de Moncy-Cayeux). En 2017, Christopher Szczurek avait atteint le score de 6%. Depuis, le RN a gagné deux villes, perdu trois cantons et gagné de nombreux députés. Difficile de dire si de tout cela, sortira un siège de sénateur.

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