Service national universel : le Sénat veut se faire entendre
La commission des affaires étrangères du Sénat s’est exprimée ce midi sur le projet du président de la République d’instaurer un service national universel. Les sénateurs Jean-Marie Bockel et Jean-Marc Todeschini soulignent une initiative louable mais mettent en garde sur la méthode employée sur la protection du budget militaire.

Service national universel : le Sénat veut se faire entendre

La commission des affaires étrangères du Sénat s’est exprimée ce midi sur le projet du président de la République d’instaurer un service national universel. Les sénateurs Jean-Marie Bockel et Jean-Marc Todeschini soulignent une initiative louable mais mettent en garde sur la méthode employée sur la protection du budget militaire.
Public Sénat

Par Jules Duribreu

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C’est une promesse de campagne qu’Emmanuel Macron entend bien réaliser. Un grand service national pour toute une classe d'âge, soit 800 000 jeunes potentiellement concernés. Pensé comme étant universel et obligatoire, les contours de ce projet restent toutefois particulièrement flous, et les premières évaluations doutaient de la faisabilité même de ce service national.

Un projet encore flou

Jean-Marie Bockel « L'engagement du président est une bonne idée »
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On se souvient ainsi d’un premier rapport parlementaire, réalisé par deux députées, qui proposaient un projet sensiblement différent de celui de l’Elysée, celui de l'inspection générale qui émettait de sérieuses réserves, notamment sur le coût de fonctionnement. L’Elysée a depuis décidé de recentrer la construction du projet en confiant ,mi-février, cette question à un groupe de travail présidé par le général Daniel Ménaouine et qui rendra ses conclusions à la fin du mois.

Le parlement peu consulté sur ce sujet

C’est bien ce dernier point qui choque le plus les sénateurs de la commission des affaires étrangères, dénonçant une « exclusion du parlement » sur ce sujet, ils souhaitent au contraire que cette question du service national universel fasse l’objet d’un véritable débat de société. « Non seulement le Parlement à son mot à dire sur cette question, mais en plus, nous regrettons de ne pas avoir été associés à la commission Ménaouine, contrairement à ce que nous avait promis la ministre. Mais, sur ce dossier, on voit que ça a été une méthode très confuse, le rapport de l’inspection générale a été enterré, les parlementaires ont demandé communication de ce rapport, ça n’a jamais été fait » estime le sénateur socialiste Jean-Marc Todeschini.

Jean-Marc Todeschini « Le parlement a son mot à dire sur cette question »
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Un service national en trois phases ?

Sur la forme que prendra ce service national, ici aussi faute d’informations claires, les sénateurs tâtonnent un peu. « On a travaillé en rencontrant beaucoup de personnes et on en a fait des déductions, on a aussi interprété les propos du président de la République » note Jean-Marc Todeschini. 3 grandes phases semblent pourtant se dessiner. Une première devrait s’inscrire dans le cadre scolaire, il s’agirait avant tout ici de promouvoir l’engagement de défense, qui reste aujourd’hui inégalement mis en oeuvre.

La deuxième phase, la plus sensible, serait une période de regroupement, de vie en communauté pour cette classe d'âge, d’une durée entre 1 et 3 mois. « Un moment de brassage social, qui doit contribuer à raviver le lien national et inculquer le sens de l’engagement » estiment les sénateurs tout en rappelant le caractère risqué et coûteux de cette initiative qui soulève de nombreuses questions. « Nous pensons que cet aspect est le plus difficile, sur la question de la durée délicate à arrêter, notamment du fait du risque de rejet des jeunes, il faut trouver la bonne durée. Mais ce n’est pas tout, on a regardé aussi les conditions pratiques, ça ne peut pas être le rôle de l’armée de faire l’encadrement. Il faut donc aussi trouver une structure d’encadrement, mais aussi d’hébergement. On pense aussi la question de l'âge, de l’autorité parentale, on veut mettre toutes ces questions sur la table. » avance le sénateur centriste Jean-Marie Bockel.

Enfin, la troisième phase prendrait la forme d’un engagement au service d’une cause collective, dans le cadre des dispositifs déjà existants, le service civique par exemple. « C’est une incitation forte à s’engager dans le monde associatif, les ONG, des dispositifs militaires existants déjà. Mais nous, nous pensons que la condition de la réussite, c’est le volontariat, si cette troisième séquence est obligatoire, ça ne marchera pas » estime Jean-Marie Bockel.

Jean-Marie Bockel « La condition de la réussite, c’est le volontariat »
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Les recommandations des sénateurs

Pour garantir le succès de ce service national universel, les sénateurs font quelques recommandations. Ainsi, ces derniers souhaitent avant tout une préservation du budget des armées. « La commission des affaires étrangères et de la défense a une priorité, le financement du SNU ne devra pas obérer le budget des armées, celles-ci ne peuvent pas absorber la charge financière que représenteraient la remise en état d’infrastructures ayant cessé d'être utilisées et l’affectation de milliers de militaires à des postes d’encadrement. »

A cet effet, les sénateurs déposeront des amendements au projet de loi de programmation militaire afin d’y exclure le financement du SNU.

En outre, les sénateurs insistent sur la nécessité d’avoir une véritable adhésion des jeunes au projet, au risque que le projet ne fonctionne pas, voire fasse renaître un sentiment antimilitariste. «Rien ne serait pire que des jeunes se retrouvant enfermés sans comprendre pourquoi avec le sentiment de perdre leur temps »

Enfin, le SNU devra accorder une attention toute particulière aux collectivités territoriales « Le projet devra aussi obtenir sinon le soutien, du moins l’accord des collectivités territoriales, qui peuvent être concernées à plusieurs titres notamment sur la question de la mise à disposition des infrastructures. »

 

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